La folie et l’horreur de l’escalade guerrière se sont emparées du Moyen Orient, après la guerre d’Ukraine, dans cette absurde et criminelle concurrence entre puissances capitalistes qui se jouent des peuples et les sacrifient à leurs luttes d’influence pour s’approprier les richesses, contrôler les sources d’énergies, asseoir le pouvoir et la domination des classes capitalistes. Cet engrenage fou et sanglant est hors de contrôle. Dans la guerre d’Ukraine, les USA et leurs alliés de l’Otan veulent mettre Poutine à genoux et désignent la Chine comme leur cible, au Moyen Orient, Israël et ses alliés veulent détruire le Hamas, en réalité liquider la question palestinienne, mettre un peuple à terre, sous le poids des bombes, pour que prospèrent les affaires de la bourgeoisie israélienne et celles de son maître, la première puissance mondiale, les USA.

Aucune issue n’est possible pour eux, si ce n’est la défaite du camp opposé à celui des vieilles puissances impérialistes, les USA, la France, l’Otan. La paix pour eux ne peut être que la capitulation de leur ennemi, c’est à dire une étape vers une nouvelle guerre, la guerre sans fin que connaît le Moyen Orient et dont le peuple palestinien est victime depuis des décennies.

Israël a mené 5 guerres contre lui depuis que son Etat a été créé au lendemain de la deuxième guerre mondiale grâce au soutien des USA qui voyaient en lui la possibilité de construire une place forte au Moyen Orient contre les peuples qui aspiraient à en finir avec l’oppression coloniale et pour garantir leurs intérêts et contrôler leurs sources d’approvisionnement en pétrole.

La responsabilité de la guerre n’incombe pas en premier lieu au Hamas contrairement à ce que prétend le discours officiel des puissances occidentales. La vérité historique est celle de la guerre sans fin menée par Israël et ses alliés contre le peuple palestinien spolié de ses terres par l’État colonial, théocratique, d’Israël pris à son propre piège, prisonnier de sa logique expansionniste qui ne peut connaître d’autre limite que la résistance palestinienne, la colère des peuples.

La violence aveugle, les atrocités commises par le Hamas le 7 octobre indignent et révoltent à juste titre. Sa politique obscurantiste, nationaliste et religieuse, sème la haine et enferme la lutte du peuple palestinien dans une impasse faisant de lui une monnaie d’échange dans les négociations entre les régimes arabes réactionnaires, l’Iran et les puissances occidentales. Les seuls alliés du peuple palestinien sont les peuples du monde arabe, les exploités d’Israël, les peuples et les travailleurs du monde.

Cette violence du Hamas est retournée par Israël contre les Palestiniens. Il s’en sert, cyniquement, pour justifier sa politique qui vise à liquider la question palestinienne pour avoir les mains libres pour réaliser le rêve sioniste du Grand Israël qui engloberait l’ensemble du territoire de la Palestine sous mandat britannique entre la mer Méditerranée et le Jourdain, y compris la Cisjordanie et Gaza.

Si l’agression du Hamas le 7 octobre a entraîné la mort de 1400 personnes, l’offensive d’Israël à Gaza a déjà tué près de 4 650 Palestiniens, dont 40 % d’enfants et plus de 14 000 blessés, rasant des quartiers entiers, éliminant des familles entières et forçant à se déplacer plus d’un million de personnes. Le gouvernement israélien a distribué plus de 10 000 fusils à des colons extrémistes en Cisjordanie occupée, afin de faciliter l’escalade de leurs attaques et pogroms contre les Palestiniens.

On ne saura peut-être jamais avec certitude l’origine exacte de la frappe aérienne sur l’hôpital al-Ahli de Gaza qui a, mardi 17 octobre, tué plus de 400 Palestiniens. Biden n’a pas manqué de reprendre à son compte la version israélienne pour affirmer devant Netanyahou que la frappe avait été effectuée « par la partie adverse, pas par vous ». Pourtant cette frappe ne peut être le fait d’une simple roquette défectueuse tirée par erreur mais bien d’un missile donc probablement israélien et ce drame s’inscrit dans le carnage auquel se livre Israël à Gaza. Trois jours plus tard, de nombreux déplacés s’abritant dans l’enceinte de l’église grecque orthodoxe de Saint-Porphyre à Gaza ont été tués et d’autres blessés par un raid israélien.

Faute d’une aide humanitaire, la situation Gaza « devient incontrôlable », a affirmé mercredi le patron de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) soulignant que les fournitures médicales étaient bloquées depuis quatre jours à la frontière entre l’Égypte et Gaza. Après le départ de Biden, Israël a été contraint de faire un geste pour autoriser l’entrée d’aide humanitaire depuis l’Égypte, mais il « n’autorisera aucune aide humanitaire à partir de son territoire vers la bande de Gaza ». L’aide se résume à 20 camions alors que Gaza affamée manque de tout. Elle n’a commencé à être acheminée que samedi. Et Israël a le feu vert de Biden pour son invasion terrestre, le Pentagone a ordonné la mise en alerte de 2 000 soldats et a annoncé que le groupe de préparation amphibie USS Bataan, comprenant 2 400 marines, serait également déployé aux côtés des deux porte-avions américains. Biden a assuré Netanyahou de l’envoi d’armes sans limites… Israël intensifie les bombardements pour préparer l’invasion terrestre de Gaza.

Biden en guerre avec Israël face à une possible extension de la guerre

Alors que le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, assure auprès de Netanyahou la gestion quotidienne de la guerre, la venue de Biden à Tel Aviv réaffirmait non seulement le soutien des USA à Israël mais leur union comme si Israël était devenu le 51ème Etat des Etats unis en invoquant le passé de la fondation d’Israël, la religion et… leur commune puissance militaire alors que Poutine rencontrait Xi JinPing à Pékin.

Il faut être aveugle ou hypocrite comme bien des commentateurs pour croire que Biden vient pour retenir Netanyahou. Faisant référence à la colère qui aurait emporté les USA -Bush, au lendemain du 11 Septembre-, il a certes appelé Netanyahou à ne pas agir dans la précipitation au risque de dresser non seulement les peuples du monde arabe mais le monde contre Israël et ses alliés, sans le dissuader le moins du monde d’aller au bout de son objectif, en finir avec Gaza et la question palestinienne. Les USA veulent reprendre la main sur Israël.

L’exceptionnel déploiement militaire au large d’Israël en témoigne. Il vise l’Iran et le Hezbollah, le Sud Liban et la Syrie déjà cibles de frappes aériennes et, a tenu à préciser le secrétaire à la défense états-unien, Lloyd Austin, « souligne l’engagement indéfectible des États-Unis pour la sécurité d’Israël et leur résolution à éviter que tout acteur, étatique ou non, cherche l’escalade dans cette guerre ». Mais Biden préférerait que Netanyahou ne se laisse pas emporter par la haine aveugle qui pourrait provoquer la révolte des peuples, une occupation militaire sanglante par trop expéditive de Gaza. Tout en assumant et soutenant le pire, il préférerait, semble-t-il, à ce stade, éviter une confrontation militaire avec l’Iran, un embrasement du Moyen Orient qui risquerait de semer la révolte populaire jusqu’aux USA.

Le ministre israélien de la défense, Yoav Gallant, a prévenu que la guerre contre le Hamas serait « une guerre féroce, une guerre meurtrière et une guerre qui changera de façon permanente la situation ». Ce que craint Biden, c’est que cette situation soit hors contrôle.

A son retour à la Maison Blanche, il a mis les points sur les i pour convaincre de son offensive militaire tant en Ukraine qu’en Palestine. Il a justifié l’intervention américaine dans la guerre d’Ukraine en défendant les Etats baltes et la Pologne, « ce sont des territoires de l’OTAN, nous défendrons chaque centimètre de territoire de l’OTAN ». Quant au Hamas, il « a déclenché un mal absolu ». Si les USA laissaient Poutine et le Hamas faire, « le conflit et le chaos pourraient se propager dans d’autres parties du monde » a-t-il dit pour justifier sa demande au Congrès de financer « en urgence » une aide à Israël et à l’Ukraine, une demande de 100 milliards d’euros.

De la même façon qu’il défend Israël et l’Ukraine au nom de la démocratie, Biden justifie le militarisme américain au nom de la sécurité du monde ! « Le leadership américain est ce qui unit le monde. Les alliances de l’Amérique sont ce qui nous maintient, nous Américains, en sécurité ».

Et c’est bien pour consolider ces alliances au sein du bloc occidental que Biden a organisé, vendredi, à la Maison blanche un sommet diplomatique avec l’UE pour renforcer leur « partenariat stratégique ».

Politique internationale et capitalisme mondialisé, la loi du talion mondialisée

Catherine Colonna, ministre française de l’Europe et des Affaires étrangères, déclarait il y a peu : « Israël a le droit de se défendre face à la monstruosité du Hamas et du danger qu’il représente. Sa réponse doit être ferme, elle doit être juste, elle doit être forte, elle sera forte si elle est juste, et elle sera juste si elle est conforme au droit international et en particulier au droit international humanitaire, et préserve les populations civiles. Israël est une grande démocratie, c’est la marque des démocraties que de respecter le droit. » Un résumé de l’hypocrisie des dirigeants des grandes puissances.

Pour les maîtres du monde le droit de se défendre est unilatéral, c’est leur droit qu’il refuse à leurs victimes auxquelles ils imposent par la force des armes et du capital leur domination.

En l’espace d’une semaine, en plus de l’ordre d’évacuation d’un million de civils, livrés à eux-mêmes, l’armée de Netanyahou aura empêché, avec le siège complet de Gaza, l’entrée de nourriture, d’eau, de médicaments, de carburant et d’électricité dont dépendent 2,3 millions de personnes. Elle aura détruit 5 540 maisons et rendu inhabitables 3 750 bâtiments supplémentaires (chiffres de l’ONU) par ses bombardements incessants et d’ores et déjà perpétré d’innombrables crimes de guerre.

Il y a un an, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission Européenne, avait déclaré à propos des attaques Russes : « Les attaques russes contre les infrastructures civiles, notamment l’électricité, constituent des crimes de guerre. Couper l’eau, l’électricité et le chauffage aux hommes, aux femmes et aux enfants à l’approche de l’hiver, ce sont des actes de pure terreur. Et nous devons l’appeler ainsi. » Il suffirait de remplacer « russes » par « israéliennes » et nous aurions la description du siège de Gaza... La barbarie de Poutine n’excuse en rien celle de Netanyahou.

Et l’ordre de déplacer les populations du Nord de Gaza combiné au blocus complet de Gaza, constitue « un transfert forcé de civils en violation du droit international », ainsi que le rappelait le porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme.

Qu’importe, tous soutiennent et laissent faire au nom du droit d’Israël de se défendre alors que c’est lui qui depuis 75 ans occupe des terres volées aux Palestiniens et impose, depuis 16 ans, à Gaza un blocus inhumain ! Qui depuis 56 ans viole la résolution 242 du Conseil de sécurité de l’ONU qui, en 1967, affirmait qu’une paix durable exige le retrait des forces armées israéliennes des territoires occupés et qui a tout fait pour que les accords d’Oslo qui pourtant lui étaient favorables ne puissent jamais réellement s’appliquer. L’État d’Israël n’a jamais respecté le droit international pas plus que ses soutiens quand ce dernier les dessert.

Aujourd’hui la guerre contre les Palestiniens franchit une nouvelle étape dans la barbarie pour devenir un nettoyage ethnique, un génocide.

Notre solidarité avec le peuple palestinien, l’unité internationaliste contre notre propre État

Le risque de développement d’une guerre à l’échelle du Moyen-Orient s’inscrit dans la continuité des politiques qui ont conduit à la guerre des États-Unis et de l’OTAN contre la Russie en Ukraine qui elle-même est considérée comme préparatoire à un conflit militaire avec la Chine. « Nous faisons face à un tournant de l’histoire », a déclaré Biden lors de son allocution à la Maison Blanche. Oui, le chef de la première puissance mondiale tient à l’affirmer face au monde entier, nous connaissons un tournant de l’histoire. Pour Biden, les USA et leurs alliés, il s’agit de prendre en compte les enjeux historiques de l’offensive militaire mondiale dans laquelle ils engagent leur pays et leurs alliés, d’y préparer l’opinion. Les exploités, les opprimés, le prolétariat mondial ont toute raison de prendre au sérieux le message.

Ce tournant de l’histoire a commencé au début de 2022 avec la guerre d’Ukraine. Les lignes de fracture, d’opposition et de polarisation entre grandes puissances qui s’expriment face à la guerre en Ukraine sont fondamentalement les mêmes pour la guerre qui se dessine au Moyen-Orient.

Nous sommes face à une nouvelle étape dramatique dans l’escalade militariste et guerrière des vieilles puissances impérialistes, les puissances occidentales, et leur bras armé l’Otan. Elle concentre les traits dominants de la nouvelle période dans laquelle la dérive du capitalisme mondialisé sénile a engagé l’humanité.

D’un côté la mondialisation de la course au profit et de la concurrence économique, son corollaire la guerre, les désordres économiques, la catastrophe écologique, la montée des forces réactionnaires, de l’intégrisme religieux et d’un nouveau fascisme qui commence à rassembler de larges fractions de la bourgeoisie et de son personnel politique.

De l’autre côté, le nécessaire rassemblement des forces démocratiques et progressistes qui porte la seule réponse historiquement possible, le socialisme, les forces du prolétariat mondialisé.

Les plans des grandes puissances, le jeu et les calculs des rivalités entre pays capitalistes sont perturbés par un mouvement croissant de la classe ouvrière, qui coïncide avec un début de révolte contre la guerre qu’accélère la tragédie insupportable que vivent les Palestiniens. Ces derniers jours, des millions de personnes ont manifesté à travers le monde pour s’opposer au génocide israélien à Gaza.

Ce mouvement de solidarité qui débute reprend à son compte les demandes immédiates du peuple palestinien, exigences humanitaires, cessez-le feu, la fin de la guerre et de la colonisation, la reconnaissance de ses droits nationaux.

Cette dernière ne pourra être satisfaite tant que régneront les bourgeoisies tant israélienne qu’arabes et les régimes réactionnaires qui les servent. Biden, comme tous les dirigeants des grandes puissances quand ils font mine de s’inquiéter de la colonisation, concède qu’il ne faudrait pas perdre de vue ce qu’ils appellent la « solution à deux Etats ». Après avoir condescendu à accepter l’urgence humanitaire, il a déclaré : « Nous ne pouvons pas renoncer à une solution à deux Etats. » Cette solution à deux Etats est un mythe agité régulièrement pour laisser un espoir illusoire aux Palestiniens mais il reste tout aussi illusoire aujourd’hui qu’au moment des accords d’Oslo et après.

Le droit des Palestiniens à une terre ne pourra se réaliser qu’à travers le renversement des régimes qui s’y sont toujours opposés par la fraternisation des travailleurs et des peuples, la fraternisation entre travailleurs palestiniens et israéliens pour en finir avec l’État théocratique d’Israël, le Hamas et autres Hezbollah ou théocratie d’Iran, en lien aussi avec les travailleurs des vieilles puissances impérialistes, principales responsables de l’impasse sanglante du sionisme.

De façon plus générale, aujourd’hui, la lutte de libération nationale est un mythe qui laisse la place aux instrumentalisations et dévoiements du légitime refus de toute forme d’occupation, d’oppression. Cela est vrai aussi pour les peuples d’Ukraine ou de Russie. Cette illusion esquive la question de fond, la lutte pour renverser sa propre bourgeoise, conquérir la démocratie, les droits nationaux qui ne peuvent se développer que dans le cadre de la coopération des peuples, une fédération socialiste des peuples.

Le tournant de l’histoire que nous connaissons unit la question sociale, démocratique, nationale dans un même programme, un même combat démocratique et révolutionnaire pour barrer la route à la réaction, lutter pour la conquête du pouvoir par les travailleurs eux-mêmes et construire un monde fondé sur la coopération des peuples. La solidarité face à la guerre, au militarisme, aux forces réactionnaires, obscurantistes et religieuses, à la xénophobie et au nationalisme est une lutte internationaliste contre notre propre bourgeoise, contre notre propre Etat et ses alliés engagés dans leur guerre de classe contre les travailleurs et les peuples.

Yvan Lemaitre

 

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