« Il n’y aura pas de cessez-le-feu, de cessez-le-feu général, à Gaza, sans la libération de nos otages [...]En ce qui concerne les petites pauses – une heure par-ci, une heure par-là –, nous les avons déjà eues » a encore une fois affirmé Netanyahou avant de concéder des pauses de 4 heures par jour. « Ces quatre heures de pause sont une honte et d’un cynisme affligeant », répond un médecin, elles ne serviront à « rien » alors que le système hospitalier est bombardé, détruit, que le matériel manque, comme les soignants épuisés. Elles n’ont qu’un objectif, faciliter l’organisation par l’armée israélienne du déplacement forcé, le dramatique exode, des gazaouis vers le Sud. Le gouvernement génocidaire d’Israël s’oppose en fait à toute aide humanitaire. Pour lui, il n’y a pas de civils non impliqués dans la bande de Gaza, une responsabilité collective qui appelle une punition, une vengeance collective.
Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, dénonce un « cimetière pour les enfants », « Le cauchemar à Gaza est plus qu’une crise humanitaire, c’est une crise de l’humanité ».
« Aucun endroit n’est en sécurité, c’est une guerre totale, une tragédie sans échappatoire », dénonce Médecins sans frontière, « les bombes qui tombent partout », les camps de l’ONU surpeuplés où s’entassent des dizaines de milliers de déplacé·e·s dans des conditions désastreuses.
Qu’importe, pour l’armée israélienne. Toutes celles et ceux qui restent à Gaza sont des ennemi·e·s, alors que la bande de Gaza est maintenant coupée en deux sans que la majorité de la population ait pu fuir vers le sud. Des centaines de milliers de civils restent pris au piège dans le nord que les forces israéliennes ont pratiquement bouclé tout en étendant leurs opérations militaires en Cisjordanie et à la frontière nord d’Israël avec le Liban et en Syrie.
Netanyahou, désavoué par une large fraction des Israéliens eux-mêmes, ne voit pas d’autre issue qu’une guerre de longue durée. « C’est un test pour toute l’humanité, c’est une lutte entre les forces du mal… et l’axe de la liberté et du progrès. Nous sommes le peuple de la lumière, ils sont le peuple des ténèbres et la lumière doit triompher des ténèbres. Mon rôle est maintenant de mener tous les Israéliens à une victoire écrasante… » Ce discours ultra-religieux et raciste vise à préparer de nouveaux crimes contre les Palestiniens, à exécuter le plan d’invasion militaire annoncé depuis plus de 15 jours, un terrorisme d’État commis au nom de la Torah et du projet du « Grand Israël », la colonisation et l’annexion de tous les territoires palestiniens, Cisjordanie, Gaza voire les territoires de Jordanie, du Liban.
L’armée israélienne est une armée d’occupation qui selon les propos de Netanyahou devra prendre « pour une durée indéterminée, la responsabilité générale de la sécurité » dans le territoire palestinien, c’est à dire occuper militairement la bande de Gaza et, dans la foulée, la Cisjordanie. Et Yoav Gallant, ministre fasciste de la défense israélienne, ne cache pas ses intentions menaçant le Hezbollah : « Ce que nous pouvons faire à Gaza, nous pouvons aussi le faire à Beyrouth. »
Blinken ministre des affaires étrangères de Netanyahou et Biden…
Le secrétaire d’État américain, Blinken, a fait la semaine dernière, pour son troisième voyage depuis le début de la guerre, la tournée des popotes diplomatiques et étatiques au Moyen Orient au nom de l’alliance Biden-Netanyahou pour s’assurer des arrières de l’armée israélienne et éviter, à ce stade de la guerre, un embrasement de la région en se prêtant à la sordide mascarade diplomatique qui consiste à discuter de « l’après-guerre ». Blinken, en passant le 4 novembre à Bagdad, en Irak, a pu mesurer ce qu’était l’après-guerre des années plus tard, un pays détruit, sans État, divisé, où la population vit dans le dénuement, la misère, la peur. Il sait que pour les Palestiniens ce sera bien pire encore.
Il a rencontré à Ramallah, en Cisjordanie, Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité palestinienne pour lui dire, en résumé, qu’« une Autorité palestinienne efficace et régénérée » serait la mieux à même de contrôler Gaza après-guerre voire, à plus long terme, un Etat palestinien au côté d’Israël. Mahmoud Abbas ne s’est pas dérobé, prêt à assumer le pouvoir sur les ruines de Gaza dans le cadre d’une « solution politique globale » qui reconnaîtrait Jérusalem-Est comme sa capitale, inclurait la Cisjordanie, où l’armée israélienne se déploie massivement tout comme à Jérusalem-Est, la partie arabe de la capitale annexée par Israël en 1967. Une « solution politique globale » qui n’est qu’un leurre pour laisser croire qu’il y aurait une issue à la guerre autre que sa poursuite sans fin, et Mahmoud Abbas se prête à ce jeu cynique et morbide alors qu’il sait que l’armée israélienne ainsi que la Maison Blanche entendent poursuivre leurs objectifs de « destruction » du Hamas, du peuple palestinien afin d’assurer leur mainmise sur le Moyen Orient, en préparation d’une guerre contre l’Iran.
Netanyahou a repoussé ces faux-semblants diplomatiques : « Il ne pourra pas y avoir une autorité dirigée par quelqu’un qui, plus de trente jours après le massacre [du 7 octobre], ne l’a toujours pas condamné (…). Il faudra autre chose là-bas. Mais, dans tous les cas, il faudra que la sécurité soit sous notre contrôle ». Il anticipe sans ambiguïté la suite de la guerre, c’est à dire sa poursuite que préparent aussi Biden Ce dernier vient d’envoyer en Israël le directeur de la CIA, William Burns, pour collaborer au plus près avec le Mossad et les services de sécurité israéliens alors que siège déjà au sein du cabinet de guerre israélien l’américain Ron Dermer, chargé des relations avec l’administration Biden, autre illustration de l’implication directe des USA.
« Le droit de se défendre » ou la légitimation de la guerre du capitalisme occidental contre le reste du monde
Dans la foulée, Blinken a opposé une fin de non-recevoir aux chefs de la diplomatie égyptien, émirien, jordanien, qatari et saoudien, qui demandaient un « cessez-le-feu ». « Les pays arabes exigent un cessez-le-feu immédiat, qui mettra fin à cette guerre et mettra fin aux massacres d’innocents et aux destructions qu’elle provoque », a déclaré le ministre des affaires étrangères jordanien, Ayman Al-Safadi. « On n’accepte pas la notion d’autodéfense », a-t-il ajouté lors d’une conférence de presse commune avec Blinken, avertissant « que toute la région est en train de sombrer dans un océan de haine qui façonnera les générations à venir ».
« Un cessez-le-feu laisserait simplement le Hamas en place, capable de se regrouper et de répéter ce qu’il a fait le 7 octobre », la réponse de Blinken est celle de Netanyahou. Les USA reprennent à leur compte, dans la continuité de la guerre sans fin contre le terrorisme de Bush, le discours de l’extrême droite sioniste qui dénonce dans le Hamas une offensive islamique et djihadiste, ce que la propagande orchestrée par Biden-Netanyahou que reprend Macron désigne comme un antisémitisme mondialisé, un terrorisme islamiste qui serait au cœur de l’affrontement entre les puissances occidentales et les pays dits du Sud, la Chine et la Russie.
Les États-Unis soutiennent Israël à l’ONU sans la moindre réserve ni faille, en usant de leur droit de veto dès que nécessaire au Conseil de sécurité et en votant contre un cessez-le-feu à l’Assemblée générale. Ils se sont engagés à fournir une aide militaire supplémentaire de 14 milliards de dollars à Israël, en plus des dizaines des milliards de dollars qui, ces dernières années, ont contribué à financer le stock d’armes de l’État sioniste, qui sont maintenant larguées sur des civils sans défense.
Le gouvernement Biden a déployé dans la région deux groupes d’attaque aéronavals avec 15 000 militaires et, plus récemment, un sous-marin doté d’armes nucléaires, qui viennent renforcer le dispositif américain au Moyen-Orient, qui compte plus de 40 000 hommes stationnés dans onze pays, soulignant ainsi sa volonté de se donner les moyens de mener une guerre plus large contre les obstacles régionaux à l’hégémonie de Washington, dont l’Iran au premier rang.
Les puissances européennes s’alignent. Réunis à Tokyo, les ministres des Affaires étrangères du G7, Grande-Bretagne, Canada, France, Allemagne, Japon, Italie et États-Unis, ont fait écho à la propagande de Netanyahou, « Nous condamnons sans équivoque les attaques terroristes du Hamas et d’autres groupes en Israël qui ont commencé le 7 octobre 2023, ainsi que les attaques de missiles en cours contre Israël. […] Nous soulignons le droit d’Israël à se défendre et à défendre son peuple, conformément au droit international, tout en cherchant à empêcher que cela ne se reproduise ».
La légitimation du droit du plus fort à appliquer la loi du Talion a aussi pour fonction de justifier le militarisme des puissances occidentales dont Biden a donné le la en proclamant sa volonté de « restaurer le leadership américain ». Et c’est bien cette politique qui arme la furie génocidaire d’Israël saisissant l’occasion que lui donnaient les atrocités terroristes aveugles du Hamas le 7 octobre.
Le camp de la réaction se rassemble au nom de la défense de l’occident sous couvert de lutte contre l’antisémitisme
En complément de ce soutien politique et militaire, les différents gouvernements mènent une offensive idéologique belliciste et raciste contre les Palestiniens et le monde arabe en reprenant à leur compte l’amalgame entre antisionisme et antisémitisme. C’est dans le cadre de cette offensive idéologique visant à construire une union nationale autour de l’offensive militaire orchestrée par les USA que s’est organisée l’imposture de la marche contre l’antisémitisme, rassemblant dans la confusion la plus totale du PC et du PS au RN sans oublier Zemmour en passant par la macronie...
« Cherchons à faire en sorte que toute la gauche, toute la droite soient à l’unisson sur cette question. Battons-nous ensemble contre l’antisémitisme », l’initiative revient au premier secrétaire du PS qui avait lancé l’invitation y compris en direction du RN, si ce dernier « veut bien (...) faire en sorte de couper avec sa propre histoire et une partie de ses élus » pour ensuite se rétracter avant que Gérard Larcher, président du Sénat, et la présidente de l’Assemblée, Yaël Braun-Pivet, ne reprennent l’initiative pour appeler « tous ceux qui se reconnaissent dans les valeurs de notre République » à participer dimanche à une « grande marche civique » contre l’antisémitisme : « La République est en danger ; ses fondements mêmes sont attaqués. Il est temps de réagir, il est temps de retrouver ce qui fait la force de notre pays ; le respect des droits de l’homme et de la laïcité, pilier de notre modèle humaniste. » pour désigner les responsables, le Hamas, c’est à dire les Palestiniens, les Arabes, l’Islam. « Depuis l’attaque terroriste perpétrée en Israël par le Hamas, le 7 octobre dernier, un massacre d’une ignominie jamais égalée depuis la Shoah, qui a causé la mort de 40 de nos compatriotes, les actes antisémites se multiplient dangereusement dans notre pays. » Et d’insister « Un sursaut s’impose, pour manifester clairement que la France n’accepte pas l’antisémitisme et que les Français ne se résignent pas, et ne se résigneront jamais à la fatalité des haines (...) Notre laïcité doit être protégée, elle est un rempart contre l’islamisme. » L’enthousiasme attendu de l’extrême droite à se rallier à l’appel a semé le trouble et introduit le doute sur la crédibilité et la sincérité de cette marche.
Finalement, tous refusent la présence du RN qui... sera là cependant, ladite gauche se proposant de se constituer en cordon républicain… L’imposture se double de la farce !
Les admirateurs de Pétain, les enfants de Maurras and co, ceux de Le Pen, les admirateurs de la République coloniale et impérialiste, les artisans des guerres coloniales contre le peuple vietnamien ou algérien se retrouvent ensemble non contre l’antisémitisme mais en soutien au régime d’extrême droite d’Israël, à sa guerre génocidaire, tous artisans d’une campagne raciste et xénophobe. Le visage hideux et repoussant de l’hypocrisie sans masque, de la suffisance nationale et des préjugés islamophobes !
Ce sont les mêmes qui expulsent violemment Mariam Abou Daqa, militante du Front populaire de libération de la Palestine, expulsion validée mercredi par le Conseil d’Etat, infirmant une première décision du tribunal administratif de Paris qui avait suspendu l’arrêté d’expulsion pris par le ministère de l’Intérieur.
Jean-Luc Mélenchon a raison de dénoncer cette marche macabre, « Les amis du soutien inconditionnel au massacre ont leur rendez-vous ». Oui, avec cordon sanitaire ou pas, tout le camp de la réaction et des va-t-en guerre s’est rassemblé au nom de leur vieille république coloniale et impérialiste et de la défense de l’occident contre le peuple juif dont la tragédie est instrumentalisée.
Et ce sont eux qui produisent l’antisémitisme en soutenant la guerre de nettoyage ethnique menée par les sionistes, en participant à l’offensive politique et militaire des grandes puissances occidentales, leur guerre réactionnaire des civilisations, leur campagne raciste contre les musulmans, leur xénophobie, le capitalisme occidental contre le reste du monde.
Contre tous les nationalismes, le racisme, l’antisémitisme et les fondamentalismes religieux, le rassemblement démocratique, révolutionnaire, internationaliste
Les longues décennies de guerre et de souffrances infligées aux Palestiniens, qui manifestent aussi l’échec du projet sioniste qui prétendait garantir un « refuge sûr pour les Juifs », font la démonstration de l’incompatibilité des droits démocratiques et sociaux avec une politique enfermée dans la perspective nationaliste. Le Hamas est en réalité l’ultime et monstrueuse conséquence de l’échec du Fatah et de l’OLP, incapables de concevoir une politique visant à établir un État laïc et démocratique, binational, en unifiant travailleurs juifs et palestiniens, leurs luttes contre l’État sioniste, ses protecteurs impérialistes et les régimes arabes soucieux de sauvegarder leur dictature et de composer avec les USA et leurs alliés. Le gouvernement d’extrême-droite d’Israël aussi.
Le nationalisme a enfermé les deux peuples dans un piège dont surgit l’obscurantisme religieux et qui aujourd’hui les étrangle. Il ne peut y avoir de respect des droits nationaux des Palestiniens et des Israéliens, des droits démocratiques sans le renversement de l’État sioniste et des régimes arabes, sans l’alliance des classes exploitées et opprimées du Moyen Orient pour construire une fédération d’États socialistes.
C’est ce même piège que les dirigeants de grandes puissances occidentales voudraient mondialiser avec leur prétendue lutte contre l’antisémitisme, en réalité leur défense du sionisme, pour dresser les populations des puissances occidentales contre le monde arabe au nom de la lutte contre l’islamisme et le terrorisme, en flattant les peurs, le racisme et la xénophobie.
La politique génocidaire d’Israël est la poursuite de cette guerre contre le terrorisme des dites démocraties, le capitalisme occidental, contre le reste du monde qui est entré en concurrence avec lui. Elle est le signe de sa faillite criminelle.
Une nouvelle période s’ouvre à travers les dures épreuves des conséquences de cet échec sanglant, l’impasse désespérée du terrorisme du Hamas et le terrorisme d’État d’Israël emporté par la furie des classes dominantes répondant aux projets militaristes des USA et de l’Otan.
Ce sont les fruits empoissonnés du colonialisme et de l’impérialisme, les scories sanglantes du colonialisme là où le mouvement de libération nationale des années 70 n’a pu conquérir l’indépendance et qui, aujourd’hui, à l’époque du capitalise financiarisé mondialisé, ne peuvent trouver d’issue progressiste et démocratique que dans la lutte unie des travailleurs et des opprimés, leur fraternisation.
La guerre suscite une opposition massive à travers le monde, y compris en Israël émergent des oppositions. Ce soulèvement d’indignation, de colère, de révolte va au-delà du refus de l’inacceptable, le génocide d’un peuple. Il est l’expression confuse du refus de ce mensonge officiel visant à légitimer le massacre d’un peuple au nom des crimes dont un autre peuple a été victime dans le passé, les crimes du nazisme. L’expression que ce drame historique qui se joue maintenant au Moyen Orient est la condamnation des vieilles puissances coloniales et impérialistes qui ont dominé le monde, dressé les peuples les uns contre les autres pour mieux les asservir et continuent de le faire pour perpétuer leur règne.
Le drame palestinien, la tragédie juive sont un terrible concentré du bilan barbare de la domination du capitalisme.
La perpétuation de cette domination emploie les mêmes armes abjectes en dévoyant la lutte contre l’antisémitisme en une monstrueuse propagande pour justifier la politique génocidaire d’Israël.
La solidarité avec le peuple palestinien est un combat internationaliste en rupture avec l’impasse, le piège du nationalisme, en rupture avec tout racisme, l’antisémitisme comme l’islamophobie pour un État binational, démocratique, laïc, socialiste. Elle s’inscrit dans la continuité d’un courant historique dans lequel s’inscrivent tous nos combats, la lutte de la classe opprimée pour son émancipation, celle de l’humanité de la domination de classe qui engendre la misère, la dictature, le racisme et la guerre.
Yvan Lemaître