Huit mois après l’élection présidentielle, le CAC 40 peut se féliciter. Macron, son fondé de pouvoir, tient ses promesses à son égard et accentue de façon radicale l’offensive contre les droits des salariés, en faveur des classes dominantes. L’effondrement des partis traditionnels de l’alternance gauche-droite, particulièrement du Parti Socialiste, qui jusqu’alors se relayaient pour servir le patronat, n’a pas entamé la stabilité du système. Cet effondrement a profité à Macron, qui incarne la continuité de l’offensive du patronat ; à l’extrême-droite qui poursuit sa progression et son institutionnalisation ; et à Mélenchon qui parvient à apparaître comme l’opposition au pouvoir.

Mais les deux années écoulées ont aussi été marquées par le mouvement contre la loi Travail de 2016, qui a surpris tout le monde, nous compris : pendant les quatre mois de lutte, le monde du travail, malgré les limites de cette mobilisation, s’est imposé au centre de la vie politique, en remettant au goût du jour les méthodes de la lutte des classes.

Nous approprier, renforcer les acquis de la campagne Poutou

Se voulant le porte-parole sur le terrain électoral des aspirations portées par le mouvement, la campagne de Philippe Poutou a suscité une large sympathie même si celle-ci ne se s’est pas retrouvée dans notre score électoral. Elle a attiré au NPA un milieu de jeunes et de moins jeunes, de nouveaux militants ou fait revenir des camarades qui s’étaient un peu éloignés. Bien des comités ont intégré une ou deux nouvelles têtes, et ont renforcé leur milieu. L’université d’été a connu sa meilleure affluence des cinq dernières années.

Nous avons utilisé la campagne électorale comme une tribune, nous n’attendions rien de plus de l’élection présidentielle. La qualité de nos campagnes électorales ne se mesure pas qu’à l’aune des résultats sortis des urnes. Nous avons rencontré un large écho dans le monde du travail et la jeunesse dans une situation qui concourt à donner du crédit à nos idées. C’est un point d’appui pour sortir le NPA de ses difficultés.

L’enjeu principal de ce congrès est de nous donner une orientation et une politique qui rompent avec les confusions entre « représentation politique des opprimés », « travail unitaire » et la construction d’un parti révolutionnaire pour la classe ouvrière et ses luttes.

Cette bouffée d’oxygène après quelques années de baisse des effectifs sanctionne une campagne politique d’un NPA apparaissant sous ses propres couleurs. Le succès de notre campagne de terrain (accueil aux diffusions, affluence aux meetings) a été assuré par le profil de notre candidat : un ouvrier, pas un politicien ; un militant au langage clair, impertinent, révolutionnaire et internationaliste, libre de dénoncer le monde des capitalistes et leurs serviteurs politiques. Un candidat qui a explicitement avancé un programme pour les luttes, pas pour des lendemains électoraux qui chantent. C’est grâce à cela qu’il a pu faire mouche face à la candidate d’extrême droite, mais aussi aux politiciens de droite et du PS… et apparaître, à gauche, comme l’exact opposé de Mélenchon.

C’est ce profil général qui a fait connaître le NPA et suscité de l’intérêt, plus qu’en 2012, en particulier dans la jeunesse et dans des milieux ouvriers. C’est sur ce profil que nous devons capitaliser.

La bourgeoisie et le patronat, les donneurs d’ordre de Macron

Macron est haï par une large partie de la classe ouvrière. Il est le président des riches et a su, avec sa loi Travail XXL, s’attirer la sympathie de toute une couche de petits patrons qui pratiquaient toutes sortes d’abus mais se savent désormais protégés, et donc encouragés. Le principal facteur de stabilité est la politique des grandes confédérations syndicales qui se prêtent sans réserve au dialogue social. Certes, une rentrée sociale a eu lieu à la différence de certaines années. Mais les centrales qui ont appelé aux journées d’action, au premier rang desquelles la CGT, ont aussi morcelé à l’infini les réactions sectorielles pour ne pas encourager à une riposte d’ensemble. Macron gouverne donc sans qu’une réelle opposition sociale se manifeste, pour l’instant. La bourgeoisie garde l’initiative pour imposer sa politique même si elle est confrontée à un rejet et à un mécontentement de plus en plus forts au sein des classes populaires. Elle consolide son arsenal : Hollande avait saisi le prétexte des attentats pour imposer son « état d’urgence » ; Macron vient de l’institutionnaliser en l’intégrant à la loi « ordinaire ». Ce sont les mouvements sociaux et leurs militants qui sont surtout visés par ce renforcement de l’arbitraire policier.

Pas de raccourci pour combattre l’influence du Front national

Même si l’appareil du FN semble avoir vécu le second tour comme un échec cuisant, les dernières élections confirment l’influence croissante de l’extrême-droite, y compris dans les milieux populaires. Sans intervention politique du monde du travail, le développement des rapports de forces pourrait conduire à l’arrivée au pouvoir d’une droite extrême ou d’une extrême droite prenant le relais de Macron pour mobiliser la petite et moyenne bourgeoisies. Étape à laquelle se préparent aussi bien le FN que ce qui reste de LR. Ce danger est trop enraciné dans les évolutions sociales et politiques pour que nous puissions nous y opposer par des manifestations « antifascistes » qui tournent à la démonstration d’impuissance gauchiste, à chaque sortie de Marine le Pen. Il n’y aura pas non plus de raccourci électoral pour combattre l’influence du FN. Toutes les prétendues stratégies de vote « utile » ou de « front républicain », alimentent sa propagande en lui permettant de se positionner frauduleusement comme ennemi du système. Les scores électoraux du FN dans les classes populaires se nourrissent de l’absence de perspectives de lutte de classe pour résister à la violence des attaques patronales et gouvernementales. Le vrai combat contre le FN consiste à réimplanter ces idées de lutte de classe et dénoncer ceux qui s’y opposent ou les dévoient, qu’ils soient d’extrême droite, de droite ou de gauche. Et surtout, à permettre à la classe ouvrière de remporter des victoires et de modifier le rapport des forces en sa faveur.

L’extrême droite utilise aujourd’hui la démagogie contre les musulmans comme couverture à son racisme traditionnel. Cette propagande lui est facilitée par le fait qu’une droite ou extrême-droite religieuse (sous-produit des mouvements islamistes du Maghreb et du Moyen Orient) a gagné en influence dans les milieux immigrés, en tablant sur les sentiments d’exclusion et d’injustice et en réactivant l’antisémitisme. Ce qui montre une fois de plus le danger pour la classe ouvrière des divisions religieuses et des communautarismes. Ces différents courants réactionnaires n’ont pas tous le même poids politique. Mais nous les combattons tous, sans exclusive, comme ferments de division de notre classe.

Mélenchon, de feu « l’union de la gauche » à un populisme de gauche

La France Insoumise est née de la faillite des vieux partis issus de l’histoire du mouvement ouvrier, feu l’Union de la gauche. Mélenchon représente un populisme de gauche qui flatte les mêmes illusions. Il s’est défait des références vagues, toujours piétinées mais devenues embarrassantes, au socialisme ou au communisme. Il a poursuivi le travail engagé par Mitterrand pour tenter de laminer le PC pris au piège de sa propre politique entièrement soumise aux jeux institutionnels. Il ne se situe pas du point de vue du mouvement ouvrier, mais d’un point de vue nationaliste intégré aux institutions de la bourgeoisie. Ce ne sont même pas les travailleurs que LFI entend « représenter », même si elle brigue leur vote, mais le « peuple » français. LFI occupe les terrains électoral, médiatique et parlementaire – mais dispose aussi de relais notamment dans les organisations syndicales pour développer son influence dans le monde du travail.

Quelle politique pour notre parti ? Quelle unité ?

Le NPA n’a rien à voir avec ces tentatives de « reconstruire la gauche », même lorsque, après un passage particulièrement impopulaire au pouvoir, une partie de cette gauche procède à un relookage aux accents plus radicaux (et de plus en plus nationalistes). Notre problème n’est donc pas de taxer Mélenchon de « diviseur ». Mélenchon est tout à fait pour l’union de la gauche… derrière lui. Oui, il faut nous adresser aux dizaines de milliers de jeunes et de militants ouvriers qui sont attirés par LFI, votent pour Mélenchon, participent à ses meetings ou s’apprêtent à rejoindre ses rangs. Il s’agit d’expliquer nos positions en polémiquant avec LFI sur tous les fronts : contre le nationalisme et le protectionnisme, notre internationalisme prolétarien ; contre l’électoralisme de la « révolution citoyenne », les méthodes de la lutte de classe et de la révolution sociale ; contre les mirages de l’« avenir [capitaliste] en commun », un programme transitoire, intégrant également les luttes écologiste, féministe, antiraciste, vers l’expropriation de la bourgeoisie, etc. Ce que nous avons fait à juste titre en participant à la campagne électorale sous nos propres couleurs, avec notre propre candidat. Nous n’avons malheureusement pas poursuivi cet effort aux élections législatives partout où nous l’aurions pu. Nous nous sommes de fait effacés derrière les candidats LFI dans bien des circonscriptions, et pour ajouter à la confusion, le NPA a fini par appeler à voter LFI au second tour partout où cette dernière présentait des candidats !

Cette péripétie électorale n’aura pas d’importance si nous redressons la barre dans les domaines qui comptent : il nous faut renforcer l’apparition propre du NPA partout, dans les entreprises, dans les quartiers populaires, dans les lieux d’études. Occuper le terrain avec notre politique, c’est la meilleure manière d’engager le débat avec le milieu « insoumis » sur nos perspectives révolutionnaires. Car la concurrence entre nos orientations ne se situe pas que sur le terrain électoral, ni même principalement. C’est justement quand la classe ouvrière se mettra en mouvement que l’affrontement avec la gauche – qu’elle soit incarnée par LFI ou tout autre type de recomposition qui aurait lieu d’ici là - sera le plus aigu et le plus décisif. Le rôle des révolutionnaires sera alors de disputer la direction des luttes aux syndicats et aux partis de gauche en suscitant des formes d’auto-organisations ouvrières : une dure bataille politique, qui ne se règlera pas par miracle grâce à des incantations unitaires destinées aux appareils.

L’idée selon laquelle pour gagner face à Macron, il faudrait « construire une opposition unifiée au gouvernement sur le plan politique, social et démocratique » entretient une confusion préjudiciable. Unifiée derrière quelle politique ? Pas d’un Mélenchon qui veut reconstruire la gauche, pas d’un Berger qui ne s’oppose pas au gouvernement, mais pas non plus d’un Martinez, qui appelle à des journées de plus en plus émiettées et sans lendemain pour contenter sa base mais maintient le lien organique entre sa centrale et le gouvernement, en participant à toutes les instances locales et nationales de « dialogue social ».

L’unité du monde du travail passe par une prise de conscience de ses intérêts de classe, sur le terrain politique de la lutte contre le gouvernement, l’État pour poser la question de la nécessité de son propre pouvoir. Elle se construit à travers les luttes et les mobilisations sur des exigences partielles, tout en défendant une politique visant à mettre en cause le pouvoir capitaliste et en travaillant à la prise en main de leurs propres affaires par les travailleurs. Nous portons aussi cette perspective dans les organisations syndicales auxquelles nous appartenons en y entretenant autant que possible une vie militante démocratique en opposition aux appareils embourbés dans le « dialogue social ».

Nous ne saurions poser la question de l’unité sans souligner la nécessité de continuer à œuvrer pour le rassemblement des anticapitalistes et des révolutionnaires. Lors de la présidentielle, la situation, les profils de nos candidats et les éléments de programme que nous sommes parvenus à mettre en avant plaident pour que les révolutionnaires apparaissent au maximum unis quand c’est possible. Cela a été perçu largement. Le refus actuel de LO ne doit pas nous faire renoncer à cette perspective d’unité des révolutionnaires, sans se limiter au terrain électoral. Cela implique des propositions sérieuses spécifiquement adressées à LO, qui est avec le NPA la seule organisation révolutionnaire d’une certaine importance et audience.

Donner une perspective à la colère du monde du travail, à la jeunesse

Le lancement de la loi Travail XXL n’a pas déclenché un mouvement susceptible de faire reculer le gouvernement. La participation aux grèves et aux défilés du 12 septembre et du 10 octobre a été conséquente, égale à celle observée dans les journées de mobilisation durant le mouvement de 2016. La politique des directions syndicales combinée au manque de confiance des travailleurs a laissé les mains libres au pouvoir même si les choses peuvent changer très vite.

Les milieux militants les plus impliqués dans le mouvement de 2016 restent les plus mobilisés, ce qui montre la disponibilité renouvelée de ce milieu, à l’opposé de la prostration qu’on aurait pu craindre suite au passage de la loi Travail 1. Il est nécessaire d’offrir une politique et des perspectives à ces militants ou équipes militantes. Elles ne peuvent pas se résumer à proposer un agenda à une gauche syndicale qui, si tant est qu’elle existe, est très loin de partager nos perspectives d’auto-organisation et d’extension des luttes partout où c’est possible.

Elles ne sauraient non plus se limiter à l’initiative lancée par des camarades du NPA de créer avec Mickael Wamen et Infocom le Front social. Malgré les efforts consentis par ces camarades, ce Front social peine à sortir d’un milieu restreint comprenant, en plus de nos propres militants, des syndicalistes, des structures syndicales et des ex-« nuits debout » de quelques villes. Cette tentative de Front Social, parmi d’autres, de même que les différentes prises de positions publiques de structures syndicales (UD , Fédérations, opposition dans FO, etc.) ont montré néanmoins l’existence d’un milieu militant à la recherche d’une politique plus « lutte de classe », rompant partiellement avec le dialogue social. Loin d’avoir une politique risquant de marginaliser ce milieu militant par rapport au reste des travailleurs, nous devons aider à faire évoluer le niveau de conscience et d’organisation, en particulier sur les lieux de travail où nous sommes. Il s’agit d’entraîner le milieu qui a participé au mouvement contre la loi Travail et aux différentes journées de la rentrée 2017, afin qu’il s’adresse à ses collègues, syndiqués et non syndiqués. Car le risque est grand de voir un fossé se creuser entre un milieu combatif qui participe à toutes les journées appelées par les confédérations et un milieu large de travailleurs qui ne voient pas toujours le lien entre les mesures du gouvernement au niveau national et les attaques, pressions, voire humiliations permanentes et pesantes qu’il subit au quotidien.

Contribuer à préparer la riposte et développer l’influence du NPA participent d’une même démarche qui unifie notre activité en tant que parti. Nous défendons une même politique, que nous apparaissions directement en tant que NPA ou au travers d’organisations syndicales, d’associations, ou de collectifs : une politique qui vise à aider à la prise de conscience par les travailleurs de la nécessité de prendre leurs affaires en main pour affronter le gouvernement et le patronat. Dans l’ensemble de nos activités et interventions, notre orientation est fondée sur cette indépendance de classe au quotidien en rupture avec toutes les formes de dialogue social. Elle se discute et se construit pas à pas en fonction des rapports de forces et possibilités.

C’est sur cette base que nous militons pour organiser la classe ouvrière au quotidien pour qu’elle défende ses propres intérêts y compris sur le terrain politique. Cela définit notre priorité, notre implantation politique dans le monde du travail.

C’est notre capacité à organiser et donner des perspectives à la colère ouvrière là où elle se manifestera qui nous donnera de puissants leviers pour peser sur la situation nationale. Cela seul, et pas une « interpellation » impuissante du NPA lui-même ou de ses camarades depuis leur structure syndicale, permettra de peser sur la politique des appareils syndicaux.

Notre intervention dans les luttes est une préoccupation essentielle et constante. Nous savons que pour gagner, les travailleurs devront contester la direction de ces luttes aux appareils politiques et syndicaux, impulser la mise en place d’une direction des luttes émanant des travailleurs eux-mêmes et contraindre les appareils à s’y rallier – comités de grèves, de luttes ou toute autre structure d’« auto-organisation ». Cela, seuls des révolutionnaires le proposeront dans les entreprises et ils le feront d’autant plus facilement qu’ils y auront une large implantation. C’est la raison pour laquelle, la question de notre implantation dans le monde du travail reste la priorité des priorités.

Parallèlement, une de nos préoccupations essentielles est le recrutement de jeunes, intellectuels ou travailleurs, sur la base des idées du marxisme, de la défense de l’actualité du socialisme et du communisme. Développer nos liens avec la jeunesse nous est indispensable, c’est aussi une possibilité au regard de l’écho qu’a rencontré en son sein notre campagne présidentielle. C’est aussi une voie pour dépasser les clivages hérités de l’histoire du mouvement révolutionnaire en encourageant et aidant la nouvelle génération à s’engager dans le combat pour changer le monde.

Sur le plan international,

Contre l’offensive du capital, une classe ouvrière plus nombreuse, plus forte que jamais.

[Cette deuxième partie de notre plate-forme ne vise pas à faire le tour de la situation mondiale, mais à cibler certains des sujets en discussion.]

Dix ans après la crise de 2007-2008, nous assistons toujours à une offensive de la bourgeoisie mondiale contre les classes populaires et les populations pauvres. En même temps que se succèdent les politiques d’austérité, blocage des salaires, restructurations, mesures de régression sociale, le capitalisme continue à accroître à l’échelle de la planète son emprise et son exploitation de la main-d’œuvre la plus sous-payée.

La révolution technologique est au service de la course aux profits, l’ensemble de la production et des échanges organisé du seul point de vue de la rentabilité du capital. La crise écologique, dont même les gouvernants (sauf Trump) font mine de s’inquiéter, en est aussi l’une des conséquences. La lutte contre le réchauffement climatique et contre l’anéantissement de la biodiversité ne peut être posée que sous l’angle de la lutte des classes et de la perspective révolutionnaire du renversement du capitalisme, d’une réponse globale impliquant la réappropriation sociale de l’ensemble de l’économie.

Avec la chute de l’URSS, des porte-parole de la bourgeoisie impérialiste avaient tenté de construire le mythe de la « mondialisation heureuse », où le marché apporterait la démocratie, la paix et le bien-être. On voit ce qu’il en est : le capitalisme entraîne son contingent de guerres, des guerres sans fin depuis le début des années 2000, pour le contrôle des richesses. Guerres contre les peuples. Concurrence aussi, que la « mondialisation » capitaliste, c’est-à-dire une plus grande interpénétration des circuits financiers et de l’activité des multinationales à l’échelle mondiale, n’a pas abolie. Guerres permanentes entre multinationales, entre grandes puissances, et même entre celles-ci et leurs vassaux d’Arabie Saoudite et d’ailleurs. La prétendue lutte contre le terrorisme fournit le prétexte de cet état de guerre permanent, dont en réalité le terrorisme est essentiellement le fruit.

Le capitalisme, malgré ses crises successives, cycles de reprises et de récessions dont la crise de 2008 a été la plus grave (les remèdes capitalistes à sa propre crise ne faisant que préparer les conditions de l’épisode aigu suivant), a continué à investir la planète et à la modeler au fil des « eaux glacées du calcul égoïste ». La fin de l’URSS lui a offert de nouveaux champs d’investissement, en Europe de l’Est mais pas seulement. L’intégration de la Chine au marché capitaliste ainsi que l’explosion du marché intérieur chinois lui-même lui en ont ouvert d’autres. Il en a résulté une polarisation croissante de la société par concentration des richesses entre les mains d’une infime minorité, l’explosion des inégalités à tous les niveaux, entre pays mais aussi au sein des pays pauvres où les « quartiers protégés » et les nouveaux gratte-ciel jouxtent les bidonvilles.

Mais, dans le même temps, suite à la prolétarisation massive par la ruine de la paysannerie des pays dits émergents, il en surgit son antidote : un extraordinaire accroissement de la classe ouvrière à l’échelle mondiale. Cette classe ouvrière qui sait se manifester (grèves en Turquie, grèves en Chine, grèves en Roumanie ou Slovaquie). « Bien creusé vieille taupe », aurait dit Marx. Mais il manque à cette classe ouvrière, productrice de toutes les richesses et plus nombreuse que jamais, une politique lui permettant de saper les fondements du capitalisme et de prendre le pouvoir pour changer le monde de fond en comble.

C’est la tâche des militants révolutionnaires de contribuer à la construction de partis et d’une Internationale qui le permettront. Cela passe par la défense d’une politique d’indépendance de classe, internationaliste.

Face à l’extrême droite et aux replis nationalistes, la lutte internationaliste contre le capital

Pour l’heure, le trait dominant de la période est la montée des forces réactionnaires, instrument des bourgeoisies dans leur offensive contre les classes exploitées pour s’approprier une part croissante des richesses produites. Elles cherchent à dévoyer la révolte des classes populaires en les divisant et en les dressant contre des boucs émissaires tout désignés au nom du nationalisme et du racisme, de la xénophobie. À commencer aux États-Unis, où Donald Trump s’est fait élire à la Maison Blanche en promettant le protectionnisme et, entre autres, l’allongement du mur le long de la frontière mexicaine. Une élection qui renforce tout ce que la première puissance mondiale compte à l’extrême droite.

De la même façon, en Europe, on a vu ces dernières années se renforcer l’extrême droite dans de nombreux pays, du Front national en France à l’AFD désormais en Allemagne.

Lutter contre l’influence de l’extrême droite, c’est entre autres combattre les préjugés dont elle fait son fond de commerce et donner aux travailleurs un tout autre espoir de changer leur sort que celui de croire qu’ils se protègeront du chômage ou de la misère en se protégeant de l’immigré ou de la prétendue concurrence du travailleur du pays voisin. Un espoir qui ne peut se renforcer que par les luttes sociales, où l’unité des travailleurs est indispensable.

Internationalisme contre protectionnisme

Toutes les idées qui divisent les travailleurs, de la xénophobie et du racisme de l’extrême droite au nationalisme plus feutré, qu’elles s’appellent protectionnisme, patriotisme économique ou « souverainisme de gauche », sont des poisons pour le mouvement ouvrier.

Ce nationalisme, pour l’appeler par son vrai nom, est fréquent parmi ceux, partis politiques ou directions des appareils syndicaux, qui se disent de gauche, voire de la « gauche de la gauche », ou se réclament de la classe ouvrière : prétendre qu’on va protéger son emploi en protégeant son entreprise de la concurrence d’une entreprise à l’étranger (parfois possédée par le même patron, le même groupe) ; prétendre que nos malheurs, les baisses de salaires, le chômage viendraient de la création de zones de libre-échange, d’un marché ou d’une monnaie unique. Comme si les droits de douanes n’avaient été autre chose qu’un moyen pour les patrons de protéger leurs propres affaires de la concurrence, et pas les salariés. Comme si les institutions françaises ou feu la Banque de France n’étaient pas tout aussi anti-démocratiques et incontrôlées par les travailleurs que les institutions et la Banque européenne. Et, à l’heure où les patrons dits français, les Peugeot ou les Renault, ouvrent de nouvelles usines en Turquie, en Slovaquie ou en Chine, loin de nous créer des concurrents, ils nous créent des centaines de milliers de camarades de lutte. La seule façon de lutter contre le « dumping social », c’est de lutter avec eux pour l’égalité et l’amélioration des conditions de travail et des salaires. Il n’y a aucun raccourci.

En Grande Bretagne, ceux qui, dans cette gauche « patriotique », ont choisi le camp du Brexit n’ont fait que cultiver, comme toute une partie de la droite, la frilosité nationaliste chez une partie des classes populaires. Ce n’était certainement pas à l’extrême gauche de s’engager d’un côté ou de l’autre de ce petit jeu référendaire, comme si la classe ouvrière avait à trancher sur les choix possibles de la bourgeoisie britannique dans ses marchandages avec le reste de l’Europe.

Quant aux traités commerciaux internationaux, ces deals entre multinationales contre lesquels il faudrait soi-disant lutter, c’est finalement Trump, avec son patriotisme économique affiché, qui a réglé le problème du TAFTA, prenant de vitesse la « gauche de la gauche » européenne.

À l’heure où les patrons conçoivent plus que jamais leurs affaires à l’échelle du monde, il serait mortel pour les travailleurs d’en revenir à l’esprit de clocher.

Droit des peuples, nationalisme et indépendance de classe

En Catalogne, le parti indépendantiste de Puigdemont a pu tabler sur un sentiment national réel au sein de la population catalane, y compris parmi ses couches pauvres : un sentiment ancien, renforcé à l’époque du franquisme, et un ressentiment profond vis-à-vis du pouvoir de Madrid que la politique d’austérité du gouvernement Rajoy n’a fait qu’amplifier.

Nous sommes bien sûr solidaires, face aux matraques de la police de Rajoy, de ceux qui manifestaient dans les rues de Barcelone pour leur droit à s’exprimer, y compris à revendiquer, s’ils le désirent, leur indépendance. Mais aller faire croire aux couches populaires de Catalogne qu’une indépendance de leur « généralité » leur éviterait chômage et austérité n’est que démagogie mensongère. Surtout qu’il faudrait leur faire oublier les répressions de la police catalane elle-même contre les mouvements sociaux, notamment à Barcelone en mai 2011, du temps d’Artur Mas, prédécesseur de Puigdemont à la tête du gouvernement régional catalan et chef de file du même parti avant lui.

L’Espagne est devenue un État capitaliste moderne au sein duquel le nationalisme bourgeois et petit-bourgeois catalan n’est plus, loin s’en faut, un facteur révolutionnaire progressiste. En Catalogne, une des régions les plus riches d’Espagne, la classe ouvrière y est loin d’être seulement catalane : elle est en grande partie formée de travailleurs venant de toutes les régions d’Espagne, des régions les plus pauvres notamment, et d’ouvriers marocains, qui n’ont aucune raison de se sentir concernés par les revendications séparatistes d’un Puigdemont et de ses alliés de gauche. Le pire, dans les événements de cet automne en Catalogne, est peut-être de voir ces déferlements successifs de manifestants, les uns un jour avec des drapeaux catalans à la traîne de la petite bourgeoisie nationaliste, d’autres le lendemain, derrière des drapeaux espagnols, se retrouvant ainsi, qu’ils le veuillent ou non, derrière le gouvernement Rajoy.

Si la classe ouvrière de Catalogne – révoltée tant par l’austérité et la politique patronale que par les coups de matraque – était la première à se battre, il lui faudrait s’adresser aux travailleurs de toute l’Espagne pour les entraîner avec elle dans un même combat, au lieu de construire de nouvelles frontières. C’est en tout cas la perspective que doivent défendre les révolutionnaires.

Guerres sans fin et essor des extrêmes droites religieuses

En menant aujourd’hui leurs guerres au Moyen Orient au nom de la lutte contre Daech et contre le terrorisme, les gouvernements des grandes puissances veulent faire oublier que celles-ci portent une lourde responsabilité dans le renforcement des droites et extrêmes droites religieuses au Moyen Orient et au Maghreb et plus encore dans le développement des bandes armées et du terrorisme.

Sans revenir à l’origine déjà ancienne des Frères musulmans en Égypte ou à la progression plus récente du Hamas qui impose son pouvoir sur la bande de Gaza, force est de constater que les groupes djihadistes, quant à eux, sont directement le produit des guerres menées par les puissances impérialistes (États-Unis en tête) dans la région. L’apparition d’Al-Qaïda, le mouvement de Ben Laden – agent des États-Unis avant qu’il ne se retourne contre eux –, ou la montée en puissance des Talibans sont le fruit de l’appui que leur avaient apporté les États-Unis du temps de la guerre russe en Afghanistan. Daech, plus récemment, est née dans l’Irak ensanglanté par la guerre conduite par les États-Unis en 2003, de l’occupation militaire des troupes impérialistes puis de la politique des gouvernements que les États-Unis y ont mis en place, avant de se réfugier en Syrie, puis de tenter de mettre la main sur le nord de l’Irak.

Lutter contre le terrorisme, dont les peuples arabes sont bien plus quotidiennement que nous les victimes, c’est avant tout lutter contre ses causes. Celles qui permettent à des démagogues ou des chefs de clans de recruter des jeunes pour mener leur propre guerre pour la conquête du pouvoir, au nom d’Allah, quand ce n’est pas au nom d’une guerre de religions, sunnisme contre chiisme. La principale de ces causes étant le terrorisme d’État des grandes puissances, les guerres que mènent nos propres gouvernements pour le contrôle de ces régions, la misère où ils plongent les populations du Moyen Orient par le pillage de ses ressources.

Les révolutions arabes bridées par les illusions démocratiques

Les révolutions arabes de 2011 au Moyen Orient et au Maghreb ont montré la force que pourrait avoir la classe ouvrière face à toutes les dictatures, à toutes les exploitations. Dans ces révolutions, en Égypte et en Tunisie, cette classe ouvrière a joué un rôle important. Mais c’est, entre autres, faute d’une politique autonome de la classe ouvrière que les travailleurs, les chômeurs, toutes les catégories pauvres de la population ont été lanternés sous prétexte que l’heure n’était qu’à la révolution « démocratique » et pas sociale. Ce sont alors les partis islamistes qui ont ramassé la mise électorale. En Égypte, le gouvernement des Frères musulmans a été ensuite balayé par l’armée qui a repris tout le pouvoir : retour à la case départ. En Tunisie, on en est arrivé aujourd’hui à un gouvernement de coalition entre des politiciens anciennement liés au pouvoir de Ben Ali et des ministres d’Ennahdha. C’est pourtant bien par peur de la classe ouvrière, par peur que la révolution ne s’étende, pour empêcher toute expansion des révoltes, que les puissances impérialistes se sont empressées de transformer les révolutions en guerres en allant bombarder la Libye et renverser Kadhafi. En Syrie, c’est Assad lui-même qui s’est efforcé de transformer un début de révolution en guerre interne en tablant sur le communautarisme et les religions. Plongeant la Libye et la Syrie dans le chaos contre-révolutionnaire qu’on connaît aujourd’hui.

Le peuple kurde, victime du jeu des grandes puissances et de leurs alliés : l’impasse du nationalisme.

Les guerres et le chaos actuel du Moyen Orient ont remis aussi sur le devant de la scène le problème des minorités opprimées de la région. Notamment le peuple kurde. Les États-Unis eux-mêmes s’en sont servi en Irak en favorisant une certaine autonomie du Kurdistan irakien, sous la houlette de Massoud Barzani alors que son concurrent direct, Jalal Talabani, lui aussi chef de file d’une famille de notables, avait été promu un temps au poste honorifique de président d’un Irak sous la houlette de l’armée américaine.

En Syrie, c’est dans le cadre d’une politique consistant à diviser pour régner qu’Assad a concédé aux nationalistes de la communauté kurde du nord du pays une relative autonomie de la région. Le PYD qui y accédait au pouvoir s’est illustré en envoyant ses troupes combattre Daech, obtenant en retour une certaine reconnaissance de la part des puissances impérialistes, ces mêmes puissances qui l’avaient classé jusque-là, en même temps que sa maison mère, le PKK de Turquie, au registre des « organisations terroristes ».

Mais à voir la façon dont le président du Kurdistan irakien Massoud Barzani – lui au contraire fidèle allié des États-Unis – vient de se faire éconduire après son référendum sur l’indépendance du Kurdistan d’Irak, on peut être sûr que la population kurde de Syrie sera une fois de plus la victime des manœuvres des grandes puissances et de leurs alliés locaux. C’est l’impasse de toutes les politiques nationalistes, dont le peuple kurde a déjà, à maintes reprises, payé cher les revers. Revers que les Kurdes de Turquie paient déjà, Erdogan ayant repris depuis trois ans sa guerre contre le peuple du Kurdistan avec la complicité des grandes puissances, en même temps qu’il s’engageait à leur côté dans la guerre contre Daech. Cette guerre a été pour Erdogan l’occasion de renforcer son régime dictatorial non seulement contre les Kurdes mais aussi contre toute la classe ouvrière du pays, et contre la liberté d’expression.

Pourtant, s’il est un peuple « transfrontières » au Moyen Orient, constituant de surcroît, pour l’essentiel en Turquie, une fraction non négligeable de la classe ouvrière, c’est bien le peuple kurde. Ses militants sont nombreux dans le mouvement syndical turc et dans l’organisation des grèves. En 2015, le parti HDP (Parti démocratique des peuples), parti considéré comme pro-kurde, sur le simple terrain qui est le sien de la défense des droits démocratiques et de la dénonciation de l’obscurantisme de l’AKP, avait attiré des voix bien au-delà de la communauté kurde. C’est d’une alliance de tous les exploités de Turquie qu’Erdogan a le plus à craindre. Plus largement dans la région, c’est d’une alliance de classe entre opprimés, par-delà toutes les frontières, que les dictatures en place et les puissances impérialistes ont également le plus à craindre. C’est cette perspective que nous avons à défendre, et c’est aux militants de là-bas qui la défendent, même s’ils ne sont encore qu’une poignée, que doit aller tout notre soutien. Un tout autre combat que celui du parti d’Öcalan ou de son parti frère du Kurdistan syrien.

En Europe et en Amérique du Nord : rénovation de la « gauche »… ou politique de classe ?

En Europe, sur les décombres des partis communistes disparus, ou très affaiblis comme en France, et face à une gauche bourgeoise sociale-démocrate déconsidérée, sont apparues de nouvelles têtes et nouvelles formations aux allures plus radicales, tandis que l’extrême gauche communiste révolutionnaire n’a pas réussi à combler le vide laissé par les PC et le reste de la gauche, pour proposer enfin à la classe ouvrière une politique qui lui soit propre.

À quelles situations l’extrême gauche a-t-elle été confrontée ?

En Grèce, l’arrivée au pouvoir de Syriza n’a servi qu’à faire avaler aux travailleurs, aux retraités et à la jeunesse les nouvelles mesures d’austérité voulues par la bourgeoisie grecque et les banques des grandes puissances européennes (essentiellement françaises et allemandes), après avoir détourné leurs colères du début des années 2010 vers l’impasse électoraliste.

Nous avons développé plus haut, dans le cadre de la situation française où nous militons, le rôle et la démagogie chauvine de la France insoumise de Mélenchon.

En Espagne, les nouveaux politiciens de Podemos ont détourné la mobilisation des Indignés contre les politiques d’austérité vers le simple jeu électoral. En Grande-Bretagne, Jeremy Corbyn, avec l’appui des jeunes de son parti, tente de ravaler la façade vermoulue du vieux Labour Party. Aux États-Unis, Bernie Sanders, en remettant à l’ordre du jour le mot de « socialisme » a attiré à lui une frange de la jeunesse et des militants plus anciens… qu’il a ensuite déçue en servant de rabatteur de voix pour Hillary Clinton. Ce sont en grande partie ces électeurs que l’on a retrouvés dans les manifestations contre Trump.

Par delà les frontières, aux côtés des travailleurs qui résistent aux attaques du patronat par leurs grèves, souvent trahies par les directions de confédérations syndicales plus ou moins intégrées aux appareils d’État, toute une jeunesse inquiète prend part à la contestation, et cherche comment changer le monde.

Comment s’adresser à tous ceux qui se sont éveillés à l’activité militante, ou y sont retournés, par révolte face à des dirigeants bourgeois dits démocrates ou de gauche usés voire corrompus mais aussi en croyant lutter ainsi contre le capitalisme, ses inégalités et ses injustices ? Comment s’adresser à cette plus ou moins nouvelle génération de militants, même si elle se recrute au sein de la jeunesse étudiante et peu encore dans la classe ouvrière ?

Certainement pas en accordant le moindre crédit à des directions qui se sont portées à leur tête. Mais en leur proposant une orientation révolutionnaire, une politique qui en appelle au monde du travail, à sa capacité à contester et bouleverser l’ensemble de la société, à prendre ses affaires et ses luttes en mains. La classe ouvrière est la seule classe sociale que peut unifier, aujourd’hui plus que jamais, le fait d’être exploitée par les mêmes trusts mondiaux, ou leurs sous-traitants, des USA jusqu’à la Chine ; la seule qui a la force de changer le monde – à défaut d’en avoir certes aujourd’hui la conscience.

Que faire de 1917 aujourd’hui ?

Ce ne sont pas ni la révolte ni la combativité qui manquent sur cette planète parmi les opprimés. Elles surgissent à diverses occasions, comme en attestent depuis quelques années les mouvements de femmes, à une échelle internationale, contre les violences sexuelles et attitudes ségrégationnistes à leur encontre.

En cette année du centième anniversaire de la Révolution russe, notre tâche est bien de remettre à l’ordre du jour, dans les conditions du monde d’aujourd’hui, le programme d’indépendance de la classe ouvrière, de lutte de classe et d’internationalisme de cette révolution. Ce programme qui avait transformé la Première Guerre mondiale en révolution et ébranlé le vieux monde capitaliste. Sous le drapeau de la lutte de classe et de l’internationalisme.

À l’époque de la mondialisation économique, et dans cette période où le monde s’enfonce dans le bourbier des guerres du Moyen Orient ou d’Afrique, où une extrême droite fascisante émerge à nouveau au nom de la « défense de la civilisation chrétienne » ici, brandit l’islam ou l’hindouisme ailleurs, et où un Donald Trump menace de jouer avec le feu en Asie, il est urgent de proposer à la classe qui produit toutes les richesses une politique pour mondialiser ses luttes et changer le monde.

Le 20 novembre 2017

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