Plus de 10 000 personnes sont venues écouter, dimanche dernier, le maintenant candidat Zemmour à Villepinte, galvanisées par ses appels à la violence et à la haine raciste et xénophobe, par ses délires souverainistes et de références aux traditions d’une France ancestrale fantasmée. Un discours identitaire qui surfe sur la peur du déclassement et de la ruine d’une partie des classes moyennes qui constituent son public, un public réactionnaire qui n’était que haine contre les travailleur.se.s, les immigré.es, les migrant.es, les femmes, les LGBTI… stigmatisé.es comme les responsables du prétendu déclin de la France.

Une violence et une haine qui sont l’expression de la peur des classes possédantes devant leur propre déclin, celui de la faillite de leur société capitaliste, incapable de répondre aux besoins sanitaires, sociaux, écologiques, démocratiques de la population, des classes populaires et des jeunes.

Des violences ont éclaté contre des journalistes, des militant.es d’SOS-Racisme entré.es dans la salle pour déployer leur slogan « Non au racisme » ont été brutalisé.es. Service d’ordre musclé, nazillons nervis de Zemmour les ont violemment agressés avant que les forces de l’ordre acheminées en nombre pour protéger Zemmour ne prennent le relais. Au même moment, la manifestation des syndicats, partis et associations contre l’extrême-droite, partie de Barbès était également chargée par les forces de l’ordre, tabassages, interpellations et gardes à vue à la clé….

Ce même week-end la droite essayait de surmonter ses divisions en allant de plus en plus à droite sans pour autant y réussir puisqu’elle sort avec une candidate bicéphale, Pécresse-Ciotti, ce dernier publiquement revendiqué par Zemmour comme son ami... Si le discours de Pécresse-Ciotti peut sembler plus policé, elle aussi se bat sur le terrain de la droite extrême et de l’extrême droite et postule à diriger le bloc réactionnaire.

Quant à Macron, il postule à continuer le sale boulot au nom d’une Europe des frontières prétendant ringardiser Pécresse, Zemmour et Le Pen pour mieux servir les intérêts des classes dominantes. Il entend profiter pour son propre compte des surenchères antiouvrières, nationalistes, racistes et xénophobes, sécuritaires de Le Pen, Zemmour et Pécresse pour gagner l’électorat de droite et rallier à lui une partie de la gauche. Et il n’a pas manqué, ce dimanche, de se saisir de l’occasion des résultats du référendum imposé en Nouvelle-Calédonie malgré les demandes de report à cause de la crise sanitaire, pour se féliciter de l’imposture de la prétendue victoire du non à l’indépendance, qui réjouit tous les défenseurs du colonialisme.

Ces sinistres et inquiétants développements politiques s’inscrivent dans la continuité de l’effondrement des vieux partis institutionnels de droite et de gauche, de Sarkozy à Macron en passant par Hollande. La machine parlementaire à duper les masses est grippée tellement le décalage entre les mensonges officiels et la réalité sociale devient patent.

Au-delà de la personnalité frustrée, jalouse et haineuse de Zemmour, dont les provocations bénéficient d’une large bienveillance voire complicité y compris du gouvernement, le mouvement ouvrier n’est pas confronté à un débat idéologique mais bien à une offensive sociale et politique des classes dominantes, leur seule réponse à la menace de banqueroute, qui produit de tels petits monstres et leurs soutiens.

Rivaux et avides de pouvoir pour servir la grande bourgeoisie

Au-delà de la brutalité du discours, les Zemmour, Marine Le Pen et Pécresse tout autant que Macron postulent au pouvoir pour servir les intérêts des classes dominantes, et distillent le racisme, le nationalisme pour diviser les classes populaires, les travailleur.se.s, les désarmer, les soumettre. Macron nourrit ces préjugés avec les moyens du pouvoir et l’autoritarisme de l’État, avec la loi séparatisme, les politiques anti-migratoires... Toute sa politique prépare en fait le terrain à la droite extrême ou à l’extrême droite. Jeudi soir, dans sa conférence de presse sur la présidence de l’Union européenne qu’il assurera au 1er janvier, n’a-t-il pas mis comme priorité pour l’Europe le renforcement de ses frontières contre les « flux migratoires » et celui de sa défense ?

Leurs programmes sont interchangeables, soumis aux intérêts des multinationales et du marché mondial : attaques contre le monde du travail et les chômeurs, contre les droits sociaux, les retraites et les services publics, et cadeaux, exonérations fiscales pour le patronat qui satisfont le MEDEF et les grands groupes. Le programme économique de Zemmour s’inscrit à l’identique dans la lignée de celui de Pécresse-Ciotti et de Macron : baisse des impôts sur la production, réduction de l’impôt sur la propriété immobilière, âge de la retraite repoussé à 64 ans...

Ils défendent tous la propriété et les profits, à l’origine des inégalités croissantes, de la paupérisation du plus grand nombre, des classes populaires et des peuples confrontés à la faillite de leur système, aux catastrophes sanitaires, sociales, écologiques. Ils sont incapables de penser les réponses simples pour mettre l’économie, l’administration et les services publics au service de la majorité qui produit les richesses.

S’organiser pour construire une société de solidarité et de fraternité

Les idées de haine et de violence que sème l’offensive des classes dominantes, le nationalisme et le racisme qui divisent sont un poison pour le monde du travail. Mais parler de fascisation n’éclaire pas le débat, nous n’en sommes pas là.

Toutes les possibilités restent ouvertes contre les défenseurs du vieux monde nostalgiques de Jeanne d’Arc, Napoléon, des Versaillais, des colonies, de Pétain et De Gaulle, confondus dans le même passé de la réaction. Ils n’ont aucun avenir sauf si le monde du travail, les classes populaires, les femmes et la jeunesse abdiquent de leur propre combat pour un autre monde. Nous en sommes loin.

Finalement Zemmour et ses amis les Zouaves et autres ont pour utilité de mettre à nu le visage hideux qui se cache derrière les discours hypocrites et mensongers des serviteurs bien-pensants de la bourgeoisie.

Les faire taire, c’est faire entendre notre camp social, ses intérêts, c’est nous unir et nous organiser pour imposer des réponses à nos besoins, comme beaucoup de travailleurs avec ou sans papiers le font sur leur lieu de travail pour leurs salaires, leur pouvoir d’achat, leurs conditions de travail, pour exiger des moyens pour leur hôpital, pour la santé…

Si les médias nous inondent complaisamment avec les shows de Zemmour et les commentateurs qui reprennent les pires préjugés racistes, xénophobes et misogynes, ils rendent bien moins compte de la révolte des travailleurs, des classes populaires et de la jeunesse pourtant bien réelle, de la conscience qui grandit que ce monde en faillite nous conduit à la catastrophe et qu’il faut le changer, le réorganiser.

« Nous tisserons le linceul du vieux monde »

Ces paroles du Chant des canuts, les tisserands de Lyon qui se soulevèrent en 1831, expriment ce besoin de balayer la classe qui parasite le travail humain et produit les monstres qui postulent à la servir.

Combattre l’extrême droite et le bloc réactionnaire, c’est organiser notre camp social sur des bases de classe, en rupture avec les institutions et tous ses partis de la droite à la gauche, intégrés à l’ordre bourgeois, et discuter d’un programme pour nos luttes, qui apporte des réponses aux besoins des travailleuses et travailleurs de toutes origines, avec ou sans travail, avec ou sans papiers, pour les salaires, l’emploi, la lutte contre la pauvreté et la précarité, et tous nos besoins sociaux, écologiques et démocratiques. Un programme qui pose la question du pouvoir et s’attaque à la propriété, qui offre une perspective révolutionnaire et internationaliste à tout.e.s celles et ceux qui veulent se battre et prendre leur affaires en main pour renverser le vieux monde.

Loin de laisser croire qu’une gauche honnête et sincère, décomplexée pourrait renaître de ses ruines, nous devons opposer aux clivages parlementaires, institutionnels, les clivages de classes, le camp des travailleurs contre le camp de la bourgeoisie et œuvrer à unir le nôtre, à l’aider à se constituer en parti.

Christine Héraud

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