L’abstention massive des classes populaires, le week-end dernier, a confirmé la déroute des partis institutionnels. Le parti présidentiel s’est effondré et Macron, dès lundi, tentait de se refaire au jeu de la démagogie écologiste puis du remaniement ministériel. Il a viré Edouard Philippe, rival devenu encombrant, remplacé par Jean Castex, son nouveau chef de cabinet. Face à la tempête annoncée, il concentre tous les pouvoirs entre ses mains.

Tout cela est bien dérisoire au regard des annonces de plans de licenciements qui se succèdent, dont celle d’Airbus, mardi 30, de 15 000 emplois dans le monde, dont 5000 en France. Le Maire, ministre de l’industrie, se vantait pourtant il y a peu des 15 milliards accordés au secteur de l’aéronautique pour « sauver les emplois » ! Les multinationales et les gros actionnaires dictent leur volonté à ceux qui les servent, et tant pis si ces derniers le paient de leur discrédit politique, comme Macron, leur serviteur du moment.

Les travailleurs de la santé étaient en grève et dans la rue mardi pour lui crier leur colère, « super héros un jour, larbins toujours », « blouses blanches, colère noire »…, lui dire que les 6,3 milliards lâchés par Véran pour revaloriser les salaires ne suffisent pas, qu’il faut 300 euros pour toutes et tous… La participation était moindre que le 16, mais pas la révolte, loin de là, alors que la mascarade du Ségur de la Santé qui devait s’achever ce vendredi a été prolongée d’une semaine… « faute d’accord ».

Les simagrées de Macron posant au défenseur de l’environnement se retournent tout autant contre lui. Lundi devant les 150 participants de la Convention citoyenne sur le climat et statuant sur leurs 149 propositions, il en  retoquait trois, dont celle de taxer de 4 % les dividendes pour financer la transition écologique, autrement dit de faire – très peu… – payer les pollueurs. Pas question de s’en prendre à ceux dont il est le larbin zélé.

Jeudi, il est passé à l’offensive et à la provocation lors d’un entretien avec la presse régionale qui titrait en le citant : « La rentrée sera difficile et il faut nous y préparer »… Nous préparer à recevoir des coups ! Sa réponse à  une question sur la « philosophie du plan de relance » qu’il nous promet pour cet été donne le ton et la mesure de son cynisme : « Nous devons collectivement rompre avec ce qui est la maladie française : la préférence pour le chômage », regrettant « un système très généreux qui [l’]indemnise » ! A quoi il n’a pas oublié d’ajouter la remise en route de la réforme des retraites et, sans le dire ouvertement, la fin des 35 heures. Vendredi, il remplaçait Philippe par Castex, proche de Sarkozy, réputé fidèle serviteur de l’Etat et de lui-même, comme exécuteur de ses basses œuvres.

Macron choisit ouvertement d’affronter la colère sociale qui monte de toutes parts, de poursuivre sa politique de casse sociale alors que travailleurs et jeunes sont comme jamais sous la menace de suppressions massives d’emplois, sans oublier celles sur la santé, l’épidémie du coronavirus étant loin d’être éradiquée. Il n’avait en réalité pas d’autre choix. C’est la seule voie qui s’ouvre à lui alors que la dégradation de la situation économique et sociale décape les rapports sociaux, met à nu les rapports de classe. Elle ne laisse pas d’autre choix aux capitalistes et à leurs serviteurs que l’exacerbation de la guerre de classe pour tenter de sauver ce qui peut l’être de leur domination et de leurs profits, alors que leur système économique est en train de s’effondrer sous ses propres contradictions.

Tout comme elle nous impose, travailleurs, jeunes, classes populaires, de leur répondre sur le même terrain, avec nos armes de classe.

Un effondrement qui se confirme

Selon les dernières prévisions du FMI, la « récession mondiale sera plus dure que prévu ». Alors qu’en avril l’estimation de la contraction du PIB mondial était de 3 %, elle est maintenant estimée à 4,9 %. Pour la France, ce chiffre devrait atteindre 12,5 % et le « rebond » que son économie pourrait connaître en 2021 est estimé à 7 %, chiffre tout aussi improbable que ce rebond lui-même, et de toute façon loin de compenser l’effondrement en cours.

Les conséquences sociales en deviennent de plus en plus concrètes au fur et à mesure que s’accumulent les annonces de licenciements dans une multitude d’entreprises, à Air France, Nokia, Renault, dans le secteur de l’habillement, etc. A Airbus également, quelques semaines seulement après que son patron et ceux de Safran, Thalès et Dassault célébraient en grande pompe le « sauvetage de l’aéronautique française » avec Le Maire venu leur apporter 15 milliards.

Ce dernier fait aujourd’hui semblant d’être surpris, mais il n’a pas été trompé, il a menti en toute conscience en tentant de nous vendre ses milliards comme une aide pour l’emploi. La priorité du gouvernement est à la prise en charge financière par l’État d’un vaste plan de restructuration des grandes entreprises. Pour Airbus, cela passe par une réduction massive des capacités de production pour les adapter à une chute drastique de la demande, conséquence de la disparition probable de nombreuses compagnies aériennes « low-cost » – Air France est en train de liquider sa filiale Hop!. La bulle spéculative que leur prolifération a constituée au cours de la décennie passée se dégonfle, avec des conséquences en cascade sur l’ensemble de la production d’avions. Les salariés d’Airbus ne seront pas les seuls à en faire les frais, ceux des PME sous-traitantes en paieront aussi le prix fort. Autour de Toulouse, selon une estimation du président de la chambre régionale du commerce et de l’industrie, 20 000 à 40 000 emplois sont menacés, 70 à 80 % des pièces assemblées dans les hangars d’Airbus étant produites par des entreprises sous-traitantes.

Les capitalistes cherchent à ajuster leur économie à leur monde d’après, un monde où l’activité économique aura globalement reculé, mais où ils pourront continuer à faire fructifier leurs capitaux en surexploitant les travailleurs. Macron et ses sbires travaillent à faire reculer les limites de cette surexploitation, poursuivant l’offensive de régression sociale de leurs prédécesseurs. Ils inondent en même temps les grandes entreprises d’argent public, en leur offrant des milliards empruntés par L’État sur les marchés financiers et en garantissant les prêts qu’elles contractent elles-mêmes. Ainsi, en ces temps incertains où aucune entreprise n’est à l’abri d’une faillite, les banques et leurs actionnaires, les marchés financiers et les spéculateurs qui y font leur beurre sont protégés… du moins tant que le krach où tout cela conduit ne se déclenche pas. Le risque est reporté sur la population, sur nous, travailleurs, qui remboursons leur dette.

Leur monde d’après, c’est la fuite en avant vers un nouveau krach financier, vers les catastrophes environnementales, vers des crises sociales et des reculs démocratiques sans précédent. Contrairement à ce que nous ressassent ceux qui nous gouvernent, aucune « relance », aucun « rebond » n’est à attendre de leur politique. Ni les milliards, ni le redoublement des offensives contre les classes populaires et les travailleurs ne peuvent sortir l’économie capitaliste mondiale, a fortiori nationale, de la spirale récessive dans laquelle elle s’enferme du fait de ses propres contradictions et des politiques que mènent les Etats à seule fin de maintenir la domination d’une poignée d’exploiteurs.

Face à l’effondrement, un plan de défense des travailleurs et de toute la population

Le Figaro titrait vendredi « Macron a tort : la rentrée ne sera pas difficile, mais apocalyptique ». Pour faire face à cette « apocalypse », nous, travailleurs, jeunes, classes populaires ne pouvons compter que sur nos propres forces, nos mobilisations, par la grève et dans la rue. De même que Macron n’a pas d’autre choix que de poursuivre en l’aggravant l’offensive contre les travailleurs et les classes populaires, il n’y a rien à attendre des politiques qui prétendent s’opposer à lui en restant sur le terrain institutionnel. Les alliances électorales de « gauche », aussi « radicales » qu’elles se prétendent, ne peuvent que se heurter aux diktats des classes dominantes, à la mainmise totale qu’elles ont sur la société et auxquelles elles doivent se soumettre. Quant au  jeu du « dialogue social », il se révèle de plus en plus pour ce qu’il est, un simulacre qui a pour fonction de dévoyer les revendications sociales du terrain de la lutte vers celui de « négociations » pipées d’avance.

Face au « plan de relance » de Macron et aux conséquences de l’effondrement en cours, nous avons besoin de notre propre plan de défense, pour l’emploi, pour les salaires, un programme de classe, pour nos luttes, un plan autour duquel l'ensemble du mouvement anticapitaliste et révolutionnaire devrait et pourrait se rassembler.

Un plan en particulier pour organiser notre opposition collective à toute suppression d’emploi, en exigeant la répartition du travail entre toutes et tous, la réquisition des entreprises qui déposent leur bilan. Un plan pour exiger, par nos luttes, que soit mis fin à la gabegie absurde qui consiste à maintenir sous perfusion une économie en faillite et les dividendes d’une poignée de parasites, pour que ces milliards soient au contraire utilisés pour assurer à toutes et tous les moyens de vivre décemment.

Sa mise en oeuvre dépend de l'intervention directe des travailleurs pour prendre le contrôle de la marche de l'économie.

Daniel Minvielle

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