Macron-Darmanin et le gouvernement se sont immédiatement saisis du meurtre abject de Dominique Bernard au lycée d’Arras, de l’émotion et de l’indignation qu’il a suscitées, pour lancer une campagne virulente, raciste et xénophobe contre les étrangers et français fichés S, et contre tous les étrangers, terroristes potentiels dans leurs cerveaux malades. L’attentat de Bruxelles a décuplé les tensions pour venir justifier l’offensive policière du pouvoir.

Au nom de la lutte contre le terrorisme, celui-ci a lancé une traque à grande échelle contre les « individus suspectés de radicalisation… jugés dangereux » en vue de leur expulsion, demandant aux préfets de retirer leur carte de séjour à ceux en situation régulière, avec une attention particulière pour les « jeunes hommes originaires du Caucase sur la tranche 16-25 ans », l'agresseur d'Arras étant originaire d'Ingouchie dans le nord du Caucase.

Ils prennent prétexte du meurtre d’Arras pour accélérer la mise au vote de la loi immigration « pour éviter que d’autres crimes de cet ordre ne soient perpétrés » et amplifier leur campagne xénophobe. 

Gabriel Attal, lors des minutes de silence organisées dans les établissements scolaires pour le professeur assassiné a prévenu : « Je vais être très clair et très ferme avec vous : je ne tolérerai aucune contestation ni aucune provocation… Ce qui est en jeu, c’est l’autorité de l’école et de la République. Il y aura un signalement nominatif de tout incident à l’occasion de ces recueillements, avec une saisine systématique du procureur de la République pour engager des poursuites ». Ses menaces se sont accompagnées d’une demande de fouilles d’élèves, personnels et visiteurs à l’entrée des établissements, faisant de tou·te·s des suspects.

La France est passée en « urgence attentat », le niveau le plus élevé de Vigipirate. Il vise toute la population et n’empêchera pas d’autres passages à l’acte et gestes désespérés qu’encourage leur politique de stigmatisation des personnes étrangères ou d’origine étrangère, nécessairement musulmanes à leurs yeux et donc suspectes de terrorisme.

Interdiction de manifester, poursuites judiciaires, la solidarité jugée comme un crime

Ils accusent de complicité de terrorisme celles et ceux qui soutiennent le peuple palestinien, mais ce sont eux qui, en s’emparant du drame d’Arras, instrumentalisent et « importent » en France la guerre d’Israël contre le peuple palestinien. « Une atmosphère de djihadisme, de passage à l'acte, est évidente depuis samedi dernier », a déclaré Darmanin lors d'une conférence de presse, le 12 octobre, le lendemain du meurtre de Dominique Bernard.

Pour Darmanin et le bloc réactionnaire, les travailleurs étrangers ou français d’origine étrangère sont tous de potentiels délinquants et terroristes, ennemis des « valeurs morales de la République et de la France » que défend Macron, les valeurs des classes possédantes et du capitalisme occidental. Faute de pouvoir s’attaquer aux causes et origines du terrorisme dont leur politique de domination et d’exploitation des peuples porte une large responsabilité, leurs réponses exclusivement policières exacerbent les tensions et visent toute la population, tout en distillant le poison de la haine et de la division pour tenter de dresser les travailleurs français, étrangers, migrants… les uns contre les autres au profit des classes dominantes et du patronat.

La simple affirmation de soutien au peuple palestinien, de dénonciation du sionisme est taxée d’antisémitisme. « Personne ne touchera à un cheveu d'un juif sans attendre la réponse foudroyante de l’État », a déclaré Darmanin, parce que « l’État saura dénoncer que l’antisionisme incontestablement est une forme d’antisémitisme. » Les 189 premiers actes antisémites recensés par le gouvernement sur le territoire ont donné lieu à 65 interpellations, dont 23 étrangers, a tenu à préciser Darmanin, alors que c’est l’agressivité de l’intégrisme religieux sioniste qui est responsable de cette recrudescence de l’antisémitisme, tout comme le fait de faire de l’ensemble des juifs des sionistes. Sans doute aurait-il interdit la manifestation de centaines de juifs américains qui ont occupé une salle du Congrès à Washington, demandant la paix et dénonçant la complicité de Biden au massacre de Gaza… pour antisémitisme !

Le gouvernement Macron, déstabilisé par les conséquences du chaos engendré par la folie capitaliste, le monde qu’il défend, prisonnier de sa fuite en avant sécuritaire, raciste et xénophobe, n’a comme seule réponse à celles et ceux qui ne se plient pas à sa propagande que la répression brutale, l’interdiction délirante des manifestations de soutien au peuple palestinien qualifiées de pro-Hamas.

Les organisations et les militants accusés d’être pro-palestiniens sont traqués. Darmanin a lancé contre le NPA de Philippe Poutou une procédure judiciaire pour « apologie du terrorisme » pour avoir manifesté son soutien au peuple palestinien, de même que contre la députée LFI Danièle Obono qui a refusé de qualifier le Hamas d’organisation terroriste. Pour les mêmes raisons ce vendredi, en plus « d’incitation à la haine », Jean-Paul Delescaut, le secrétaire départemental de la CGT du Nord a été interpellé à son domicile et placé en garde en vue pour quelques heures. Des organisations sont menacées de dissolution. La militante féministe palestinienne Mariam Abou Daqqa, dont les conférences en France ont été interdites, a été assignée à résidence à Marseille en attendant son expulsion, avant que la justice ne désavoue les débordements sécuritaires de Darmanin, estimant que « le ministre de l’Intérieur a porté une atteinte grave et manifestement illégale à la liberté d’expression et à la liberté d’aller et venir », et ne suspende l’arrêté d’expulsion, comme elle est revenue sur la plupart des interdictions de manifestation, face aux protestations et à la contestation dans de nombreuses villes du pays.

Autour de la loi immigration, le front sécuritaire, raciste et xénophobe avec la droite et l’extrême-droite

« Tout cela est la conséquence d’une immigration de masse. Cet assassin n’aurait plus dû être en France depuis longtemps, il a été débouté du droit d’asile », s’est empressé de déclarer Ciotti après le meurtre d’Arras. Romain Baudry, député RN est intervenu sur le même registre : « L’assaillant était un ancien élève du lycée, étranger, radicalisé, fiché S. Il aurait dû être expulsé, mais la France protège ceux qui arrivent sur son sol avant l’âge de 13 ans (…) Le projet de loi immigration doit mettre fin à ces protections insensées, qui coûtent la vie à des innocents ! ». L’hystérie de l’extrême-droite a été jusqu’à s’en prendre aux députés de gauche à l’Assemblée nationale, la gauche qualifiée de « racailles islamistes », accusant ses militants d’avoir soutenu la mobilisation contre l’expulsion de la famille du meurtrier en 2014.

Darmanin, sous la pression de l’accusation de laxisme de la droite et de l’extrême-droite, prépare le durcissement de la loi Immigration qui sera débattue au Sénat à partir du 6 novembre et qu’il veut faire adopter, avec leurs votes, avant la fin de l’année, ce qui permettra, a-t-il dit « d’expulser tous ceux qui, même arrivés à l’âge de deux ou trois ans, sont étrangers et méritent de retourner dans leur pays d’origine ».

La loi Immigration « va vers davantage de fermeté, une réponse plus immédiate et plus forte » a assuré Macron. Elle prévoit un allongement de la durée maximale de rétention administrative pour les étrangers en situation irrégulière « fichés S ou délinquants », pour se donner plus de temps pour les expulser, le retrait de leurs titres de séjour. Elle rajoute dans les critères de fichage S « l’adhésion à l’idéologie djihadiste », comme par exemple avoir dans son téléphone « une photo de décapitation de l’Etat islamique ». Mais elle va aussi aggraver la situation de tous les sans-papiers avec le projet de suppression de l’AME, l’aide médicale d’Etat qui bénéficie aux personnes en situation irrégulière, remplacée par une aide médicale d’urgence qui se limiterait à quelques soins urgents ou essentiels.

Contre le nationalisme, le racisme et l’union nationale, partout faire vivre la démocratie et la solidarité internationale, se rassembler

Toutes les interdictions d’exprimer le moindre soutien au peuple palestinien et la moindre critique à l’égard d’Israël sont un aveu, une façon pour Macron et le gouvernement d’être en guerre aux côtés d’Israël contre le peuple palestinien, de façonner l’opinion à leur politique belliciste, comme ils sont en guerre aux côtés des autres puissances de l’OTAN en Ukraine, pour le compte des classes possédantes et des capitalistes occidentaux pour leur droit à exploiter, à piller les richesses des peuples et de la planète.

Il est de l’intérêt et de la responsabilité de l’ensemble du mouvement ouvrier de répondre à cette violente offensive anti-palestinienne, raciste et xénophobe et aux instrumentalisations du pouvoir et de l’extrême droite, de lutter contre la division, en refusant de se laisser imposer l’union nationale, en combattant le nationalisme et toutes les frontières quelles qu’elles soient, géographiques, d’origine ou de religion qui servent les classes possédantes et le patronat.

Il est indispensable et urgent que sur les lieux de travail et d’étude, dans les quartiers, dans le cadre de nos syndicats, de nos collectifs et associations, se tiennent des réunions pour condamner les politiques de Macron-Darmanin, exiger l’arrêt immédiat des bombardements israéliens, la levée du siège de Gaza et la mise à la disposition des Gazaouis de la nourriture, l’eau, l’électricité, les soins médicaux et tous les autres produits de première nécessité indispensables à leur survie, ainsi que pour dénoncer la guerre et exprimer notre solidarité internationale. Il est indispensable qu’ensemble nous fassions respecter la liberté d’opinion, d’expression et de manifestation.

Face au bloc réactionnaire, les travailleuses et les travailleurs, les classes populaires, la jeunesse sont les seuls à même de porter ce combat, celui pour le progrès et l’émancipation, la démocratie, la solidarité internationale, pour un monde débarrassé des frontières et de l’exploitation. Il n’y a pas d’autre voie pour lutter contre le terrorisme.

Christine Héraud

 

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