Vendredi dernier, juste après que Netanyahou eut fini, sous les huées et dans une salle vidée aux trois quarts de ses délégations, son discours provocateur et agressif à la tribune de l’Assemblée générale de l’ONU, l’armée israélienne annonçait avoir détruit le quartier général du Hezbollah à Beyrouth, assassinant comme on l’a appris plus tard son dirigeant Nasrallah. Des explosions terribles qui ont rasé six immeubles d’habitation, tué 300 personne et qui viennent après une semaine de raids aériens et de frappes meurtrières qui ont fait plus de 700 morts et des milliers de blessés, provoquant un exode qui s’élèverait à près d’un million de personnes.

Un « tournant historique » dans la situation au Moyen-Orient, dit Netanyahou. Indiscutablement mais un tournant historique d’un point de vue plus global, celui de la légitimation à la face du monde entier du terrorisme d’État, la politique de la terreur comme mode de gestion des rapports internationaux. Ce n’est pas une nouveauté, c’est la loi du capitalisme, mais là, elle reçoit l’assentiment ouvert de toutes les grandes puissances occidentales, de fait et quelles que soient les réserves et autres hypocrisies diplomatiques. Tant Biden que Harris se sont réjouis de l’assassinat du chef du Hezbollah, réaffirmant leur implication dans l’offensive israélienne.

Peu de temps auparavant, jeudi, à Biden et Macron qui demandaient dans un communiqué commun une trêve de 21 jours entre Israël et le Hezbollah, Netanyahou répondait que l’armée israélienne poursuivrait ses opérations contre le Hezbollah « avec toute la force nécessaire ». Le même jour, les Etats-Unis... accordaient à Israël une aide financière de 8,7 milliards de dollars.

Comment mieux dire le cynisme et l’hypocrisie des propositions de cessez-le-feu des dirigeants américains et français ? D’une main, ils arment, financent et soutiennent l’État d’Israël, leur bras armé, quels que soient ses crimes, de l’autre ils voudraient faire croire qu’ils sont pour la paix, non sans faire porter la responsabilité de la guerre au Hamas et au Hezbollah et toujours ressassant le « droit d’Israël à se défendre » pour justifier sa guerre génocidaire.  

A la tribune de l’ONU, Netanyahou a rappelé son discours de l’an dernier à la même assemblée générale -comme l’avait fait aussi Biden deux jours plus tôt. Il a montré une première carte, « de la bénédiction », pour faire voir ce que pourrait être le Moyen-Orient de leurs vœux, basé sur l’alliance entre Israël et les sommets dirigeants des pays arabes, l’Arabie Saoudite, l’Egypte, faisant du Proche-Orient une voie de commerce sécurisée entre l’Europe et l’Asie. Puis il a brandi une deuxième carte, « de la malédiction » montrant l’Iran, l’Irak et la Syrie, « l’arc de la terreur créé par l’Iran », annonçant clairement son intention de détruire les « ennemis sauvages » d’Israël.

C’est là le contenu de cette guerre contre le peuple palestinien pour sa destruction, contre le Liban et l’Iran et contre tous les peuples du Moyen-Orient, y compris contre les travailleur·es israélien·nes, faire par les armes et la terreur ce que la finance et la diplomatie n’ont pas réussi à faire, établir, consolider, imposer aux peuples l’ordre du capitalisme, des grandes puissances occidentales.

Le gouvernement israélien est en train de commencer au Liban ce qu’il fait depuis un an dans la bande de Gaza et en Cisjordanie. Au Liban, ce sont les populations civiles, des quartiers entiers de Beyrouth, des villages du sud du pays, qui sont frappés au nom de la lutte contre le Hezbollah, avec une violence plus meurtrière qu’en 2006. Et les dirigeants israéliens ont déjà annoncé leur volonté de mener après ces raids aériens une opération terrestre au Liban, provisoire et limitée, disent-ils, mais c’est un pas supplémentaire dans une escalade qui conduit à la guerre contre l’Iran. Les dirigeants américains disent ne pas vouloir celle-ci, et peut-être auraient-ils voulu l’éviter, mais la logique de l’escalade guerrière s’impose à eux, ils ne feront rien pour arrêter Israël, le garant de leurs intérêts au Moyen-Orient où stationnent 40 000 de leurs soldats auxquels ils viennent d’adjoindre quelques centaines supplémentaires.

Le « plan de paix » défendu à l’ONU par Zélensky, c’est gagner la guerre 

A cette même Assemblée générale de l’ONU, beaucoup de publicité a été donnée à Zélensky et à son « plan de paix » dont la mise en œuvre est conditionnée à un « plan de la victoire ». Car selon lui, aucune négociation n’est possible si la Russie n’est pas vaincue. Pour lui, c’est simple, « donnez-moi l’autorisation d’utiliser des missiles de longue portée contre la Russie », dit-il à ses fournisseurs autant que donneurs d’ordre occidentaux et la Russie sera vaincue.  Ce qui, bien évidemment, n’est pas aussi simple alors que Poutine a déclaré qu’il considérerait alors que l’Otan est entrée en guerre avec la Russie.

Mais il peut compter sur ses bailleurs de fonds occidentaux, quoi qu’on dise de leur « lassitude » à aider l’Ukraine. Biden, dans son dernier discours à l’ONU, s’est félicité d’avoir suscité une vaste coalition en soutien à l’Ukraine. Et Kamala Harris que Zélensky a rencontrée jeudi lui a assuré son soutien « inébranlable ». « Il y a des gens dans mon pays, a-t-elle ajouté en visant Trump, qui voudraient forcer l’Ukraine à abandonner de larges portions de son territoire souverain, [...] ce sont des propositions de capitulation, ce qui est dangereux et irresponsable ». C’est en effet la position de campagne de Trump. Alors qu’il dit n’avoir aucune hésitation s’il fallait bombarder l’Iran jusqu’à faire disparaître des villes entières, il promet de favoriser une négociation de paix avec Poutine quitte à lui abandonner des territoires ukrainiens. Une promesse de campagne que Trump ne tiendrait peut-être et sans doute pas s’il était élu tant ses décisions seraient alors guidées et peut-être même dictées par les sommets dirigeants de la bourgeoisie américaine, par le Pentagone. Il est peu probable que ceux qui dirigent réellement la Maison Blanche acceptent de donner ce qui serait une victoire pour Poutine, le Donbass et la Crimée par exemple. Ces rodomontades électorales de Trump sont aussi peu crédibles que les « efforts » de Biden et Macron pour une trêve au Liban.

Contre la mondialisation de la guerre, pour la paix, le soulèvement et la fraternisation des peuples

Le boycott du discours de Netanyahou par de très nombreuses délégations à l’ONU montre que les dirigeants d’une grande partie du monde ont bien conscience que les puissances occidentales dirigées par les Etats-Unis sont en train de mondialiser la guerre par leurs « proxys » Israël et l’Ukraine. Cette escalade militariste vise en fait tous les peuples de la planète. Plusieurs Etats déjà ont condamné la guerre israélienne et refusé d’emboîter le pas de la coalition initiée par les USA contre la Russie. Mais leur protestation à l’ONU est bien impuissante ne serait-ce qu’à exercer une pression tant sur Israël que sur les Etats-Unis et elle ne préjuge en rien de leur attitude demain face à la pression économique, financière et militaire des USA et de leurs alliés. 

La guerre d’Israël ainsi que la guerre d’Ukraine, dont le Wall Street Journal vient d’évaluer le nombre global de victimes à un million de morts et de blessés, s’inscrivent dans l’offensive des vieilles puissances impérialistes dont les Etats-Unis en premier lieu, pour préserver leur domination alors que s’exacerbe la concurrence économique provoquée par la crise de sénilité du système capitaliste qui s’est étendu à l’ensemble de la planète, à l’essoufflement de la machine à profits.

La mondialisation de la guerre est inscrite, quels qu’en soient le rythme, les étapes et la forme dans l’exacerbation de la concurrence capitaliste, et dans le krach financier et la régression économique en cours. Le développement mondialisé de la production et des échanges est incompatible avec la propriété privée et l’Etat capitaliste et conduit à de violentes conflagrations tant économiques, militaires que sociales.

La folle course hors contrôle du capitalisme mondialisé ne pourra être enrayée, stoppée que par le soulèvement des peuples contre leurs propres classes dirigeantes, leur fraternisation, le combat contre notre propre gouvernement, notre propre État, la seule voie de la paix et du progrès.

Galia Trépère

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