De la Révolution russe de Février à celle d’Octobre, huit mois de batailles sociales et politiques, d’accumulation de forces révolutionnaires, de déchainement de la réaction, marqués par plusieurs crises majeures, dont les journées des 20-21 avril, 10-18 juin et 3-4 juillet, ont transformé profondément la conscience de la classe ouvrière. Mais quand éclate en avril la première grande crise politique après la Révolution de Février, bien peu nombreux sont ceux qui voient dans le double pouvoir du Gouvernement provisoire et des Soviets, le début d’une opposition à mort entre le régime bourgeois et l’embryon d’un pouvoir ouvrier.
A travers ces crises, la classe ouvrière a tiré les leçons de ses propres expériences pour se libérer de l’union nationale républicaine et conquérir son indépendance de classe, mesurer ses forces face à la bourgeoisie, construire l’unité des classes populaires contre le gouvernement et l’Etat, comprendre que face à l’Etat, il n’y aurait pas de conciliation possible.
A travers ces ruptures, elle s'est préparée à la conquête du pouvoir.
Dans un texte écrit en juillet 1917, Trois crises, Lénine insiste sur l’importance d’« examiner l'enchaînement historique des événements et la signification politique, c'est-à-dire la signification de classe des péripéties actuelles de la révolution. » Dégager de chaque étape de la révolution sa « signification de classe », comprendre comment les rapports entre le prolétariat et la bourgeoisie se transforment au cours de la lutte de classe, pour agir en leur sein et préparer les suivantes.
Trotsky raconte dans son Histoire de la Révolution russe que Lénine disait et écrivait souvent qu’il faut « expliquer patiemment » ... et faire confiance au mécontentement grandissant des masses, à leur apprentissage politique. Cela s’applique aussi au parti bolchévik qui s’est profondément transformé à travers ces trois crises. Les caricatures le présentent comme un parti entièrement sous la férule de Lénine ; ou comme un parti « tout fait » qui aurait conduit sans faille le prolétariat... Absurdités qui effacent les transformations dont il a dû être capable, les crises qu’il a dû surmonter pour mettre en œuvre une véritable stratégie pour la prise du pouvoir et en devenir l’outil, un dépassement dont il aurait été incapable sans ses liens profonds avec la classe ouvrière. Pour cela, les militants ont dû donner un contenu politique concret à l’indépendance de classe, à la rupture politique et morale avec la bourgeoisie, dépasser les proclamations révolutionnaires pour définir une politique pratique, être le parti de la prise du pouvoir par les travailleurs eux-mêmes.
Avril, de l’union nationale à la rupture
La Révolution de Février renverse le régime tsariste et installe un gouvernement bourgeois. « Pourquoi n’a-t-on pas pris le pouvoir ? … La puissance matérielle est dans les mains du prolétariat, mais la bourgeoisie s’est trouvée là, consciente et préparée. […] on n’a pas pris le pouvoir parce qu’on n’était ni organisés, ni conscients », explique alors Lénine.
La révolution, par la grève générale et l’insurrection, était bien l’œuvre des classes populaires et principalement de la classe ouvrière des grandes villes, mais elles laissent les partis bourgeois constituer un Gouvernement provisoire attendant de lui qu’il réponde à leurs revendications, « la paix, le pain, la terre »… à la tête d’un Etat qui restait celui des classes dominantes, aristocratie et grande bourgeoisie, poursuivant la guerre impérialiste, servant à faire prospérer les affaires des capitalistes.
Mais les classes populaires constituent aussi des conseils d’usines, des soviets de villes, de régions, des assemblées démocratiques pour confier à leurs représentants fréquemment élus, un pouvoir de décision de plus en plus important, réduisant d’autant le pouvoir du Gouvernement provisoire. Ce double pouvoir qui se met en place contient dès le mois de Février, l’opposition entre les intérêts bourgeois et les intérêts ouvriers, sous la forme d’une conciliation instable. Les partis ouvriers majoritaires dans les soviets à ce moment-là, les socialistes-révolutionnaires et les menchéviks, défendent la conciliation entre les deux pouvoirs, satisfaits de la révolution démocratique qui vient d’avoir lieu.
Cette union nationale s’exprime notamment au mois de mars et à la mi-avril, dans de grandes manifestations, en défense de la révolution, pour les morts de la guerre, réunissant des pacifistes aux patriotes, des ouvriers aux bourgeois.
La direction du parti bolchévik, en l’absence de Lénine exilé depuis des années, repose à Pétrograd essentiellement sur Kamenev. Elle ne rompt pas avec cette confusion. Trotsky décrit que « le premier mois de la révolution avait été, pour le bolchévisme, un temps de désarroi et de tergiversations. » « Ils agissaient non pas en tant que représentants d’un parti prolétarien qui se prépare à ouvrir de son propre chef la lutte pour le pouvoir, mais comme l’aile gauche de la démocratie qui, en proclamant ses principes, se dispose, pour une durée indéterminée, à jouer le rôle d’une opposition loyale » (Histoire de la Révolution russe).
Dans cette direction, personne ne pense que la révolution peut conduire vers une autre étape, socialiste. Pour elle, « la tâche essentielle est d’instituer un régime républicain démocratique ». Staline va même jusqu’à théoriser une division du travail entre d’un côté les soviets qui font avancer la révolution, et de l’autre le gouvernement bourgeois qui en consoliderait les acquis !
Pour sortir de cette confusion, il fallait être capable de voir dans les affrontements au sein de cette première phase de la révolution, les éléments qui donneraient pleinement corps à une deuxième phase, l’affrontement entre la bourgeoisie et le prolétariat. Il avait déjà commencé dans les usines et les régiments, mais pour y voir sa « signification de classe », un pas vers une nouvelle révolution prolétarienne… il fallait avoir clairement cet objectif.
Lénine, en exil, préparait cet objectif. Dès le mois de mars, par des courriers, il appelle les dirigeants bolchéviks à retrouver leur indépendance politique : « Notre tactique : complète défiance, aucun soutien au nouveau gouvernement ; ... armement du prolétariat - seule garantie ». A la recherche du chemin vers le pouvoir des travailleurs, il voit dans les soviets, les grèves, et les manifestations armées, les éléments qui y conduisent : « les ouvriers de Russie sont entrés dans cette voie dès la première étape de la première révolution, en février-mars 1917. Le tout maintenant est de bien comprendre ce qu'est cette voie nouvelle et de continuer à la suivre avec hardiesse, fermeté et ténacité. […] Le prolétariat, s'il veut conquérir la paix, le pain et la liberté, doit démolir cette machine d'Etat «toute prête» et la remplacer par une autre, en fusionnant la police, l'armée et le corps des fonctionnaires avec l'ensemble du peuple en armes […] tous les éléments pauvres et exploités de la population, afin qu'eux-mêmes prennent directement en main les organes du pouvoir d'Etat et forment eux-mêmes les institutions de ce pouvoir. » (Lettres de loin).
Quand Lénine réussit à rejoindre la Russie début avril, il défend les Thèses d’avril qui prolongent cette même stratégie. Il est isolé et combattu dans la direction du parti qui reste sur sa position d’opposition de gauche au Gouvernement provisoire et au Comité exécutif du soviet, voulant limiter le rôle du prolétariat à celui d’une force d’appoint de la révolution bourgeoise qu’ils pensent indépassable.
La crise est profonde et publique entre ces deux lignes inconciliables, qui renvoient à des années de divergences au sein de la social-démocratie russe sur la question de la révolution.
Avec les Thèses d’avril, Lénine reprend à son compte la théorie de la révolution permanente formulée par Trotsky en 1905 : en Russie, vu l’arriération de la bourgeoisie, le prolétariat sera la force principale de la révolution démocratique bourgeoise, entrainant derrière lui la paysannerie pauvre, et il engagera dans le même temps, le début d’une révolution socialiste, par des mesures contre la propriété privée et contre l’Etat bourgeois, une révolution qui ne pourra atteindre pleinement son objectif que si elle s’étend aux autres pays d’Europe plus avancés. C’est bien ce qui est en train de se passer et que formule Lénine : « Ce qu'il y a d'original dans la situation actuelle en Russie, c'est la transition de la première étape de la révolution, qui a donné le pouvoir à la bourgeoisie par suite du degré insuffisant de conscience et d'organisation du prolétariat, à sa deuxième étape, qui doit donner le pouvoir au prolétariat et aux couches pauvres de la paysannerie » (Thèses d’avril).
La lutte de classes transforme les consciences : aucune des revendications ouvrières ne trouve de réponse, à commencer par l’arrêt de la guerre. La colère s’accumule. Des régiments commencent à dire « quand aura-t-on la paix ? quand arrêtera-t-on d’être envoyés au front ? » Le gouvernement bourgeois répond par des déclarations d’atermoiement hypocrites, et le Comité exécutif du soviet n’a rien à redire.
Ces contradictions brisent l’union nationale à la fin avril. Des déclarations ministérielles favorables à la guerre provoquent des manifestations spontanées, les 20 et 21 avril. Les bolchéviks organisent la manifestation du 21 et avancent le mot d’ordre « Tout le pouvoir aux soviets ! » pour faire le lien entre l’opposition à la guerre et la question du pouvoir. Leur tactique est d’accompagner le mouvement, lui faire franchir des pas en avant, sans l’isoler des plus larges masses de province et du front.
Le même jour, les forces réactionnaires organisent à leur tour une manifestation pour les intérêts de l’impérialisme russe. Le général Kornilov prépare ses troupes à la répression contre les ouvriers. Le Comité exécutif du soviet réussit à faire redescendre les tensions, en exigeant des promesses pacifistes du Gouvernement provisoire… mais se garde bien d’imposer la moindre sanction à Kornilov.
A l’issue de ces deux journées, la rupture est profonde. A Pétrograd, les ouvriers s’émancipent du gouvernement bourgeois, mais aussi des partis dirigeant le Soviet. Nombre d’entre eux quittent les menchéviks pour rejoindre les bolchéviks. Dans les conseils d’usines ou soviets locaux, ces derniers gagnent des positions, deviennent parfois majoritaires. Et au sein du parti bolchévik, les thèses de Lénine l’emportent lors d’une conférence large à la fin du mois d’avril, grâce à la base ouvrière du parti, qui compte à ce moment-là près de 80 000 membres dont 15 000 à Pétrograd. Les Thèses répondent aux problèmes posés par la crise que viennent de vivre ces milliers de militants avec le prolétariat.
Juin : les deux classes face à face
Au cours des journées de juin, un nouveau palier est franchi : prolétariat et bourgeoisie vont mesurer leurs forces.
La colère des classes populaires s’accumule. Faim, pénurie, lock-outs pour les travailleurs, spéculation des classes riches, poursuite de la guerre : les tensions s’aiguisent. Le Gouvernement provisoire décide une grande offensive militaire, promise à ses alliés, dont les objectifs sont clairement impérialistes. Des régiments refusent, menacent le gouvernement. Des soviets locaux adoptent des résolutions comme celle-ci « Nous protestons contre l’aventure du Gouvernement provisoire qui mène l’offensive pour de vieux traités de pillage… et nous rejetons toute la responsabilité de cette politique d’offensive sur le Gouvernement provisoire et sur les partis qui le soutiennent, menchéviks et socialistes-révolutionnaires ».
Le parti bolchévik appelle à une manifestation pacifique et armée contre la guerre le 10 juin. La manifestation est interdite et le parti décide de ne pas la maintenir, vu les risques de répression.
Le 18 juin, menchéviks et socialistes-révolutionnaires, qui sont entrés depuis un mois au gouvernement, appellent à leur tour à une manifestation pour marginaliser les bolchéviks, en mettant en avant des mots d’ordre pacifistes et républicains : « Paix générale ! », « République démocratique ! », « Convocation de l’Assemblée constituante ».
Les bolchéviks relèvent le défi et décident d’appeler eux-aussi à cette manifestation, voyant qu’elle serait essentiellement ouvrière, mais pour y faire entendre leurs mots d’ordre.
La manifestation n’a plus rien à voir avec les grands défilés de l’union nationale de mars : plus de bourgeois, plus de classes moyennes, uniquement les usines et les casernes. Et dans toute la manifestation, les mots d’ordre et banderoles sont ceux des bolchéviks : « Tout le pouvoir aux soviets », « A bas les 10 ministres capitalistes », « A bas l’offensive », et même cette pancarte d’un cortège d’usine « Le droit de vivre est au-dessus du droit de la propriété privée ! ». Trotsky précise qu’elle n’avait été suggérée par aucun parti…
Menchéviks et socialistes-révolutionnaires sont déconfits. Les patriotes laissent éclater leur haine en manifestant à leur tour le lendemain. L’affrontement est évité. Les deux classes sociales, classe ouvrière et bourgeoisie, affirment leur politique, mesurent leurs forces. Mais les classes populaires sont encore loin d’être unies par un même niveau de conscience. Plus organisée et politisée, mais aussi directement confrontée au pouvoir central de l’Etat, la classe ouvrière de Pétrograd connait des évolutions de consciences plus rapides que dans d’autres villes. De même, les régiments au front qui sont sous le feu et sous la coupe de la propagande réactionnaire des officiers, n’évoluent pas au même rythme que ceux de l’arrière où l’influence des idées révolutionnaires progressent plus vite.
Juillet : comment prendre le pouvoir ?
Trotsky écrit « même les couches les plus disciplinées de la classe ouvrière, même les larges sphères du parti bolchévik, commençaient à perdre patience … La manifestation du 18 juin découvrit à tous que le gouvernement n’avait aucun appui ‘Qu’est-ce qu’ils attendent donc, ceux de là-haut ?’ demandaient les soldats et les ouvriers, songeant non plus seulement aux leaders conciliateurs, mais aussi aux institutions dirigeantes des bolchéviks » (Histoire de la Révolution russe).
A la fin du mois de juin, dans les régiments et les usines les plus politisés, des motions sont votées pour en finir avec le gouvernement. Des régiments et comités d’usine de Pétrograd décident d’appeler à de nouvelles manifestations en armes les 3 et 4 juillet. Ils se sentent majoritaires, sûrs de leurs forces.
Les bolchéviks mesurent que les conditions sont en train de murir pour la prise du pouvoir mais qu’elle est encore prématurée à l’échelle du pays. Ils font leur possible pour convaincre que cette manifestation insurrectionnelle risque de subir une répression terrible et qu’il faut l’ajourner. Ils ne peuvent pas l’empêcher et leur tactique est alors de l’accompagner, d’en faire une manifestation pacifique, pour limiter les provocations et les affrontements. Tous les mots d’ordre sont les leurs.
La manifestation du 4 juillet, particulièrement massive, se dirige vers le Soviet pour l’appeler à prendre le pouvoir contre le Gouvernement provisoire. Majoritaires au Soviet, menchéviks et socialistes-révolutionnaires refusent d’obéir à la rue. La manifestation se poursuit, quelques affrontements ont lieu, faisant plusieurs morts, mais elle se termine à l’appel des bolchéviks.
Trotsky écrit « Maintenant, cet appel ne rencontrait presque plus de résistance dans des milieux de la base. Les masses refluèrent vers les faubourgs et ne se disposaient pas à recommencer la lutte le lendemain. Elles avaient senti que la question du pouvoir du Soviet se présentait d’une façon beaucoup plus compliquée qu’elles ne l’avaient cru. » (Histoire de la Révolution russe). La tactique des bolchéviks avait permis d’éviter le bain de sang redouté, la classe ouvrière avait fait l’expérience jusqu’au bout du refus des menchéviks et des socialistes-révolutionnaires de prendre le pouvoir pour le prolétariat, alors qu’ils l’avaient accepté en entrant dans le gouvernement bourgeois… et qu’ils cautionnent et encouragent la réaction policière qui se déchaine alors contre les bolchéviks pendant le mois de juillet.
La classe ouvrière était devant la question clé de la révolution prolétarienne : comment prendre le pouvoir pour elle-même, renverser l’Etat des classes dominantes et le remplacer par le sien ?
Le parti de l'émancipation des travailleurs par eux-mêmes
Dans chacune de ces crises, le rôle du parti bolchévik et de Lénine ont été déterminants. Trotsky explique que « La principale force de Lénine consistait en ceci qu’il comprenait la logique interne du mouvement et réglait d’après elle sa politique. Il n’imposait pas son plan aux masses. Il aidait les masses à concevoir et réaliser leurs propres plans. »
« Est-il si difficile de comprendre que nul bolchevik ne saurait ‘provoquer’ ni trois ni même un seul ‘mouvement populaire’ si les raisons économiques et politiques les plus profondes ne mettaient le prolétariat en branle ? » écrit Lénine dans Trois crises, le « mécontentement général et irrépressible des masses, [la] surexcitation des masses contre la bourgeoisie et son gouvernement » sont « le fond des choses », le seul point d’appui qui permet de faire avancer la révolution, vers une étape qui n’avait jamais été atteinte, la prise du pouvoir à l’échelle d’un pays par la classe ouvrière.
L’activité militante de la base ouvrière du parti, dans les grèves, les comités d’usine, les soviets locaux, conduisait vers ce dénouement, même dans les premières semaines de confusion de mars et avril. Un vieux militant cité par Trotsky dit « Nous nous orientions inconsciemment vers la révolution prolétarienne, croyant nous diriger vers la révolution démocratique bourgeoise ». La démarche de Lénine consistait à rendre consciente l’activité réelle, à lui donner sa « signification de classe » en l'inscrivant dans une perspective.
Et l’activité réelle des militants ouvriers bolchéviks, contrairement aux menchéviks, avait été de s’affronter aux patrons des usines, à la bourgeoisie : « Les ouvriers bolchéviks, aussitôt après l’insurrection (de février), avait pris sur eux l’initiative de la lutte pour la journée de huit heures ; les menchéviks déclaraient prématurée cette revendication. Les bolchéviks dirigeaient les arrestations des fonctionnaires tsaristes, les menchéviks s’opposaient aux ‘excès’. Les bolchéviks entreprirent énergiquement de créer une milice ouvrière, les menchéviks enrayaient l’armement des ouvriers, ne désirant pas se brouiller avec la bourgeoisie. » (Histoire de la Révolution russe).
C’est bien cette lutte des classes résolue menée par les militants qui a trouvé son expression dans les Thèses d’avril et qui a permis à cette stratégie de l’emporter, à travers les différentes étapes de la révolution.
A propos des trois crises d’avril, juin et juillet, Lénine expliquait que « chaque pas en avant de la révolution est provoqué ou forcé par une intervention directe des masses, complètement inattendue » (Trois crises). Les étapes franchies par le prolétariat, notamment à Pétrograd, étaient autant de leçons politiques pour l’ensemble des classes populaires du pays, le temps qu’elles les vivent à leur tour, qu’elles se les approprient : conquête de l’indépendance de classe ; compréhension de l’affrontement avec la bourgeoisie ; problèmes de la prise du pouvoir… Aucune de ces étapes ne pouvaient être brulées par un coup de force pour prendre le pouvoir.
Ce qui unit Lénine et Trotsky avec la base ouvrière du parti, c’est leur confiance dans ces évolutions, « de profonds processus moléculaires qui soudaient en un tout politique les éléments hétérogènes de la classe ouvrière » écrit Trotsky. Lénine développe : « Au Soviet, notre parti est en minorité… Rien à y faire ! Il ne nous reste qu’à expliquer patiemment, persévéramment, systématiquement, l’aberration de leur tactique. Tant que nous sommes en minorité, nous accomplissons un travail de critique pour dégager les masses de l’imposture. Nous ne voulons pas que les masses nous croient sur parole. Nous ne sommes pas des charlatans. Nous voulons que les masses se détachent par expérience de leurs erreurs. » L’émancipation des travailleurs par eux-mêmes.
François Minvielle