« Lénine n’est plus, mais nous avons le léninisme. Ce qu’il y avait d’immortel dans Lénine, son enseignement, son travail, sa méthode, son exemple vit en nous, dans ce Parti qu’il a créé, dans ce premier des Etats ouvriers, à la tête duquel il s’est trouvé et qu’il a dirigé.

Nos cœurs sont frappés, en ce moment, d’une si profonde affliction parce que, tous, nous sommes les contemporains de Lénine, nous avons travaillé à côté de lui, nous avons étudié à son école. Notre Parti, c’est le léninisme en action ; notre Parti, c’est le chef collectif des travailleurs. En chacun de nous vit une parcelle de Lénine, ce qui constitue le meilleur de chacun de nous. »[1].

Ces mots prononcés par Trotsky en Gare de Tiflis, le 22 janvier 1924, au lendemain de la mort de Lénine, loin de participer au culte de la personnalité qui étouffa et liquida la pensée du « chef collectif des travailleurs » sous la pression de la dictature de la bureaucratie, donnent une mesure du génie auquel Trotsky a consacré son Lénine dans lequel est reproduit ce discours et les conditions historiques dont Lénine s’est nourri.

Dans la conclusion de son livre Moscou sous Lénine [2] Alfred Rosmer écrit en 1924 :

« La décomposition du communisme était déjà apparente quand Lénine mourut, le 21 janvier 1924. Après sa mort, elle se développa à une allure accélérée. Dans sa dernière intervention, au 4ème Congrès de l’Internationale communiste, Lénine avait mis en garde les communistes de tous les pays contre une imitation mécanique et servile des méthodes russes. Zinoviev fit de cette imitation une règle obligatoire. De plus, sous la prétention de “ bolchéviser ” les partis, il introduisit le totalitarisme dans toute la vie de l’Internationale communiste. Au moyen d’émissaires qu’il dépêchait dans les sections, il supprimait, dès avant le congrès, toute opposition. Partout où des résistances se manifestaient, les moyens les plus variés étaient employés pour les réduire ; c’était une guerre d’usure où les ouvriers étaient battus d’avance par les fonctionnaires qui, ayant tout loisir, imposaient d’interminables débats ; de guerre lasse, tous ceux qui s’étaient permis une critique et qu’on accablait du poids et de l’autorité de l’Internationale cédaient provisoirement, ou s’en allaient.

Au 5ème Congrès de l’Internationale communiste, en juillet 1924, Zinoviev, épanoui, s’écriait : “ Nous avons réalisé la “ bolchévisation ” à cent pour cent. ” Il croyait son règne assuré. Au faîte du triomphe personnel, il ne pouvait concevoir que le plus obscur des triumvirs le dominerait en l’espace de deux années et le ferait abattre d’une balle dans la nuque dix ans plus tard dans les caves de la Loubianka. C’était désormais Moscou sans Lénine ».

Staline, la bureaucratie s’emparaient du pouvoir, la contre-révolution était en route. Dans l’introduction à L’État et la révolution[3] Lénine écrivait à propos de Marx :

« Il arrive aujourd’hui à la doctrine de Marx ce qui est arrivé plus d’une fois dans l’histoire aux doctrines des penseurs révolutionnaires et des chefs des classes opprimées en lutte pour leur affranchissement. Du vivant des grands révolutionnaires, les classes d’oppresseurs les récompensent par d’incessantes persécutions ; elles accueillent leur doctrine par la fureur la plus sauvage, par la haine la plus farouche, par les campagnes les plus forcenées de mensonges et de calomnies. Après leur mort, on essaie d’en faire des icônes inoffensives, de les canoniser pour ainsi dire, d’entourer leur nom d’une certaine auréole afin de "consoler" les classes opprimées et de les mystifier ; ce faisant, on vide leur doctrine révolutionnaire de son contenu, on l’avilit et on en émousse le tranchant révolutionnaire. C’est sur cette façon d’"accommoder" le marxisme que se rejoignent aujourd’hui la bourgeoisie et les opportunistes du mouvement ouvrier. On oublie, on refoule, on altère le côté révolutionnaire de la doctrine, son âme révolutionnaire. On met au premier plan, on exalte ce qui est ou paraît être acceptable pour la bourgeoisie ».

Si cette machine à récupérer, à anesthésier le marxisme fonctionne toujours, Lénine a connu un sort particulier au sens où « les campagnes les plus forcenées de mensonges et de calomnies » ont été amplifiées après sa mort du fait d’une conjonction déroutante de deux mécanismes contradictoires. Sa pensée s’est incarnée dans une révolution bien vivante et la naissance du premier État ouvrier alors que cet État lui-même connut une contre-révolution sans pour autant être renversé par la bureaucratie stalinienne qui le parasitait et le dévorait de l’intérieur. Cette imposture s’emparant et fabriquant le mythe de Lénine fit de lui l’inspirateur de cette sanglante dictature contre le prolétariat, calomnie d’État entretenue et relayée par tous les partis staliniens dont le PCF qui marque encore l’histoire.

Cet article veut dire l’actualité, la modernité de ce riche et puissant héritage dont Trotsky et ses compagnons ont été les continuateurs, l’enseignant et le passeur pour les générations qui se sont reconnues en celui-ci. Pour beaucoup, cet héritage nous dépassait alors que le mouvement ouvrier et révolutionnaire vivait un long recul après qu’il fut « minuit dans le siècle » comme l’écrivit Victor Serge. La nouvelle période à laquelle le mouvement révolutionnaire est confronté en fait un capital, indispensable. Cet article voudrait aussi et surtout dire l’importance qu’il y a, pour toutes celles et tous ceux qui veulent changer le monde, de travailler à se l’approprier en resituant son combat comme sa pensée dans le contexte de la période révolutionnaire dont il fut le produit pour se dégager des calomnies et des caricatures, des mythes. Il voudrait aussi porter la discussion, de façon nécessairement partielle et insatisfaisante, sur des questions qui nous semblent importantes à éclaircir pour notre propre combat. Le recours aux citations, aux écrits, les références aux militants qui côtoyèrent Lénine nous ont semblé indispensable en espérant qu’il ne déroute pas le lecteur.

Une pensée fruit de trente ans d’essor du mouvement ouvrier et d’action révolutionnaire

Trotsky décrit ainsi la différence entre Marx et Lénine : « Marx se retrouve tout entier dans le Manifeste communiste, dans la préface à sa Critique, dans Le Capital. Même s’il n’avait pas fondé la Première Internationale, il serait resté à jamais tel qu’il nous apparaît aujourd’hui. Au contraire, Lénine est tout entier dans l’action révolutionnaire. Ses travaux scientifiques ne sont qu’une préparation à l’action. Même s’il n’avait publié aucun livre, il serait entré dans l’histoire tel qu’il y entre à présent, comme chef de la révolution prolétarienne et fondateur de la IIIème Internationale ». Trotsky, Lénine.

Cette unité entre la pensée et l’action a, pour celles et ceux qui comprennent le besoin de se réapproprier le contenu de « son enseignement, son travail, sa méthode, son exemple », une conséquence que peuvent faire oublier nos propres exigences d’action, le volontarisme militant, garder en tête le contexte historique, social, politique à travers lequel s’est forgé la pensée de Lénine, il y a plus d’un siècle. Et cela d’autant que l’histoire lui a joué un mauvais tour entre calomnies, dogme et caricature d’une pensée révolutionnaire devenue religion d’État, un mauvais tour que le révolutionnaire a su déjouer avec toute la force de la jeunesse…

Nous sommes confrontés à une réalité historique bien différente. La contre-révolution stalinienne a étouffé pour de longues décennies les possibilités révolutionnaires socialistes et le capitalisme a pu continuer de se développer pour étendre son emprise à toute la planète. Le capitalisme que Lénine décrivait à son époque, l’impérialisme, son stade suprême[4] , a continué à se développer à travers les guerres et les révolutions pour connaître un stade plus avancé encore, celui du capitalisme sénile, le capitalisme financiarisé mondialisé. L’étude de Lénine à laquelle Trotsky nous invitait, invitation qui garde sa pertinence, suppose une lecture libre de tout dogmatisme imprégné de l’idée que nous devons appliquer sa méthode, historique et dialectique, à un monde profondément transformé, loin des mythes et caricatures.

Faire vivre le marxisme pour penser la révolution

Lénine n’a pas été « gagné » au communisme révolutionnaire ni « recruté », sa vie, son combat, son histoire s’inscrivent dans la vie, les combats de l’essor du mouvement ouvrier et révolutionnaire en Europe et en Russie, de ses expériences, de ses défaites et de ses drames, de ses victoires et de ses ambitions à liquider le tsarisme, conquérir la démocratie et changer le monde. Il forge ses premières armes dans la polémique avec les populistes. Son frère Alexandre est pendu en 1887 pour avoir participé à un complot contre le tsar Alexandre III avec un groupe de jeunes intellectuels au sujet duquel Trotsky, dans son livre La jeunesse de Lénine[5], écrit : « Ce groupe doit être rattaché aux épigones de la Narodnaïa Volia, dont il poussa les méthodes jusqu’à l’absurde ». La même année, ayant rejoint l’université, Lénine s’engage dans la contestation étudiante et rencontre le marxisme qu’il s’est lui-même approprié passionnément à la recherche de réponses à l’impasse du populisme qu’il trouve dans l’essor du mouvement ouvrier. C’est en cherchant les voies et moyens de la libération du peuple que Lénine, profondément influencé par le roman Que faire ? de Nikolaï Tchernychevski et par Plekhanov qui avait introduit le marxisme en Russie, est devenu lui-même marxiste en engageant la polémique contre les populistes pour œuvrer à la fusion du socialisme, du marxisme avec le mouvement ouvrier naissant pour libérer le peuple de la tyrannie tsariste. Il trouvait dans le prolétariat naissant l’exécuteur moderne de l’héritage révolutionnaire des populistes.

En 1894, Lénine publie Ce que sont les « amis du peuple » et comment ils luttent contre les social-démocrates[6] où il développe la conception marxiste en l’intégrant au combat social et politique russe, en combattant les conceptions idéalistes et moralistes des populistes. En 1898, il publie Le développement du capitalisme en Russie[7] là encore pour combattre les idées des populistes en s’attachant à décrire les conditions objectives de la révolution à venir produites par le développement du capitalisme et en corollaire de la classe ouvrière. « Le rôle historique progressiste du capitalisme peut être résumé en deux mots : développement des forces productives du travail social et collectivisation de ce travail ». Toute la stratégie de Lénine est fondée sur cette idée clé tout en comprenant le caractère arriéré du capitalisme russe et la place de la paysannerie.

« Enfin, la cause essentielle des divergences qui nous opposent aux populistes est peut-être la différence qui sépare nos conceptions fondamentales des processus économiques et sociaux. Quand il étudie ces processus, le populiste en arrive généralement à des conclusions moralisatrices ; il ne considère pas les divers groupes participant à la production comme les créateurs de telle ou telle forme de vie ; il ne se propose pas de présenter l’ensemble des rapports économiques et sociaux comme le résultat des rapports existant entre ces groupes qui ont des intérêts et un rôle historique différents… »

La défense du matérialisme au sein même du parti

La défense du marxisme était pour Lénine une préoccupation première, menée de façon polémique, y compris au sein de la social-démocratie quand, après l’échec de la révolution de 1905, la répression et le recul qui s’en suivirent, se développa un courant en particulier autour de Bogdanov et de Lounatcharski remettant en cause les fondements du marxisme. Ce fut pour Lénine l’occasion d’une bataille théorique et philosophique pour conquérir l’adhésion des militants à des questions souvent restées hors des préoccupations de la plupart d’entre eux. Il publie en 1908 Matérialisme et empiriocriticisme[8]. L’ouvrage répond à l’empirisme exprimé par le physicien Ernst Mach dans son ouvrage L’analyse des sensations et reformule la conception du matérialisme dialectique de Marx et Engels à la lumière de la crise de la physique provoquée, elle, par la révolution intellectuelle de la relativité d’Einstein en 1905. Il s’oppose à l’influence de l’empiriocriticisme sur l’intelligentsia russe dont des marxistes comme Vladimir Bazarov, Alexandre Bogdanov, Anatoli Lounatcharski. Ces derniers veulent en effet réconcilier religion et marxisme pour relancer l’élan révolutionnaire de la masse, affaibli par la révolution de 1905. Ils sont ainsi liés au courant « de la construction de Dieu » qui prône un retour à la thèse de Ludwig Feuerbach selon laquelle l’homme serait Dieu. Leurs écrits suscitent une forte prégnance dans l’intelligentsia révolutionnaire russe jusqu’y compris au sein de la social-démocratie. Lénine reproche aux empiriocriticistes de « renoncer au matérialisme en recourant à une théorie de la connaissance idéaliste ».

« Nombre d’écrivains qui se réclament du marxisme ont entrepris parmi nous, cette année, une véritable campagne contre la philosophie marxiste. […] En ce qui me concerne, je suis aussi un « chercheur » en philosophie. Plus précisément : je me suis donné pour tâche, dans ces notes, de rechercher où se sont égarés les gens qui nous offrent, sous couleur de marxisme, quelque chose d’incroyablement incohérent, confus et réactionnaire ». Dans la foulée, en 1909, il publiera deux textes, De l’attitude du parti ouvrier à l’égard de la religion et L’Attitude des classes et des partis à l’égard de la religion et de l’Église. Pour lui, le combat philosophique pour le matérialisme et contre la religion est un combat de parti.

L’État et la Révolution en réponse à « l’avilissement du marxisme par les opportunistes »[9]

Son souci de confronter les raisonnements avec les acquis théoriques du marxisme est constant et toujours en relation avec la lutte d’idées, la polémique avec les autres courants. Rédigé dans la clandestinité et dans l’urgence en août 1917, au lendemain du tournant que représente les journées de juillet dans la révolution, tournant qui annonce octobre, la prise du pouvoir, L’État et la Révolution est un texte où Lénine affirme ses positions et ses accords avec Marx et Engels contre les opportunistes social-démocrate ou anarchistes, bases théoriques qui seront sa boussole dans les mois qui viennent. « La lutte pour soustraire les masses laborieuses à l’influence de la bourgeoisie en général, et de la bourgeoisie impérialiste en particulier, est impossible sans une lutte contre les préjugés opportunistes à l’égard de l’"Etat" ».

Il reprend à son compte « […] l’idée fondamentale du marxisme sur le rôle historique et la signification de l’Etat. L’Etat est le produit et la manifestation de ce fait que les contradictions de classes sont inconciliables. L’Etat surgit là, au moment et dans la mesure où, objectivement, les contradictions de classes ne peuvent être conciliées. Et inversement : l’existence de l’Etat prouve que les contradictions de classes sont inconciliables ».

Et il fait sienne cette citation d’Engels tirée de L’origine de la famille, de l’État et de la propriété privée :

« L’Etat n’existe donc pas de toute éternité. Il y a eu des sociétés qui se sont tirées d’affaire sans lui, qui n’avaient aucune idée de l’Etat et du pouvoir d’Etat. A un certain stade du développement économique, qui était nécessairement lié à la division de la société en classes, cette division fit de l’Etat une nécessité. Nous nous rapprochons maintenant à pas rapide d’un stade de développement de la production dans lequel l’existence de ces classes a non seulement cessé d’être une nécessité, mais devient un obstacle positif à la production. Ces classes tomberont aussi inévitablement qu’elles ont surgi autrefois. L’Etat tombe inévitablement avec elles. La société, qui réorganisera la production sur la base d’une association libre et égalitaire des producteurs, reléguera toute la machine de l’Etat là où sera dorénavant sa place : au musée des antiquités, à côté du rouet et de la hache de bronze ».

Sa lutte contre l’opportunisme est une lutte politique à travers laquelle lui-même construit ses propres bases théoriques en actualisant le marxisme et en faisant ses propres armes, sa propre pensée. A la veille d’engager la lutte pour la conquête du pouvoir par les soviets, il inscrit la bataille pour la construction « d’un Etat commune » dans la perspective du communisme, de l’extinction de l’État.

L’État commune

« Il n’y a pas un grain d’utopisme chez Marx ; il n’invente pas, il n’imagine pas de toutes pièces une société "nouvelle". Non, il étudie, comme un processus d’histoire naturelle, la naissance de la nouvelle société à partir de l’ancienne, les formes de transition de celle-ci à celle-là. Il prend l’expérience concrète du mouvement prolétarien de masse et s’efforce d’en tirer des leçons pratiques. Il "se met à l’école" de la Commune, de même que tous les grands penseurs révolutionnaires n’hésitèrent pas à se mettre à l’école des grands mouvements de la classe opprimée, sans jamais les aborder du point de vue d’une "morale" pédantesque (comme Plékhanov disant : "Il ne fallait pas prendre les armes", ou Tsérétéli : "Une classe doit savoir borner elle-même ses aspirations") ».

« La Commune est la forme, "enfin trouvée" par la révolution prolétarienne, qui permet de réaliser l’émancipation économique du Travail ».

Aux opportunistes Lénine oppose la formule d’Engels dans son introduction pour le 20ème anniversaire de la Commune de Paris à l’ouvrage de Marx, La guerre civile en France[10] le 18 mars 1891 : « Le philistin social-démocrate a été récemment saisi d’une terreur salutaire en entendant prononcer le mot de dictature du prolétariat. Eh bien, messieurs, voulez-vous savoir de quoi cette dictature a l’air ? Regardez la Commune de Paris. C’était la dictature du prolétariat ».

La lutte de classe pour la conquête de la démocratie et la dictature du prolétariat

« Limiter le marxisme à la doctrine de la lutte des classes, c’est le tronquer, le déformer, le réduire à ce qui est acceptable pour la bourgeoisie. Celui-là seul est un marxiste qui étend la reconnaissance de la lutte des classes jusqu’à la reconnaissance de la dictature du prolétariat. C’est ce qui distingue foncièrement le marxiste du vulgaire petit (et aussi du grand) bourgeois. C’est avec cette pierre de touche qu’il faut éprouver la compréhension et la reconnaissance effectives du marxisme » écrit Lénine dans L’Etat et révolution.

Dans la continuité de Marx et d’Engels, pour lui, la dictature du prolétariat, c’est la démocratie pour le plus grand nombre, la démocratie jusqu’au bout dans la continuité de la révolution française, à un niveau bien supérieur.

« Développer la démocratie jusqu’au bout, rechercher les formes de ce développement, les mettre à l’épreuve de la pratique, telle est pourtant l’une des tâches essentielles de la lutte pour la révolution sociale. Pris à part, aucun démocratisme, quel qu’il soit, ne donnera le socialisme : mais dans la vie, le démocratisme ne sera jamais pris à part. Il sera pris dans l’ensemble. Il exercera aussi une influence sur l’économie dont il stimulera la transformation ».

« Démocratie pour l’immense majorité du peuple et répression par la force, c’est-à-dire exclusion de la démocratie pour les exploiteurs, les oppresseurs du peuple ; telle est la modification que subit la démocratie lors de la transition du capitalisme au communisme. »

Le génie de Lénine est d’avoir osé penser et mettre en œuvre une politique en vue de la réalisation concrète et pratique de ces principes du marxisme, en rien une utopie pour les discours du dimanche. Il a été l’indispensable cerveau de sa première réalisation, la révolution russe d’octobre 17, ces dix jours qui bouleversèrent le monde et la fondation de la Troisième internationale pour œuvrer à la révolution en Europe et en Orient, à la révolution mondiale.

« L’internationalisme de Lénine [...] une formule d’action révolutionnaire étendue à tous les peuples »

« L’internationalisme de Lénine, loin d’être une conciliation purement verbale entre l’esprit national et l’esprit international, est une formule d’action révolutionnaire étendue à tous les peuples. Le territoire mondial occupé par ce que l’on appelle l’humanité civilisée est considéré comme un immense et unique champ de bataille sur lequel manœuvrent les peuples et les classes. Pas une seule des grandes questions humaines ne doit se resserrer dans un cadre national. Des fils visibles ou invisibles établissent un lien efficace entre le fait qui peut sembler national et des dizaines d’autres faits qui se produisent sur tous les points du globe. Dans les appréciations qu’il donne sur les forces et les facteurs de la vie internationale, Lénine est plus exempt que quiconque de toute partialité nationale » explique Trostky dans son Lénine pour souligner que notre internationalisme n’est pas cette « conciliation purement verbale » mais bien l’intégration de la réalité mondiale de la lutte de classe, des connections multiples qui la conditionnent et donc qui conditionnent aussi la politique du prolétariat et de son parti. Il poursuit, « Non, l’internationalisme de Lénine n’a pas besoin d’être démontré. Mais en même temps, Lénine lui-même est profondément national. Il a ses racines dans la nouvelle histoire de la Russie ; il concentre cette histoire en lui-même ; il lui donne sa plus haute “ pression et c’est précisément par là qu’il atteint les sommets de l’action internationale et de l’influence mondiale ». Il est lui-même produit et acteur de cette combinaison de différents facteurs à travers les luttes de classe et c’est bien cette combinaison qui le façonne. « A première vue, il peut sembler bien surprenant que l’on caractérise Lénine par son côté “ national ”, mais en somme, cela devrait aller de soi. Pour diriger une révolution inouïe dans l’histoire des peuples, le bouleversement par lequel passe la Russie, il faut évidemment qu’il existe entre le chef et les forces profondes de la vie populaire un lien indissoluble, organique, touchant aux racines les plus profondes ». Ces racines sont la vie même de Lénine à travers l’influence des Narodniki et sa lutte pour s’approprier et faire vivre le marxisme sur le sol russe à travers le développement tumultueux du jeune prolétariat russe. « En Lénine s’incarne le prolétariat russe - une classe toute jeune qui, politiquement parlant, n’est guère plus âgée que Lénine lui-même ; mais une classe profondément nationale, car en elle se résume toute l’évolution précédente de la Russie, en elle est tout l’avenir du pays, avec elle vit et se transforme la nation russe. L’indépendance à l’égard de toute routine, de l’hypocrisie et des formules conventionnelles, la hardiesse de la pensée, l’audace dans l’action, audace qui ne devient jamais téméraire, voilà ce qui caractérise le prolétariat russe et Lénine en même temps ».[11]

L’arène mondiale de la lutte ou L’impérialisme, Stade suprême du capitalisme[12]

Cet internationalisme repose sur les réalités objectives du développement des moyens de production et des rapports capitalistes, du développement même du prolétariat. C’est de ce point de vue que Lénine écrit L’impérialisme en 1916 alors que se déchaîne la barbarie de la première guerre mondiale impérialiste. Cette brochure est sûrement celle qui a eu le plus d’influence de par les luttes d’émancipation des peuples coloniaux. Et aussi des compréhensions diverses conséquences du dogmatisme qui a figé la pensée de Lénine, instrumentalisée par le stalinisme puis les luttes de libération nationale se revendiquant du communisme, les deux la vidant de sa dimension fondamentale, internationaliste et révolutionnaire, prolétarienne et socialiste. Le terme impérialisme a pris un sens équivalent à celui de capitalisme au prix d’une grande incompréhension, résumée dans la notion d’anti-impérialisme, formule passe partout qui a contribué à atténuer voire effacer le clivage de classe pour légitimer les mille formes de campisme. Cette notion s’est figée, fossilisée perdant tout contenu historique, paralysant toute compréhension de la nouvelle époque que nous connaissons, le stade du capitalisme financiarisé et mondialisé, stade sénile du capitalisme et des nouvelles possibilités révolutionnaires qui ont mûri en son sein.

« L’impérialisme a surgi, écrivait Lénine, comme le développement et la continuation directe des propriétés essentielles du capitalisme en général. Mais le capitalisme n’est devenu l’impérialisme capitaliste qu’à un degré défini, très élevé, de son développement, quand certaines des caractéristiques fondamentales du capitalisme ont commencé à se transformer en leurs contraires, quand se sont formés et pleinement révélés les traits d’une époque de transition du capitalisme à un régime économique et social supérieur ». Il nous faut poursuivre le raisonnement à l’époque que nous vivons en reprenant la méthode historique et dialectique de Lénine. Comprendre l’évolution du capitalisme depuis la fin des guerres coloniales et l’effondrement de l’URSS nécessite de s’approprier la méthode de Lénine, celle du marxisme, pour comprendre à la fois pourquoi cette « époque de transition » a rapidement avorté du monstre stalinien et du le fascisme, la deuxième guerre mondiale puis les guerres coloniales avant de déboucher sur une nouvelle phase de développement du capitalisme. Cette dernière accentue tous les traits de l’impérialisme tout en accomplissant le triomphe du capitalisme à l’échelle planétaire. Elle l’enferme dans ses limites historiques et géographiques et ouvre une nouvelle « époque de transition du capitalisme à un régime économique et social supérieur ».

Un parti, une Internationale, inscrits dans le développement même de la société, de la lutte de classe

Le parti bolchévik et la Troisième Internationale dont Lénine a été le fondateur ne sont pas le produit d’une conception toute faite, de principes dogmatiques mis en œuvre par la volonté inflexible du chef. Ils sont le produit d’un développement historique du capitalisme lui-même et du prolétariat, la classe porteuse de l’avenir socialiste de l’humanité. Le génie de Lénine a été d’appliquer la méthode du marxisme pour en comprendre les mécanismes, les rouages, en anticiper les développements tout en enrichissant la théorie de Marx et Engels. En réponse à la courbe du développement du capitalisme, il a décrypté, compris la courbe du développement du prolétariat et du socialisme pour jouer un rôle décisif dans sa première victoire qui a jeté les bases du premier Etat ouvrier.

« La Révolution d’octobre, écrit Trotsky en conclusion de son Histoire de la révolution russe[13], a jeté les bases d’une nouvelle culture conçue pour servir à tous, et c’est précisément pourquoi elle a pris tout de suite une importance internationale. Même si, par l’effet de circonstances défavorables et sous les coups de l’ennemi, le régime soviétique - admettons-le pour une minute - se trouvait provisoirement renversé, l’ineffaçable marque de l’insurrection d’octobre resterait tout de même sur toute l’évolution ultérieure de l’humanité.

Le langage des nations civilisées a nettement marqué deux époques dans le développement de la Russie. Si la culture instituée par la noblesse a introduit dans le langage universel des barbarismes tels que tsar, pogrom, nagaïka, Octobre a internationalisé des mots comme bolchevik, soviet et piatiletka. Cela suffit à justifier la Révolution Prolétarienne, si d’ailleurs on estime qu’elle ait besoin de justification ».

Cette culture s’est élaborée à travers l’histoire du développement humain dans sa lutte pour la prise de conscience de lui-même et de la nature, de la matière et de l’univers, culture qui plonge ses racines dans l’évolution économique et sociale et les luttes d’émancipation qu’elle engendre.

« L’exemple russe montre à tous les pays quelque chose de tout à fait essentiel, de leur inévitable et prochain avenir » écrit Lénine dans La maladie infantile du communisme.

De la lutte contre « l’économisme » au mythe de Que Faire ?

La victoire de la contre-révolution stalinienne a momifié non seulement Lénine dans son mausolée mais ses idées elles-mêmes, transformées en mythes, vidées de toute portée révolutionnaire. En réponse au recul du mouvement ouvrier étouffé par la chape stalinienne, la nécessité de tenir, de préserver la doctrine marxiste et léniniste face aux calomnies et caricatures tant staliniennes que des forces de libération nationale ont nourri au sein du mouvement trotskyste les comportements et raisonnements doctrinaires qui ont eux-mêmes engendré le sectarisme et les divisions, le morcellement du mouvement trotskyste en de multiples tendances, processus destructeur dont la dernière scission au sein du NPA est une illustration.

A défaut d’avoir prise sur les événements, les échecs ou les impuissances ont été renvoyés à des questions de doctrines, d’interprétation des dogmes, chacun inventant sa recette, oscillant entre opportunisme et sectarisme.

Une brochure, certainement la plus célèbre, écrite par Lénine en 1902, Que faire ?, a sans doute été la plus caricaturée et vidée de l’essentiel de son contenu politique pour la résumer à une idée qui n’y est par ailleurs pas explicitement exposée, le centralisme démocratique, ou le bréviaire du parti dit de type bolchevique.

En réalité, Que faire ? est d’abord et avant tout un pamphlet politique contre l’opportunisme de Berstein pour qui « Le mouvement est tout, le but n’est rien » et sa variante russe, l’économisme pour discuter des tâches pratiques et organisationnelles du parti en fondation. Lénine critique ces courants pour faire de la propagande et de l’agitation politique le travail essentiel du parti autour du « fil à plomb » d’un journal national tout en se donnant les moyens pratiques, militants de réaliser ces objectifs face à la répression tsariste, la sélection de militants professionnels pour constituer un pôle révolutionnaire au sein d’un parti ouvrier large et ouvert.

« L’exposé de mes vues sur le caractère et le contenu de l’agitation politique revient à expliquer la différence entre politique trade-unioniste et politique social-démocrate, et l’exposé de mes vues sur les tâches d’organisation, revient à expliquer la différence entre les méthodes de travail artisanales qui satisfont les économistes, et l’organisation des révolutionnaires que nous considérons comme indispensable ».[14]

D’abord un pamphlet contre la remise en cause du marxisme par les Bersteiniens selon lesquels, dit Lénine, « La social-démocratie doit se transformer de parti de révolution sociale en parti démocratique de réformes sociales ».

Puis ensuite contre ceux qui tentaient « de justifier théoriquement leur soumission servile au spontané, leur culte du spontané. Il est temps de faire le bilan de cette tendance, très inexactement caractérisée par le terme d’"économisme", trop étroit pour en exprimer le contenu ».

Polémique qui déboucha sur la différence entre « trade-unionisme et politique social-démocrate ».

« Notre “activité” à nous autres ouvriers, activité que vous vous obstinez à vouloir soutenir en lançant des revendications concrètes qui promettent des résultats tangibles, existe déjà chez nous ; et dans notre action professionnelle ordinaire, de tous les jours, nous présentons nous-mêmes ces revendications concrètes, la plupart du temps sans aucune aide des intellectuels. Mais cette activité ne nous suffit pas ; nous ne sommes pas des enfants que l’on peut nourrir avec la bouillie de la seule politique “économique” ; nous voulons savoir tout ce que savent les autres, nous voulons connaître en détail tous les côtés de la vie politique et participer activement à chaque événement politique. Pour cela il faut que les intellectuels nous répètent un peu moins ce que nous savons bien nous-mêmes, et qu’ils nous donnent un peu plus de ce que nous ignorons encore, de ce que notre expérience “économique”, à l’usine, ne nous apprendra jamais, les connaissances politiques. Ces connaissances, vous pouvez les acquérir, vous autres intellectuels, et il est de votre devoir de nous les fournir en quantité cent et mille fois plus grande que vous ne l’avez fait jusqu’ici, non pas de nous les fournir seulement sous forme de raisonnements, brochures et articles (auxquels il arrive souvent d’être - pardonnez-nous notre franchise ! - un peu ennuyeux), mais absolument sous forme de révélations vivantes sur ce que notre gouvernement et nos classes dominantes font précisément à l’heure actuelle dans tous les domaines de la vie ».

L’indissoluble lien entre démocratie et discipline

La discussion autour de Que faire ? et sa caricature ont dénaturé la conception de la démocratie de Lénine d’autant que tout au long de son histoire le mouvement révolutionnaire a été contraint de s’adapter à la répression, ce qui implique nécessairement des limites à la démocratie. Il est de ce point de vue particulièrement choquant de voir aujourd’hui des fractions trotskystes censurer la démocratie au nom de la clandestinité ! Lénine avait une tout autre conception : « Qu’est-ce qui cimente la discipline du parti révolutionnaire du prolétariat ? qu’est-ce qui la contrôle ? Qu’est-ce qui l’étaye ? C’est, d’abord, la conscience de l’avant-garde prolétarienne et son dévouement à la révolution, sa fermeté, son esprit de sacrifice, son héroïsme. C’est, ensuite, son aptitude à se lier, à se rapprocher et, si vous voulez, à se fondre jusqu’à un certain point avec la masse la plus large des travailleurs, au premier chef avec la masse prolétarienne, mais aussi la masse des travailleurs non prolétarienne. Troisièmement, c’est la justesse de la direction politique réalisée par cette avant-garde, la justesse de sa stratégie et de sa tactique politiques, à condition que les plus grandes masses se convainquent de cette justesse par leur propre expérience. A défaut de ces conditions, dans un parti révolutionnaire réellement capable d’être le parti de la classe d’avant-garde appelée à renverser la bourgeoisie et à transformer la société, la discipline est irréalisable. Ces conditions faisant défaut, toute tentative de créer cette discipline se réduit inéluctablement à des phrases creuses, à des mots, à des simagrées. Mais, d’autre part, ces conditions ne peuvent pas surgir d’emblée. Elles ne s’élaborent qu’au prix d’un long travail, d’une dure expérience ; leur élaboration est facilitée par une théorie révolutionnaire juste qui n’est pas un dogme, et qui ne se forme définitivement qu’en liaison étroite avec la pratique d’un mouvement réellement massif et réellement révolutionnaire. Si le bolchevisme a pu élaborer et réaliser avec succès, de 1917-1920, dans des conditions incroyablement difficiles, la plus rigoureuse centralisation et une discipline de fer, la cause en est purement et simplement dans plusieurs particularités historiques de la Russie. »[15]

Ces particularités historiques que décrit Lénine comme les « Principales étapes de l’histoire du bolchevisme » dans La maladie infantile du communisme ne sont pas celle du mouvement ouvrier ici, aujourd’hui, c’est une évidence. Pas plus que « les conditions » tant de la démocratie que de la discipline aussi nécessaire l’une à l’autre, indissociables l’une de l’autre. De nouvelles conditions se sont formées à travers l’histoire et l’histoire du mouvement révolutionnaire lui-même, ce sont elles qu’il nous faut explorer à la lumière de l’expérience collective.

Notre maladie infantile, auto-proclamation, dogmatisme et divisions sectaires

L’ensemble des raisonnements de Lénine concernent une réalité politique, sociale, un niveau de tension de lutte de classe dont nous sommes loin aujourd’hui. La première condition pour nous approprier son apport complété par Trotsky dans la lutte contre la dégénérescence stalinienne de la révolution, le fascisme et la deuxième guerre mondiale est d’en prendre pleinement conscience pour éviter de nous aveugler, de nous bluffer par des copier/coller, de nous revendiquer d’un centralisme démocratique fort peu révolutionnaire ou de nous satisfaire d’auto-proclamations communistes révolutionnaires, qui sont le propre de toutes les fractions trotskystes.

La première tâche pour les militant·es révolutionnaires issu·es de l’histoire ou de la décomposition du mouvement trotskyste en de multiples tendances est d’analyser leur propre situation concrète pour discuter des moyens de la surmonter.

Il est difficile de qualifier autrement que de sectes des fractions qui recrutent sur leur « propres bases », au nom du même communisme révolutionnaire, sans que personne ne soit en mesure de comprendre leurs divergences qui pourraient justifier leurs rivalités ou même leur existence séparée, qui imposent en leur propre sein un centralisme fort peu démocratique, ne tolèrent ni tendances ni fractions et confondent leurs intérêts de petits appareils avec les intérêts historiques du prolétariat !

Notre propos n’est pas de dévaloriser l’activité militante de qui que ce soit, bien au contraire notre propos est de dénoncer le gaspillage de forces, de compétences qui rend le mouvement révolutionnaire incapable de répondre aux besoins des évolutions du mouvement ouvrier confronté à la nouvelle période de développement du capitalisme.

Le propos de cet article, loin de prétendre à une exégèse de la pensée de Lénine, voudrait inciter à nous confronter à elle, à ses raisonnements, sa méthode, ses enseignements en pleine lucidité sur le fait que nous vivons une époque radicalement différente de celle de la formation de l’impérialisme pour nous appliquer à nous-mêmes la méthode marxiste, le matérialisme historique qu’Engels appelait « le socialisme scientifique ». Comme toute science, le marxisme évolue, s’enrichit de l’expérience des progrès de l’ensemble de l’humanité, des autres sciences et des techniques. Marx, Lénine, Trotsky représentent des jalons déterminants dans cette évolution, dans ce que Lénine appelait « Les destinées historiques de la doctrine de Karl Marx »[16], destinées qui se sont heurtées à une violente réaction et ont connu un profond recul qui s’exprime dans l’éclatement du mouvement révolutionnaire à travers des divisions sectaires qui se justifient à leurs propres yeux par le besoin de se protéger des pressions hostiles.

Reprendre en main ces destinées, nous approprier collectivement les enseignements de Lénine, sa méthode passe par une étape incontournable, liquider ce passé de divisions sectaires pour construire notre propre unité de pensée et d’action à travers un processus de rassemblement des forces révolutionnaires. Un choix politique qui incombe à l’ensemble des militant.es du mouvement révolutionnaire quelle que soit sa tendance ou fraction, son courant, qu’il ou elle soit organisé·e ou pas.

Victor Serge écrivait en mars-avril 1924, dans son livre Lénine 1917 17[17]« aucune dissociation, chez Lénine, de l’action et de la pensée. Aucune déformation professionnelle de l’intellectuel. Jamais de spéculation dans l’abstrait. Harmonie totale de l’intelligence et de la volonté.[...] Lénine est un bloc. L’unité de sa personnalité a quelque chose de terrible. Sa puissance a certainement été, dans une large mesure, la puissance de l’unité ». Cette unité est l’incarnation militante de l’unité et de la continuité d’une politique de classe en rupture pleine et entière avec l’ordre bourgeois. Elle trouvera de façon dramatique sa négation dans la caricature de la dictature stalinienne qui, associée à la faillite de la social-démocratie, désarme et étouffe le mouvement ouvrier, vide le marxisme de tout contenu démocratique et révolutionnaire, pour trouver ensemble leur place dans les institutions de la bourgeoisie. Reconquérir, construire cette unité de classe passe nécessairement par la pratique militante, la volonté de construire l’unité vivante et démocratique du mouvement révolutionnaire à travers une compréhension commune de la période et des tâches, reconstruire collectivement notre continuité historique.

Yvan Lemaitre

[1] https://www.marxists.org/francais/trotsky/oeuvres/1924/04/lt1924042100n.htm

[2] https://www.marxists.org/francais/rosmer/works/msl/msl2401.htm

[3] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/08/er00t.htm

[4] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp.htm

[5] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1894/04/vil18940400a.htm

[6] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1894/04/vil18940400a.htm

[7] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1899/dcr/ch8/vil18990000c806.htm

[8] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1908/09/index.htm

[9] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1917/08/er00t.htm

[10] https://www.marxists.org/francais/engels/works/1891/03/fe18910318.htm

[11] https://www.marxists.org/francais/trotsky/oeuvres/1924/04/lt1924042100n.htm

[12] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1916/vlimperi/vlimp10.htm

[13] https://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/hrrusse/hrrsomm.htm

[14] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1902/02/19020200a.htm

[15] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1920/04/g2.htm

[16] https://www.marxists.org/francais/lenin/works/1913/03/vil19130301.htm

[17] https://www.marxists.org/francais/serge/works/1924/06/index.htm

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