Jeudi dernier, Castex, le Premier ministre, est intervenu au 20 heures de TF1 pour tenter de déminer l’explosion de colère que pourrait entraîner l’augmentation brutale des prix du gaz, de l’électricité et des carburants à la pompe alors que la hausse officielle de l’ensemble des prix atteint déjà 2,8 % sur l’année, et plus encore ceux de l’alimentation, les produits frais en particulier. Macron et son gouvernement se rappellent comment a débuté le mouvement des Gilets jaunes il y a trois ans et ils craignent qu’une révolte comparable s’étende aujourd’hui aux entreprises où les travailleurs subissent de plein fouet l’offensive patronale.

Castex a donc tenté de faire croire que le gouvernement allait agir pour limiter la hausse des prix de l’énergie. Il a même promis un « bouclier tarifaire », rien moins que ça, un blocage des prix du gaz d’octobre à mars ou avril 2022, un « lissage » en fait pendant la hausse envisagée, l’État comptant se rattraper sur une baisse des prix qui surviendrait ensuite. Sur le prix de l’électricité dont une augmentation de 12 % était annoncée pour février 2022, il indique qu’il limitera celle-ci à 4 % sur la période allant de février 22 à février 23 en baissant provisoirement une des taxes qui augmente son prix, la TICFE (taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité).

Autant dire qu’ils se moquent de nous ! Il n’est même pas question de baisser ou supprimer la TVA actuellement à 20 % des prix de l’énergie. Une solution simple pourtant mais le gouvernement Macron comme ses prédécesseurs ne réduisent que les impôts des plus riches et des groupes capitalistes, pas les taxes indirectes comme la TVA, particulièrement injustes parce qu’elles appliquent le même pourcentage à tout le monde, quels que soient les revenus, et pèsent lourdement sur les plus pauvres.

Rien dans ces mesures n’égratigne un tant soit peu les multinationales françaises du secteur Energie, Engie (l’ancien GDF-Suez), Total, EDF… « In fine, dit-on à Matignon d’après un article des Echos du 1er octobre, les recettes d’Engie ne sont pas affectées ». La hausse du prix du gaz de 12,6 % qui intervient ce 1er octobre n’est pas annulée alors que cette hausse, ajoutée à celles qui ont déjà eu lieu depuis le début de l’année, atteint plus de 57 %. Total qui avait déclaré il y a 5 mois qu’il verserait 7,6 milliards de dividendes en 2021, vient d’annoncer son intention de lancer d’ici à la fin de l’année un programme de rachat d’actions de 1,5 milliard de dollars, histoire d’en faire monter le cours pour le plus grand bénéfice de ses actionnaires.

Mettre un coup d’arrêt à la folie spéculative des marchés de l’énergie

Cet emballement des prix de l’énergie n’est pas une difficulté passagère franco-française. Ainsi « La Chine, explique Martine Orange dans un article publié le 1er octobre sur Médiapart[1], fait face à une véritable crise énergétique. En quelques jours, les arrêts de production, les rationnements d’électricité dans certaines villes et certaines provinces, voire des black-out imposés par le gouvernement chinois, se sont multipliés pour faire face au manque d’électricité ». Le pouvoir chinois envisage de faire redémarrer des centrales électriques à charbon qu’il avait arrêtées pour limiter les émissions de gaz carbonique. Comme l’envisagent aussi des gouvernements européens pour réduire la facture trop élevée de gaz quand ils ne se replient pas, comme en France, sur les centrales nucléaires.

En réalité, ce qui se joue sur les marchés mondiaux de l’énergie, combiné aux conséquences économiques de la pandémie -comme par exemple les ruptures d’approvisionnements en semi-conducteurs qui mettent à l’arrêt des chaînes de production comme dans l’automobile-, est d’une extrême gravité, une véritable tempête dont personne n’est encore en mesure de prévoir les effets, résultat de la libéralisation à l’échelle mondiale de l’ensemble de l’économie, et en particulier du secteur de l’énergie d’autant plus important qu’il est au cœur de la crise écologique. C’est l’expression de la faillite de la « concurrence libre et non faussée » dont tous les gouvernements ont vanté aux populations les prétendus mérites quand ils ont privatisé les monopoles publics de l’énergie, en France, EDF et GDF.

Les approvisionnements en énergie, comme en matières premières mais aussi en produits alimentaires de première nécessité, sont soumis à la rapacité des multinationales qui les contrôlent et à leurs spéculations. Et qu’importe si un chaos généralisé s’ensuit dans l’économie mondiale, chacun des acteurs des marchés financiers étant à l’affût, contre leurs semblables, de toutes les sources de profits possibles sans lesquels leur incessante activité spéculative pourrait s’effondrer.

Plus que jamais, l’urgence est à l’expropriation de ces multinationales et sociétés de finance, au changement de système, de mode de production, pour une économie qui soit propriété collective de la population, et planifiée démocratiquement à l’échelle mondiale.

Dans l’immédiat, il s’agit d’imposer la renationalisation sous le contrôle des travailleurs de tous les groupes capitalistes du secteur énergétique, gaz, électricité, pétrole, nucléaire.

Augmentation des salaires, indexation sur le coût de la vie

L’augmentation des prix de l’énergie est spectaculaire, elle réduit le pouvoir d’achat déjà en baisse. Mais il n’est pas question pour le gouvernement d’augmenter les salaires, dans la Fonction publique, ou d’exiger des patrons qu’ils le fassent dans le privé. Il l’a annoncé haut et fort en n’augmentant pas le Smic au-delà de l’obligation légale. Les dépenses incontournables représentent une partie toujours plus importante des salaires, souvent amputés par le chômage partiel, des pensions de retraites ou des minimas sociaux qui stagnent, des allocations de chômage en chute libre.

Le gouvernement a le culot de prétendre que ce n’est pas à cause des salaires trop bas que les patrons n’arrivent pas à embaucher dans les « secteurs en tension », la restauration, la logistique, l’assistance aux personnes âgées ou handicapées, etc. Il met en avant les primes, financées par l’État ou les conseils départementaux, attribuées depuis le 1er octobre aux personnels d’aide à domicile et de soins infirmiers employés dans le secteur associatif. Et Macron s’est payé le ridicule d’annoncer une « défiscalisation » des pourboires pour les serveuses et serveurs.

La réalité, ce sont les salaires très bas qui ne permettent pas de vivre correctement et même parfois de ne pas finir à la rue. La seule issue à cet appauvrissement insupportable est l’augmentation des salaires et des minimas sociaux, leur indexation automatique sur la hausse des prix et pas de revenu, quel qu’il soit, à moins de 1800 euros nets par mois.

Face au chômage, répartition du travail entre toutes et tous

Le gouvernement veut obliger les travailleurs à accepter n’importe quel emploi à n’importe quel salaire. C’est l’objectif de la réforme de l’assurance-chômage dont le 2ème volet, le calcul des allocations, vient d’entrer en application le 1er octobre. L’Unédic considère que 1,15 million de demandeurs d’emploi -4 chômeurs sur 10- verront leur Aide au Retour à l’Emploi diminuée en moyenne de 17 %.

Avec ce nouveau mode calcul, les périodes d’« inactivité » entre des contrats courts seront décomptées et diminueront d’autant les indemnités. Le gouvernement veut sanctionner, culpabiliser et accuser les chômeurs d’être les responsables de leur situation alors qu’ils ne font que subir les conséquences des politiques patronales et gouvernementales.

Le moyen d’en finir avec ce fléau, ce sont des embauches massives dans les services publics, la Santé, l’Education, les services sociaux, et la répartition du travail entre toutes et tous. Dans bien des entreprises où les directions n’ont cessé de réduire les effectifs en aggravant la charge de travail de chacun.e, il faudrait doubler les postes. Partout, il faut imposer la baisse du temps de travail sans diminution de salaire et des embauches jusqu’à résorber complètement le chômage.

Un système failli

Pendant que le nombre de pauvres dont beaucoup ont un emploi, augmente, l’argent coule à flots pour les actionnaires et les plus riches, au prix d’une exploitation accrue des travailleurs et grâce aux dizaines de milliards d’aides et de subventions accordées par l’État, le « quoi qu’il en coûte » pendant la pandémie. Ce sont 51 milliards d’euros -10 milliards de plus qu’en 2020- qui devraient être versés aux actionnaires en 2021 et les patrons du CAC40 devraient toucher chacun 5,3 millions d’euros en moyenne de rémunération sur la même période.

Les capitalistes, les grandes fortunes ne savent que faire de leur argent mais leur système risque de s’effondrer si les profits n’augmentent pas sans arrêt. Il leur faut alimenter la spéculation financière, l’avidité de leurs capitaux en richesses dont la seule origine est en fin de compte le travail humain. C’est l’expression de la faillite de leur système, du capitalisme et de sa logique infernale : il n’est capable de se survivre qu’au prix de toujours plus de régression sociale !

Face aux risques d’explosion sociale, les capitalistes et leurs serviteurs du bloc réactionnaire LREM, LR, RN et ses dérivés, cherchent à susciter des contre-feux, à propager des idées de haine, racistes, xénophobes destinées à diviser les travailleurs entre eux. Quotidiennement, sur les chaînes d’information en continu BFM, LCI et Cnews, la parole est donnée à de prétendus experts chargés de démontrer le bien-fondé des décisions gouvernementales et patronales. Un Zemmour, que le groupe Bolloré a propulsé en tant que chroniqueur vedette de sa chaîne Cnews, peut maintenant déverser sa haine de l’islam et des migrants, son mépris des travailleurs et des femmes dans tout l’espace médiatique. Sa présence dans la campagne des présidentielles « booste » ses concurrents. Le Pen revendique un référendum sur l’immigration, Bertrand et Pécresse ne sont pas en reste sur le même terrain, Philippe, l’ancien premier ministre de Macron a eu cette idée géniale de porter l’âge de la retraite à … 67 ans. Une offensive réactionnaire nourrie par le gouvernement lui-même, ses actes, ses lois discriminatoires à l’égard des musulmans et dernièrement sa décision de limiter le nombre des visas pour les personnes en provenance du Maroc et de l’Algérie.

Mettre un coup, d’arrêt à l’offensive antisociale et réactionnaire,
le 5, tous en grève et dans la rue

Le 5 octobre, les syndicats CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef appellent à une journée de grèves et de manifestations pour l’emploi et les salaires. Même si on pense qu’une journée, a fortiori sans lendemain, est bien incapable de nous permettre d’obtenir quoi que ce soit de nos revendications, nous avons tout intérêt à nous en saisir pour manifester notre révolte, discuter avec nos collègues de travail, ami.es, voisin.es de la situation, des possibilités de faire entendre nos besoins, nos droits, organiser des réunions préparatoires quand c’est possible, faire grève et manifester ensemble, rencontrer des salarié.es d’autres entreprises, d’autres secteurs, développer des liens démocratiques, de solidarité et de confiance dans la lutte collective.

Saisissons-nous de cette occasion pour populariser l’idée que tout être humain a le droit d’avoir un emploi et un salaire décent, que les seuls étrangers dans ce pays sont les responsables de la régression sociale, les capitalistes et leurs serviteurs politiciens, que leur système fondé sur la propriété capitaliste et l’accaparement de toujours plus de richesses par une minorité est failli.

C’est l’ensemble de ce système qu’il nous faut contester, l’avenir appartient à la prise en main par les travailleurs de leurs propres affaires, de l’organisation démocratique de leurs luttes, de leur contrôle sur l’ensemble de l’économie pour faire profiter toute la population des fruits du travail collectif et engager les transformations nécessaires à la préservation de l’environnement.

Galia Trépère

 

[1] Marché gazier : la tempête que personne n’avait vue venir.

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