Pour exercer et perpétuer sa domination, mener son offensive, la bourgeoisie ne se contente pas d’exercer sa pression sociale, économique, son chantage permanent, elle fait de la politique pour entretenir le mensonge de la légitimité de son pouvoir.

Les classes dominantes ont toujours cherché à dominer les esprits et les consciences avec des constructions idéologiques reflétant leurs propres préjugés sociaux, leurs illusions sur elles-mêmes comme leur mépris des classes populaires, en s’appuyant sur des morales archaïques, rétrogrades, qui en appellent au respect de Dieu, de l’ordre établi, du pouvoir des riches et des puissants.

Quelle que soit la forme qu’elles prennent, quels que soient le Dieu, la Nation ou les principes dont elles se revendiquent, ces idéologies ont toutes le même fond réactionnaire, car elles masquent la réalité sociale des rapports d’exploitation, enracinent dans les esprits le mensonge du caractère éternel, figé, incontestable de l’ordre établi et s’efforcent de retourner la révolte des classes exploitées contre elles-mêmes en les divisant, les dressant les unes contre les autres au nom de la religion, du nationalisme, du racisme.

Depuis la crise de 2007-2008, l’offensive sociale, militaire, sécuritaire contre les peuples, seule réponse des classes dominantes à la crise globale financière, économique, écologique de leur système, n’a fait que renforcer toutes ces idéologies réactionnaires.

Elles se sont aussi nourries de la faillite politique de la gauche et, en retour, ont accentué l’effondrement des vieilles organisations du mouvement ouvrier et les reculs de la conscience de classe. Elles déstabilisent, brouillent les repères dans toute la société, s’accompagnant de la progression de replis nationalistes ou identitaires, de la montée des populismes mais aussi de différents obscurantismes, du relativisme en science jusqu’aux diverses théories du complot. Elles entraînent la confusion jusque dans les rangs de ceux qui veulent combattre les diverses oppressions qu’engendrent les rapports d’exploitation dans une société de classes, aujourd’hui capitaliste.

Combattre les différentes oppressions, c’est d’abord étudier et faire la critique de la réalité sociale qui les a engendrées pour armer la révolte, construire une conscience collective, une conscience de classe qui inscrive ce combat dans le cadre du développement historique.

La société a évolué, s’est transformée, a progressé en permanence grâce au travail humain, grâce aux progrès de la science et des techniques, à la lutte contre les préjugés, et de façon plus générale aux progrès de la pensée humaine pour comprendre la nature et les rapports sociaux.

Le matérialisme est à la base de cette connaissance objective, scientifique du monde, celle qui émancipe des croyances et des préjugés par la compréhension des lois naturelles qui gouvernent son évolution comme de celles qui régissent l’histoire des sociétés humaines. Il n’est pas une option philosophique, une théorie parmi d’autres qu’on pourrait choisir ou pas, mais bien la méthode sur laquelle repose toute démarche scientifique.

C’est dans cette continuité du développement du matérialisme que s’inscrit, avec Marx et Engels, le socialisme scientifique sous sa forme moderne. Comme l’écrit Engels : « Comme toute théorie nouvelle, il a dû d'abord se rattacher au fonds d'idées préexistant, si profondément que ses racines plongent dans les faits économiques. »

La défense du matérialisme et des conceptions évolutionnistes, du marxisme, est la condition pour faire nôtres les progrès des connaissances modernes enfantées par le travail humain, malgré le cadre perverti qu’imposent la propriété privée capitaliste et l’offensive de la bourgeoisie pour perpétuer sa domination.

Cette défense est loin d’être un combat minoritaire, isolé, il rejoint celui que mènent tous ceux qui par leur travail participent, au quotidien à travers le monde, même sans en avoir une claire conscience, aux progrès des connaissances comme au développement des sciences et des techniques à la base de tout progrès social.

Nos idées socialistes, communistes ne sont pas une utopie ou une construction idéologique. Elles prennent leurs racines dans l’évolution même des idées et de la société qui sape les bases de la domination de la bourgeoisie, classe minoritaire, et de l’idéologie qui voudrait la légitimer.

Le combat pour le matérialisme, contre tous les préjugés produits par les rapports d’exploitation et de domination, participe de la lutte du prolétariat pour libérer le travail humain, intellectuel et manuel, de la folie de la propriété privée capitaliste.

Le développement du matérialisme, comme produit et condition du progrès des sociétés humaines

Le matérialisme postule qu’il existe une réalité matérielle indépendamment de la conscience que nous en avons. Le monde, l’univers, la société, tout ce qui nous entoure et dont nous faisons partie, est une réalité qui existe en dehors de nous et dont nous avons conscience grâce à nos organes des sens et à notre cerveau… notre conscience faisant elle-même partie intégrante de ce monde matériel. Celui-ci ne peut s’expliquer ni être compris que par l’étude des lois qui existent et se développent en son sein, sans faire appel ni à un Dieu, ni à aucun grand principe abstrait, mystérieux, existant en-dehors de lui.

En cela, le matérialisme est la condition de toute tentative de tirer de l’apparent chaos de la nature et de la société les bases de la compréhension nécessaire et indispensable pour agir dessus.

Même souvent inconsciemment, c’est en matérialistes que les scientifiques étudient dans leur laboratoire les lois qui régissent le monde matériel, comme c’est en matérialistes que les techniciens, les ouvriers transforment ce monde matériel par leur travail.

Le travail implique de s’appuyer, d’utiliser les lois, les mécanismes qui régissent le monde réel en s’affranchissant pour cela des croyances, des superstitions, des préjugés qui condamnent à l’impuissance et à la résignation. Le matérialisme est la condition du progrès social qui repose sur l’accumulation du travail de millions d’hommes et de femmes à travers le monde et il s’en nourrit.

Il est ainsi partie intégrante des progrès de la pensée humaine, des acquis des sciences et des techniques qui se sont développées et ont accompagné toute l’histoire des sociétés et qui créent aujourd’hui, malgré les ravages engendrés par la mondialisation capitaliste, les conditions matérielles des progrès futurs, des prochaines étapes de cette histoire.

C’est dans une lutte permanente contre les religions, les croyances mystiques, les idéologies que le matérialisme s’est construit. Il a contribué à émanciper, libérer les esprits de l’emprise des croyances religieuses à des époques où ces croyances servaient de justification au pouvoir bien concret et matériel des Églises, des rois et des classes dominantes, et façonnaient toute la vie sociale.

Le matérialisme participe du long combat encore inachevé pour l’émancipation et conserve toute son actualité...

Il est l’enfant du combat des Lumières au XVIII° siècle et de la critique révolutionnaire de la religion, pilier de la société d’Ancien Régime, qui a préparé la Révolution française et l’avènement de la société bourgeoise. Comme le matérialisme historique est né de l’émergence du mouvement socialiste et communiste, de la prise de conscience des contradictions de la société capitaliste naissante et du développement du mouvement ouvrier.

Des idéologies réactionnaires, produit direct de la division de la société en classe et de la propriété capitaliste

Malgré l’enracinement du matérialisme dans les progrès qui accompagnent l’histoire des sociétés, les idées réactionnaires, les conceptions idéalistes et religieuses de toutes sortes ont toujours continué à dominer, à se renforcer, notamment dans les périodes de recul social et politique. Ainsi, pas une région du monde, pas un pays n’échappent aujourd’hui à la menace que représente, pour l’ensemble de la société, le renforcement des croyances religieuses, des superstitions et du mysticisme et toutes les formes d’obscurantisme qui les accompagnent, comme les délires des différentes théories du complot.

Aujourd’hui comme par le passé, ce renforcement des idéologies réactionnaires est avant tout le reflet des contradictions d’une société d’exploitation, dominée par les idées et préjugés des classes dominantes, expression plus ou moins directe de leurs intérêts de classe. Leur opposition au progrès social va de pair avec leur hostilité aux progrès des connaissances. La bourgeoisie utilise les progrès techniques au service de la course aux profits pour améliorer la rentabilité du capital, tout en combattant les apports de la science, les progrès de la connaissance dans leur dimension émancipatrice. Leur acharnement à s’accrocher à leur position sociale parasitaire les conduit à s’opposer aux possibilités ouvertes par les progrès des connaissances, aux avancées du matérialisme, au nom de vieilles idéologies réactionnaires régulièrement recyclées, la religion, le nationalisme, le racisme, le sexisme.

Peu importe finalement de savoir si les classes dominantes et leurs représentants sont réellement convaincus des inepties des idéologies réactionnaires qu’ils contribuent à entretenir et à propager. Derrière leurs préjugés, leurs illusions sur elles mêmes, il y a avant tout des choix politiques dictés par leurs intérêts étroits de classe minoritaire, accrochée à défendre la propriété privée, fondement de leur pouvoir de s’approprier le produit du travail humain.

Ces idéologies véhiculent des conceptions sur la nature, sur la vie et sur la société qui sont complètement en décalage avec le développement des sciences modernes, voire qui n’hésitent pas à remettre en cause les progrès des découvertes scientifiques quand ils contredisent leurs dogmes, comme c’est toujours le cas avec l’évolution du monde vivant.

Ainsi, si la théorie de l’évolution à laquelle Charles Darwin a donné une base scientifique, matérialiste, est aujourd’hui reconnue comme le cadre fondamental de toute étude du monde vivant jusqu’à l’émergence des sociétés humaines, elle reste encore aujourd’hui l’objet d’attaques virulentes. Pour ne citer que deux exemples, en Turquie, Erdogan a annoncé son retrait des programmes de l’éducation nationale et dans le pays le plus riche et le plus développé du monde, les États-Unis, le gouvernement Trump comporte des créationnistes notoires.

La théorie de l’évolution est inacceptable pour eux parce qu’elle sape les fondements de la croyance religieuse comme elle bouscule plus largement toutes les conceptions idéalistes qui font de l’être humain, et sa capacité à penser, un être à part. Darwin a ruiné cette vieille conception religieuse qui considère l’Homme comme un être créé par Dieu pour dominer une Nature qui lui aurait été donnée pour qu’il y règne en maître.

Alors que tout le développement de la science moderne montre la continuité des êtres humains avec le monde animal, la religion, les conceptions idéalistes opposent le préjugé d’une différence fondamentale entre eux. La conscience, la pensée abstraite, l’intelligence, la morale, bref tout ce que la religion résume dans le terme fourre-tout d’« âme », serait l’ultime trace du petit coup de pouce de Dieu.

Là où certains continuent à s’accrocher à la fable d’une force supérieure dont nous serions la création, les sciences biologiques et les sciences humaines étudient, progressent, et nous aident à décrire et comprendre l’histoire de notre espèce, en inscrivant l’émergence de ses particularités que sont la conscience, la pensée abstraite et son organisation sociale dans la continuité de l’évolution du monde vivant. Les êtres humains sont le produit d’un processus évolutif prodigieux qui a conduit en quelque sorte la matière à devenir consciente d’elle-même.

Et si la science n’arrive pas encore à expliquer tous les enchaînements qui y ont conduit, elle continue à progresser pour nous permettre de nous comprendre nous-mêmes, en tant qu’objets et sujets, de prendre conscience de notre pleine intégration à notre environnement naturel et de créer les conditions pour prendre en main notre propre histoire.

Les progrès des connaissances, le développement mondial de l’économie tendent à unifier le monde, à le démocratiser en rendant possible l’accès de tous les êtres humains à des conditions de vie moderne, à l’éducation, aux progrès de la médecine, à la culture sous toutes ses formes. Ces progrès rendent possible l’émancipation des humains de toutes les croyances religieuses, lointain héritage de leurs premières interrogations sur leur environnement, ils sapent en cela les bases mêmes de la domination de la bourgeoisie, classe minoritaire, et créent les bases pour l’émergence d’une autre organisation sociale débarrassée des rapports d’exploitation, d’une autre conscience collective de l’humanité.

Tout au contraire, les idéologies véhiculées par les classes dominantes ne font que morceler le monde, le diviser, en combinant la liberté complète de circulation pour les capitaux et la multiplication bien concrète de frontières contre les peuples. Elles le morcellent aussi en dressant des frontières dans les consciences en s’appuyant pour cela sur de vieilles théories religieuses, sur la nostalgie de nations passées révolues et mythifiées, sur des préjugés ancestraux, racistes, sexistes, xénophobes totalement en décalage avec le monde moderne international du XXIème siècle.

L’idéologie libérale individualiste de la bourgeoisie… comme justification des rapports d’exploitation capitaliste

Même quand elles ne prennent pas l’aspect de croyances religieuses ou de nationalismes d’un autre temps, les idéologies véhiculées par les classes dominantes reposent sur des conceptions philosophiques idéalistes qui s’opposent au matérialisme. Car elles reviennent d’une manière ou d’une autre à résister aux avancées de la science, à nier qu’il existe une réalité matérielle qui évolue et se transforme en permanence, indépendante de nous mais à l’origine de la conscience que nous en avons. Les conceptions idéalistes reposent toutes sur la défense de grands principes moraux, aussi abstraits qu’immuables, sur lesquels devrait reposer toute l’organisation sociale.

Que ce soit à la façon ouvertement rétrograde de Trump ou d’Erdogan, ou dans une version qui se prétend moderne avec Macron, c’est aujourd’hui le triomphe de l’idéologie libérale de la bourgeoisie qui, au nom du grand principe de liberté, fait avant tout l’apologie de l’individualisme le plus crasseux, de la concurrence, de la sélection par la loi du plus fort, et n’est finalement que la justification cynique du parasitisme de la propriété bourgeoisie. L’ubérisation est leur modèle de société, à savoir chacun est son propre exploiteur, pas de contrats collectifs, la « liberté » d’être esclave du travail en toutes circonstances.

Macron incarne le retour décomplexé de la vieille idéologie libérale, de ce vieux préjugé éculé des classes dominantes qui justifie les inégalités par les mérites de ceux qui sont faits pour réussir, pour diriger, « les premiers de cordée ». Cette idéologie libérale a accompagné depuis le XIXème siècle le développement de la bourgeoisie. Ce libéralisme, c’est d’abord en réalité la liberté des marchés, les lois de la libre concurrence, bref le règne de la loi du plus fort, idéalisé par ses défenseurs en une loi naturelle. En effet les idéologues de la bourgeoisie ont prétendu s’appuyer sur la découverte scientifique de l’évolution faite par Darwin pour en tirer « une loi d’évolution » universelle, justifiant la lutte individuelle, la survie du plus apte bientôt reformulée en « la survie du plus fort, du meilleur ». Une telle conception souvent surnommée « darwinisme social » n’avait plus grand-chose à voir avec la théorie scientifique de Darwin.

Les défenseurs du capitalisme, à la Macron, ne font que détourner des progrès scientifiques pour donner un semblant de fondement à ce qui n’est que l'expression des préjugés de classe de la bourgeoise : « Les riches sont riches parce que ce sont les meilleurs et les plus forts… c’est une loi de la nature ! ».

La science, le matérialisme progressent, se remettent régulièrement en cause, remplacent les vieilles explications dépassées par de nouvelles théories intégrant de nouvelles connaissances pour permettre une vision toujours plus précise de la réalité, ouvrant la voie au progrès de la société. Les religions, comme toutes les idéologies, ne cherchent qu’à remanier, recycler, parfois même récupérer la science pour maintenir les mêmes vieux dogmes, les mêmes illusions pour dominer les esprits et maintenir le vieil ordre social.

L’idéologie libérale transforme ainsi la science de l’évolution en une justification de la sélection et donc de l’explosion des inégalités sociales comme la défense de la liberté individuelle en une apologie de l’égoïsme de classe le plus étroit.

A l’influence des idéologies réactionnaires, s’opposent les produits du travail humain, les connaissances scientifiques et les progrès techniques

Toutes ces idéologies nationalistes, populistes, religieuses servent aux classes dominantes à faire accepter le mensonge du caractère éternel de l’ordre social et de leur domination. Leur progression est d’autant plus paradoxale et insupportable que les conditions matérielles rendant possible le socialisme sont plus développées qu’à l’époque de Marx et d’Engels : production plus socialisée et mondialisée que jamais, populations plus instruites et urbaines, classe ouvrière plus féminisée, progrès considérables des sciences et techniques.

L’influence de ces idéologies réactionnaires participe d’un recul de la conscience de classe et entraîne beaucoup de confusion dans les esprits, même s’il existe un sentiment de révolte profond parmi la jeunesse et la classe ouvrière face aux oppressions engendrées par cette société d’exploitation. La confusion désarme cette révolte, l’empêche de formuler consciemment l’enjeu du combat pour l’émancipation.

Le rejet des classes dominantes et du cynisme avec lequel elles utilisent le progrès technique uniquement pour accroître leurs profits peut conduire à douter de tout, jusqu’à remettre en cause les avancées réelles des sciences, les progrès réels du développement historique. La science ne serait qu’une opinion comme une autre, qu’une construction sociale au service des classes dominantes, qui pourrait être remise en cause, sans se soucier de la réalité des faits qu’elle permet de décrire et de comprendre.

Cette confusion participe du recul des idées progressistes. La méfiance dans les progrès des connaissances scientifiques, dans le caractère universel du progrès humain ne peut qu’alimenter le sentiment d’impuissance, de résignation, les replis sectaires et identitaires et créer le terrain pour tous les mysticismes et autres délires complotistes.

Les théories du complot reposent toutes sur une même vision de l’histoire : l’histoire serait régie par des forces secrètes, occultes, manipulatrices, toute puissantes, face auxquelles les populations ne pourraient rien pour changer leur sort. Leur caractère réactionnaire vient de cette vision où toute tentative de transformer la société est vouée à l’échec, où les masses ne peuvent jamais intervenir consciemment dans les événements. Si le monde est régi par des forces occultes, il n’y a plus d’espoir de pouvoir le transformer par la lutte sociale et collective.

Cette idée d’un monde régi par des forces occultes est une illusion qui perdure en partie à cause de la difficulté réelle pour les populations de penser qu'elles peuvent diriger leur propre histoire et transformer la réalité sociale. Mais c'est une illusion qui ne correspond pas au fonctionnement réel de la société que le développement du matérialisme, que les progrès des connaissances permettent de comprendre. Cependant elle ne pourra être totalement dissipée qu'avec le développement des luttes sociales, d’une conscience de classe, l’appropriation par les classes exploitées du matérialisme pour liquider les préjugés véhiculés par les idéologues et les prêtres des classes dominantes tout en liquidant ces dernières.

Cette avancée des obscurantismes et la confusion qu’elle entraîne dans les consciences traduit cette contradiction profonde entre le développement, le progrès de la société humaine et le fait que ce développement ait lieu dans le cadre d’une société reposant sur des rapports d’exploitation, d’oppression sexiste, raciste, des rapports de domination coloniale et impérialiste.

À tous les délires mystiques ou complotistes, aux superstitions, nous ne pouvons qu’opposer une autre conception du monde et de l’histoire des sociétés humaines, qui se nourrit des avancées des sciences qui arment contre les croyances les plus irrationnelles, qui s'appuie sur le développement des luttes sociales. Nous ne pouvons que combattre les doutes, les remises en cause du caractère progressiste du développement des idées, des sciences et des techniques et plus généralement du progrès humain, combattre le relativisme culturel et le relativisme en science qui sur le fond conduisent à rejeter le caractère universel du progrès humain et du combat émancipateur.

Cette confusion se retrouve jusque dans les rangs des militants qui, en faisant de chaque oppression qu’engendre cette société d’exploitation une question spécifique, indépendante des autres, morcellent le combat pour l’émancipation, et finalement subissent la pression de ces idéologies au lieu de s’en émanciper. La lutte contre les oppressions ne se divise pas, ne se hiérarchise pas et aucun combat ne justifie de relativiser une autre forme d’oppression. La lutte indispensable contre le racisme qui se dissimule parfois derrière un rejet de l’Islam ne justifie pas de relativiser la lutte contre l’oppression des femmes en minimisant la signification historique du voile religieux, produit de sociétés d’exploitation où règne une oppression patriarcale justifiée par des traditions religieuses. Comme bien évidemment la lutte pour l’émancipation des femmes ne justifie pas, au nom du rejet du voile, la moindre concession à la démagogie anti-musulmane qui vise en priorité les populations d’origine immigrée des quartiers populaires.

Nous militons pour unifier l’ensemble des combats contre les oppressions qu’engendre cette société d’exploitation comme contre toutes les idéologies réactionnaires en les liant dans une même critique du capitalisme. Ce combat n’est pas un simple combat d’idées, il s’appuie sur le monde du travail, sur son organisation, sur ses luttes, il relève d’un même combat de la classe des salariés pour son émancipation, pour le socialisme et le communisme.

Malgré la diversité que prennent les oppressions dans cette société, sexisme, homophobie, racisme, xénophobie, elles ne peuvent être comprises et combattues du seul point de vue du ressenti individuel des opprimés qui les subissent mais dans le cadre plus large de la critique d’une réalité sociale qui dépasse les individus et la conscience qu’ils en ont, et l’inscrit dans le cadre et la perspective d’une lutte collective.

Le socialisme scientifique, synthèse des progrès de la connaissance et de la lutte des exploités

Inscrire le capitalisme dans sa connexion historique, montrer qu’il n’est qu’une forme temporaire de l’histoire des sociétés et en comprendre les mécanismes internes à l’origine du rapport d’exploitation salarié, tels sont les deux problèmes auxquels le socialisme dans sa forme moderne a répondu par deux découvertes. Comme l’écrivait Engels : « Ces deux grandes découvertes : la conception matérialiste de l'histoire et la révélation du mystère de la production capitaliste au moyen de la plus-value, nous les devons à Marx. C'est grâce à elles que le socialisme est devenu science, qu'il s'agit maintenant d'élaborer dans tous ses détails ».

La conception matérialiste de l’histoire participe du développement du matérialisme, de la connaissance scientifique, en inscrivant l’histoire des sociétés humaines et donc le capitalisme dans le prolongement de l’évolution de l’univers et du monde vivant. La découverte de la plus-value, à la base du rapport d’exploitation capitaliste, a permis de poser de façon matérialiste, scientifique, la question de la transformation sociale, de ses voies et ses moyens, de comprendre les enjeux historiques de la lutte du prolétariat.

Défendre le marxisme comme théorie de l’émancipation, ce n’est défendre ni une utopie, ni une idéologie, mais construire le lien entre cette compréhension matérialiste apportée par les sciences de l’évolution comme par celles de l’histoire et le progrès social porté par le travail et les luttes de la classe des salariés.

Marx a su voir dans les contradictions traversant le capitalisme naissant du XIXème siècle, le développement même des bases matérielles rendant possible le socialisme. Il a inscrit ainsi la perspective du socialisme dans la continuité de l’histoire des sociétés humaines.

Marx s’est appuyé sur les connaissances de son temps, dans le domaine de l’économie mais aussi de l’histoire, de la science et des techniques, pour chercher dans les conditions matérielles d’existence des hommes, les causes de l’histoire des sociétés… comme des contradictions qui la traversent.

A la base des sociétés humaines, il n’y a ni grands hommes, ni idéologies mais tout simplement la façon dont les hommes produisent, répartissent et utilisent ce dont ils ont besoin pour vivre, c’est-à-dire l’économie. Les différentes classes, aux intérêts antagonistes, naissent des différentes fonctions que les uns et les autres occupent dans le processus même de la production des richesses : maîtres ou esclaves, seigneurs ou serfs, propriétaires capitalistes ou ouvriers. C’est la production des biens matériels qui détermine les relations sociales et politiques, comme la conscience plus ou moins déformée que les hommes en ont et à partir de laquelle ils ont élaboré toutes leurs constructions idéologiques, religion, morale, etc..

Le développement des outils, de la technique que les hommes mettent en œuvre par leur travail, est la cause première, la force motrice de tout le développement historique. Les progrès des sciences et des techniques, en modifiant les conditions du travail, modifient les rapports entre les hommes et les classes, et leur conscience, entraînant des luttes sociales et politiques à travers lesquelles les nouvelles classes disputent aux anciennes leur domination sociale. Marx a ainsi montré que la succession des sociétés humaines n’est pas le résultat d’événements aléatoires, mais le produit d’une lutte des classes qui se poursuit toujours avec la lutte de la classe ouvrière contre la bourgeoisie.

Le prolétariat, ne possédant que sa force de travail, est la négation même de ce qui fait le fondement du pouvoir de la bourgeoisie, la propriété privée des moyens de production. C’est en cela qu’il constitue la classe porteuse de la perspective historique d’en finir avec le capitalisme, d’en finir avec la propriété privée, pour permettre à l’ensemble de la société de franchir une nouvelle étape de son développement historique en émancipant toute la société des rapports d’exploitation.

Marx a donné ainsi un fondement théorique, une base scientifique aux idées du socialisme et du communisme. Jusqu’alors, pour les militants ouvriers et révolutionnaires, le socialisme restait un idéal de société juste et parfaite, un socialisme utopique né de la révolte contre un ordre social profondément injuste. Ils luttaient contre les conséquences du capitalisme en plein essor, sans en comprendre les mécanismes, les contradictions.

Le marxisme a donné aux luttes d’émancipation, à la perspective du socialisme, une base matérialiste, scientifique, objective, en montrant en quoi cette perspective est inscrite comme une possibilité dans la continuité de toute l’évolution de l’Humanité. Il a donné leur légitimité et leur force aux idées du socialisme, du communisme en les enracinant dans les faits sociaux eux-mêmes, dans leur histoire, leur développement. Il les a reliées au développement du mouvement ouvrier en montrant le rôle historique du prolétariat dans cette histoire des sociétés.

C’est ce qui lui donne toute son actualité, l’actualité d’une méthode vivante, matérialiste, en perpétuelle construction, qui constitue le cadre pour une synthèse de tous les progrès de la connaissance visant à mieux comprendre le monde et la société pour les transformer consciemment.

La science a fait des progrès immenses, l’évolution des techniques a bouleversé les conditions de production qui ont transformé profondément la société et la planète, créant par là même les bases matérielles pour une nouvelle étape du développement historique. Les nouvelles connaissances scientifiques nous donnent aujourd’hui les moyens de comprendre le monde dans la globalité de son histoire, un monde dont nous sommes issus, qui nous a façonnés et dont nous sommes partie intégrante, et d’envisager d’agir consciemment pour participer à sa transformation. Cela nécessite, comme à l’époque de Marx et des débuts du capitalisme moderne, d’intégrer l’ensemble des connaissances et des progrès, sans craindre aucune des conséquences théoriques et pratiques de cette synthèse, d’oser voir la réalité telle qu’elle est, pour opposer patiemment les faits à la morale et aux idéologies de la bourgeoisie.

Il n’y a pas de réponse tout faite, déjà écrite, pour faire face aux enjeux de la situation. Le penser serait finalement contraire à la méthode matérialiste, scientifique qui a été celle de Marx, et reviendrait à faire d’une méthode vivante et ouverte à tous les progrès des sciences et à toutes les évolutions et transformations, un dogme mort, replié sur lui, réduit à croire au pouvoir magique des mots d’ordres historiques.

Le développement de la société conditionne les évolutions possibles, indique le sens, la direction du combat à mener, en l’inscrivant comme une possibilité et une nécessité du développement historique pour dépasser les contradictions actuelles en créant les conditions de la réappropriation par les hommes des fruits de leur activité. C’est la condition pour permettre une planification démocratique, consciente, internationale de la production de biens matériels et intellectuels pour satisfaire les besoins de tous, et être la base d’un nouveau développement d’une société humaine pleinement intégrée à son environnement naturel, le socialisme.

Bruno Bajou, Mónica Casanova

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