La campagne pour les élections Européennes du 9 juin commence dans un contexte dominé par l’accélération de la crise globale du capitalisme, l’exacerbation des rivalités économiques, commerciales, militaires et la guerre au cœur de l’Europe, en Palestine et au Moyen-Orient, en Afrique... Un capitalisme financiarisé mondialisé en faillite, au bord du krach, qui s’enfonce dans la récession et intensifie la guerre de classe pour aspirer de façon de plus en plus violente les richesses créées par les travailleur·ses du monde entier, dans un contexte de concurrence généralisée qui conduit à la généralisation de la guerre.
Les classes dominantes tentent de mettre au pas les travailleur·ses et la jeunesse, de les désarmer à grand renfort d’union nationale, de patriotisme. Elles mènent des politiques réactionnaires, xénophobes, tentant de dresser les exploité·es les un·es contre les autres. Les extrêmes-droites sont les grandes gagnantes annoncées de ce scrutin, comme de la plupart de ceux qui ont lieu cette année dans le monde, expression d’un système en décomposition, une faillite dont les conséquences sont dramatiques pour les travailleur·es et les peuples.
Mettre un coup d’arrêt aux logiques en cours, dire non à la guerre, à la militarisation, à l’offensive des classes dominantes et à l’austérité, pose avec une urgence inédite la question de la prise en main de la société par les opprimé·es et exploité·es eux-mêmes, la question du pouvoir pour réorganiser de fond en comble la façon dont l’humanité produit et échange les biens nécessaires à la vie individuelle et sociale. Le seul avenir est à la solidarité internationaliste des travailleurs pour contester la domination de la finance mondialisée, réorganiser l’économie, décider et planifier la production.
Parasitisme exacerbé, explosion des profits par dépossession du plus grand nombre
Attal, Le Maire, Vautrin ont été à l’offensive toute la semaine. Attaques contre les chômeurs au nom du « travailler tous, gagner plus, travailler mieux », coups de rabot majeurs annoncés au nom de « l’urgence » de la réduction du déficit public, un puits sans fond creusé pour arroser le capital, provocations en tout genre et invitation aux « partenaires sociaux »...
Alors que l’Insee vient d’annoncer un déficit budgétaire de 154 milliards d'euros, 18 de plus que ce que prévoyait la loi des finances, 5,5 % du PIB au lieu de 4,9 %, Le Maire a promis : « en avril, je présenterai le programme de stabilité qui réaffirmera l'objectif de réduire le déficit public à 3 % en 2027 ». Le programme c’est des milliards de coupes supplémentaires dans les budgets sociaux et les dépenses utiles à la population, non pour réduire le déficit, mais pour alimenter la chaudière des profits. En 2020, le déficit avait atteint 9 % du PIB. Le Maire n’en avait alors pas moins décrété le « quoi qu’il en coûte », ouvrant grand aux capitalistes le guichet des finances publiques pour accélérer le transfert de richesses du travail vers le capital en pleine crise Covid. Pour faire dégouliner l’« argent magique » vers les entreprises, l’Etat n’a cessé de s’endetter, assurant une rente extravagante à la finance, plus de 50 milliards d’intérêts versés cette année, plus de 74 milliards prévus en 2027 !
La propagande des classes dominantes, de leur personnel et de leurs institutions tourne à plein pour « justifier » l’austérité. Au nom de la dette et du déficit, 10 milliards ont été amputés du budget 2024 en plus des 16 milliards d’économies déjà votés. Au moins 20 de plus sont annoncés pour l’an prochain. La Cour des comptes évoque 50 milliards d'ici 2027 et l'OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques) de 70 à 80 milliards…
L’austérité brutale vise les plus pauvres : amputées les dépenses sociales, les indemnités chômage, la Sécu, les retraites, les collectivités territoriales qui ne peuvent déjà assumer les financements dont elles ont la charge, RSA, travail social, prise en charge de la dépendance, de la jeunesse, soutien aux associations, etc. Les systèmes de santé, d’éducation s’effondrent, la misère s’accroît provoquant une baisse de la consommation des ménages qui participe de la crise.
« Taper sur les riches est la solution de facilité » explique Le Maire ! Attal lui se réjouit des 50 milliards de baisses d’impôts du dernier quinquennat : « j'assume que l'on ait baissé l'impôt sur les sociétés de 33 % à 25 % pour toutes les entreprises ». Les entreprises du CAC40 assument elles les 146 milliards d’euros de bénéfices qu’elles ont engrangés en 2023, quasiment l’équivalent du déficit de l’Etat… Le Maire veut désormais transférer les cotisations sociales prélevées sur les salaires vers la TVA, cet impôt le plus injuste et inégalitaire payé par tous·tes de la même manière sur les biens de consommation ! Attal a lancé en direct à la télé une énième offensive contre l’Assurance chômage voulant baisser la durée d'indemnisation maximale de 18 à 12 mois et augmenter la période de travail pour en bénéficier. « Ça se discute » a expliqué Vautrin, ministre du travail et de la santé, invitant les syndicats au « dialogue social » ! « Nous ne sommes absolument pas prêts à négocier sur ces bases-là » a affirmé une responsable de la branche chômeurs et précaires de la CGT… Certes, mais à ce jour aucune riposte n’est envisagée par les directions syndicales, aucun plan de bataille portant la perspective d’une lutte d’ensemble du monde du travail remettant en cause la domination du capital, la folle logique économique, politique, guerrière dans laquelle il engage la société toute entière.
Pour une Europe de solidarité internationaliste des productrices et producteurs
La crise agricole et la révolte qu’elle suscite aux quatre coins de l’Europe ont posé à large échelle la nécessité de contester la soumission de l’agriculture et de toutes les activités humaines, de toute la production au diktat de la finance, des multinationales de l’agro-alimentaire, de la chimie, de la grande distribution. Elle a révélé les mensonges, l’hypocrisie des classes dominantes incapables d’apporter la moindre réponse aux drames que génère leur système. Les concessions lâchées participent au contraire de la fuite en avant telle la remise en cause ou les reports d’interdiction de pesticides et autres mesures indispensables à la santé publique, à la protection de la terre, de ses travailleur.ses, des animaux...
Par-delà les intérêts divergents, l’instrumentalisation, l’impasse protectionniste, le fait que les ouvriers agricoles soient pour l’essentiel restés en retrait, qui auraient pu donner un autre contenu à la mobilisation, la lutte pose à grande échelle la question de l’organisation de la production agricole, de sa nécessaire planification à l’échelle nationale et internationale. Elle fait écho aux luttes dans les entreprises pour les salaires, contre les licenciements, ainsi qu’à celles de la jeunesse pour un autre monde. Et elle trace en creux la perspective de la solidarité entre producteur.trices des villes et des campagnes pour décider collectivement de la production nécessaire et de son organisation à l’échelle du continent et du monde.
Construire un front des révolutionnaires internationalistes
La nouvelle période à laquelle les travailleur·ses et la jeunesse sont confrontés avec la mondialisation de la guerre, la menace de krach financier, la crise écologique, la montée des extrêmes-droites exige de regrouper nos forces, de tisser des liens d’idées, de débat et d’organisation entre toutes celles et ceux qui veulent changer le monde. Jeunes et moins jeunes qui s’éveillent à l’action politique ou y reprennent goût après avoir rompu avec les illusions institutionnelles parlementaires ou syndicales, militant·es d’AGs, de collectifs nés à travers les luttes, syndiqué·es ou non, nombreux·ses sont celles et ceux qui se sentent et se disent anticapitalistes et révolutionnaires. Beaucoup ne veulent pas choisir entre les organisations révolutionnaires existantes, méfiants des logiques de petits groupes, des rivalités et sectarismes, et cherchent des formes nouvelles d’organisation.
Le contraste n’en est que plus frappant avec la difficulté du mouvement révolutionnaire à rompre avec les routines passées et les divisions, les relations de concurrence. Des organisations qui font semblant de se suffire à elles-mêmes, telle Lutte Ouvrière qui affirmait cette semaine « la liste Lutte ouvrière, conduite par Nathalie Arthaud et Jean-Pierre Mercier, sera la seule à opposer l’internationalisme de la classe ouvrière et sa perspective révolutionnaire aux arguments nationalistes et protectionnistes des uns et des autres »… quand le NPA et le Parti des travailleurs ont eux aussi annoncé vouloir présenter une liste. Dépasser cette division, ces réflexes d’auto-affirmation qui tournent le dos aux besoins de l’heure ne peut être l’œuvre que de l’intervention consciente, volontariste des militant.es du mouvement révolutionnaire, membres ou non d’une organisation, construisant des relations de confiance et de solidarité sur la base de l’activité commune et de la bataille des idées. Une bataille que, de fait, au-delà des dites divergences et des logiques d’appareil nous mènerons ensemble, unis en premier lieu par l’hostilité de nos adversaires communs.
La campagne des européennes, en cohérence avec toute notre activité, en est l’occasion en y militant pour la construction d’un front révolutionnaire, internationaliste face à la guerre et à l’austérité, aux nationalismes, à l’offensive réactionnaire, militariste et à la mise au pas de la jeunesse et des travailleur·ses. Un front pour discuter et défendre un programme pour la transformation révolutionnaire de la société.
Isabelle Ufferte