En quelques jours, le « convoi de la liberté » a rassemblé des centaines de milliers de membres sur les réseaux sociaux, annonçant sa montée sur Paris ce week-end, puis sur Bruxelles le 14 février. Plus ou moins inspirés confusément du mouvement des camionneurs au Canada aux couleurs trumpistes et d’extrême-droite, ces « convois » mélangent à la fois des participants des manifestations du samedi, contre le pass vaccinal mais aussi antivax, et des Gilets Jaunes venant porter des revendications sociales face à la vie chère, au prix des carburants qui flambe et au pouvoir d’achat qui dégringole.

Ils expriment une colère dont nous sommes pleinement solidaires, que beaucoup partagent et que l'absence de politique du mouvement ouvrier laisse sans perspective. Cette colère s’exprime avec confusion, mélangeant révolte de ceux d’en bas, refus du mépris et souverainisme, comme si l’offensive capitaliste était le fait des seules « directives européennes », ou défense d’une « liberté » individuelle brandie contre l’autoritarisme mais souvent dissociée de la lutte collective. Une confusion qui permet aux démagogues d’extrême-droite comme Philippot, Le Pen ou Zemmour de tenter de la détourner sur leur terrain pour leurs calculs électoraux.

Le gouvernement, bien conscient de la menace d’une explosion sociale, panique et réprime. Si Macron a déclaré « nous avons besoin de concorde, de beaucoup de bienveillance collective », c’est pour mieux laisser Darmanin attaquer : « ce n’est pas la chienlit la République Française ». Le préfet de Paris Lallement s’est exécuté avec zèle, avec un dispositif de 7200 gendarmes, blindés, tracteurs et dépanneuses de la police, une centaine d’arrestations et des amendes en cascade !

Le pouvoir, les classes dominantes qu’il sert, craignent d’autant plus cette colère que leur incurie éclate au grand jour, tant sur le terrain de la crise sanitaire que de celui de la crise sociale dans laquelle ils nous plongent.

Une légitime colère qui nécessite une réponse d’ensemble

La satisfaction des exigences qui sont au cœur du mécontentement et de la colère ne pourra pas être obtenue sans un affrontement avec le grand patronat et l’État. Les travailleurs, les classes populaires n’ont rien à attendre de l’élection présidentielle.

Ils n’ont rien à attendre non plus du dialogue social sur lequel comptent désespérément les directions syndicales, sans autre politique que les journées d’action sans lendemain après le 27 janvier, suivi par un appel à la grève féministe du 8 mars, une future journée de grève le 17 mars avec en perspective… un 1er mai unitaire !

La gauche syndicale et politique se refuse à entamer la confrontation, à formuler un plan d’ensemble, un programme pour l’intervention des travailleurs eux-mêmes, qui permettrait au mouvement ouvrier d’offrir une tout autre perspective à la colère qui s’exprime dans tout le pays.

Il faut en finir avec la police sanitaire. Une réelle politique de santé signifie embaucher des soignants, lever les brevets, mettre en œuvre une réelle coopération de la recherche et de la production de vaccins qui implique de socialiser les trusts pharmaceutiques.

Face à la situation intolérable des Ephad révélée au grand jour par le scandale d’Orpea, profitant de l’argent public tout en imposant des conditions révoltantes aux personnes âgées comme au personnel, il est urgent d’exproprier ces groupes privés et de créer un service public du grand âge, sous le contrôle des salariés et des familles.

Alors que les hausses de prix frappent durement les classes populaires et que l’INSEE revoit ses prévisions d’inflation à la hausse pour juin, les salaires stagnent : la médiane d’augmentation des salaires a atteint 1,4 % en 2021, le point d’indice de la fonction publique reste gelé et le SMIC a juste augmenté de 0,9 % en janvier. Par contre, les profits cumulés du CAC 40 ont dépassé 137 milliards d’euros en 2021, 14 milliards rien que pour TotalEnergies qui profite à plein de la flambée des prix des carburants !

Il faut des augmentations de 400 € net des salaires et pas un revenu inférieur à 1800 € net ; l’échelle mobile des rémunérations, indexée sur les prix et contrôlée par les salariés et les consommateurs ; la suppression de la TVA et de la TIPP, ces impôts les plus injustes supportés par les classes populaires alors que les gouvernements successifs n’ont fait que baisser les impôts des plus riches.

BNP, Crédit Agricole et Société Générale ont engrangé 24 milliards d’euros en 2021 et l’ensemble des grandes banques françaises devraient atteindre le record de 32 milliards ! Les banques captent les milliards des « plans de relance » par la dette et les spéculations financières. Lutter contre l’appauvrissement des 99 % passe par l’expropriation des grands patrons de la finance pour imposer un monopole public bancaire, contrôlé par les salariés, assurant le fonctionnement du crédit en fonction des intérêts de la collectivité.

Ces mesures sont indispensables, incontournables si l’on veut sincèrement lutter contre les inégalités et les injustices. Leur mise en œuvre nécessite d’imposer une autre logique économique qui permette de satisfaire les besoins élémentaires de toutes et tous.

Les élections présidentielles seront l’occasion de dire notre accord avec ce programme, notre volonté de le faire vivre en votant révolutionnaire, en votant pour notre camarade Philippe Poutou, candidat du NPA, ou pour un des deux autres candidats révolutionnaires, Nathalie Arthaud et Anasse Kazib, en espérant que tous réussissent à franchir le barrage antidémocratique des parrainages.

Au-delà des désaccords et des sectarismes, nos voix s’additionneront, comme nos forces devraient s’additionner pour impulser une dynamique au sein du monde du travail et de la jeunesse, pour construire l’instrument de nos luttes et combats à venir.

Laurent Delage

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