Depuis l’affaire Weinstein, il est à la fois encourageant de voir la libération de la parole des femmes, et révoltant de constater ce qu’elle révèle : la profondeur des préjugés machistes dans la société à travers le nombre d’agressions dénoncées, tous les jours, et le silence complice qui les entoure, en plein XXIème siècle ! C’est ce qui explique l’écho rencontré par des initiatives comme MeToo, toutes générations confondues. Les manifestations du 25 novembre revêtiront d’autant plus d’importance cette année partout dans le monde.

Le gouvernement, après avoir par la voix de son ministre Lemaire, hésité à se joindre au concert de dénonciations, tant ces hommes politiques partagent les préjugés les plus primaires contre les femmes, a fini par promettre une loi sur le harcèlement sexuel pour 2018. Macron n’a pas voulu être en reste lui qui, après des semaines de silence, va le 25 novembre faire de la lutte contre les violences faites aux femmes « la grande cause nationale de son quinquennat » ! Il a aussi promis une « police de sécurité du quotidien » dont on ne peut que douter de l’utilité, si ce n’est pour satisfaire démagogiquement les tenants du tout sécuritaire.

Pour les hommes de pouvoir, tout se résume à une question de police !

Quelle hypocrisie de ce monde politique de droite comme de gauche qui incite les victimes à porter plainte tout en supprimant des emplois et des moyens aux services publics et associations qui prennent en charge les violences, alors qu’ils font disparaître, avec la Loi Travail et sa fusion des instances représentatives du personnel, les Comités d’Hygiène, Sécurité, Conditions de Travail (CHSCT) dont une des missions est justement de combattre les violences sexuelles au travail !

Une oppression aggravée dans le contexte actuel

Impuissants à nier la question, les idéologues officiels veulent en faire un problème moral, individuel. Ils parlent d’harceleurs ou violeurs « déviants » à punir ou à écarter pour que tout aille mieux. Les réactions hostiles aux femmes et à leur révolte qui osent encore s’exprimer avec arrogance dans les milieux politiques eux-mêmes démontrent, s’il en était besoin, que le problème est social. Il est une des conséquences d'une société fondée sur des rapports de domination, de pouvoir, dont les femmes sont parmi les premières victimes.

La violence faite aux femmes, qui concerne tous les milieux, touche depuis toujours et de plus en plus, sans que personne ne s’en offusque en haut lieu, les femmes travailleuses. Celles-ci sont quasiment toujours en situation de subordination hiérarchique, ce qui facilite le harcèlement, souvent à l’origine du licenciement de la victime et presque jamais de l’inculpation de l’auteur.

Dans un des pays des plus développés comme la France, il existe toujours un écart de salaire entre hommes et femmes de 19 à 27 % (selon les critères retenus), des retraites inférieures de 39 %. Les femmes occupent majoritairement des emplois en CDD ou à temps partiel dans les secteurs du tertiaire les plus mal payés et mal considérés, dans les services à la personne, le commerce par exemple, où les traditions d’organisation sont plus tardives et moindres, le personnel souvent plus éclaté et donc les salaires plus bas.

Ce sont elles qui s’arrêtent le plus souvent pour élever les enfants et qui parfois ne reprennent pas le travail, encouragées par des politiques gouvernementales à rester à la maison (85% des familles monoparentales sont dirigées par une femme), situation aggravée dans les quartiers populaires où, par exemple, le taux de chômage des femmes atteint le double de la moyenne nationale (20%).

L’exploitation et les violences faites aux femmes ne datent pas d’aujourd’hui, ni de la crise. Elles datent des sociétés de classes, des systèmes d’exploitation fondés sur la propriété, dont la subordination des individus et des plus exposés d’entre eux, les femmes, est la base.

A l’heure de la mondialisation capitaliste, l’aspiration à l’égalité, au respect le plus élémentaire progresse à l’échelle internationale. Elle reçoit en réponse l’offensive des forces réactionnaires qui défendent l’ordre établi et constitue, de ce fait, un facteur révolutionnaire déterminant pour tous.

Pour les droits démocratiques et sociaux, contre les intégrismes

Nous sommes pleinement partie prenante de cette lutte dans tous ses aspects, sur les lieux de travail, dans les lieux d'habitation et d'étude. Nous reprenons les exigences démocratiques contre la domination masculine et la famille patriarcale corollaire de la propriété privée, forme d’oppression et de domination des femmes et de la jeunesse qui s’oppose à tout progrès social et dont l’arriération est de plus en plus flagrante.

Les revendications fondamentales du mouvement féministe, combattues par toutes les religions, le droit à disposer de son corps, dont le droit à l’avortement et contre les mutilations sexuelles (dont sont victimes, par exemple, la moitié des fillettes égyptiennes) et à l’indépendance économique (à l’heure où dans un des pays les plus peuplés comme l’Inde, des femmes sont encore vitriolées ou tuées pour ne pas avoir une dot suffisante) sont des revendications démocratiques, de progrès pour tous les opprimés.

Un combat du monde du travail uni

La lutte pour les droits des femmes n'est pas une lutte individuelle mais collective, une lutte quotidienne, politique, pour donner la force de se battre, de défier ceux qui ont le pouvoir, qui contribue à changer le rapport de forces sur un lieu de travail, dans un quartier et de fait entre la classe des salariés et la classe capitaliste.

Les femmes sont les premières victimes de l’exploitation comme des conséquences dévastatrices de la mondialisation libérale. En même temps, elles s’intègrent de plus en plus à la classe des salarié-e-s. Majoritairement urbaines et travailleuses de par le monde, les femmes sont aujourd’hui plus instruites et mêlées à tous les combats sociaux et politiques que lorsque, dans les années 60 encore, elles étaient essentiellement paysannes et analphabètes.

La moitié des migrants sont aujourd’hui des migrantes fuyant la violence, la misère, la guerre et les catastrophes climatiques. Elles deviennent de ce fait souvent chefs de famille dans des villes de pays étrangers, ce qui bouleverse l’équilibre familial de la famille traditionnelle qu’elles quittent.

Un nouveau féminisme populaire émerge ces dernières années. Il s’est particulièrement manifesté dans les rues lors du Printemps arabe, gagne du terrain en Amérique Latine avec le mouvement Ni Una Menos né en Argentine contre les féminicides, aux États Unis contre Trump et avec Black Lives Matter, ou encore en Pologne dans le combat pour l’avortement. Ce sont des luttes mixtes de toutes les générations souvent menées par des jeunes, qui lient lutte pour l’égalité des sexes et lutte sociale.

Loin de diviser les opprimés entre eux, loin d’opposer la lutte des femmes à celles des hommes et de diviser la lutte des femmes selon leurs origines, nous militons pour que l’ensemble du mouvement ouvrier reprenne à son compte les luttes féministes et pour l’émancipation politique et sociale des femmes. Les deux luttes n’en font qu’une. Si la femme est la prolétaire de l’homme, celui-ci ne pourra cesser d’être exploité que quand il reconnaîtra la femme comme son égale.

La lutte pour l’égalité des sexes est un facteur révolutionnaire immense, elle conteste à l'échelle internationale la source de l’oppression, la propriété privée et la subordination, la perversion des rapports humains par les rapports d'exploitation. Elle est un puissant facteur de liberté pour les femmes mais aussi pour les hommes dans leur combat commun pour l’émancipation.

Mónica Casanova

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